Le dernier vol
du Baron Rouge
Par Georges CHARLES et Siegfried MISSALLA
Quelques faits
L’histoire officielle retient le fait du hasard qui fait bien les choses. Nous proposons une autre hypothèse.
Le dernier vol du Baron Rouge, le dimanche 21 avril 1918, est bien connu des historiens qui ont reconstitué, point par point, l’itinéraire de son ultime combat.
Le fameux Fokker DRI 425/17 de Mandred von Richthofen passe au dessus du cirque de Vaux (reconstitution G. Charles)
L’histoire officielle retient donc le fait que Manfred von Richthofen, surnommé » Le Baron Rouge « après s’être écarté de sa formation en combat contre plusieurs Sopwith Camel, aurait poursuivi un certain « Wop » May, donné comme un novice, qui avait eu l’ordre de ne pas prendre part au combat et qui s’était donc volontairement écarté.
Pendant cette poursuite il aurait été lui-même pris en chasse par le Capitaine arthur » Roy » Brown qui aurait tiré plusieurs rafales sur le triplan rouge du baron. Celui-ci aurait été également atteint par le tir d’un nid de mitrailleuses situé à flanc de coteau.
Le Rittmeister Manfred Albrecht Freiherr von Richthofen au centre. A sa gauche Festner et Schäfer. A sa droite Lothar von Richthofen, son frère cadet et Kurt Wolff. Sans oublier le chien Moritz, le dogue d’Ulm. (Avril 1917)
Le triplan se serait alors posé à Sailly le Sec à la cote 102 près d’une cimenterie après un vol plané en arc de cercle. Il fut alors prétendu que von Richthofen était déjà mort en arrivant au sol. Une balle lui aurait transpercé le cœur après l’avoir atteint, dans le dos, au niveau des côtes. Quatre autres blessures de moindre importance aux jambes, au genou et au ventre furent remarquées. L’atterrissage brutal avait, en outre, occasionné une coupure sous la pommette droite, une fracture des dents et de la mâchoire.
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Le baron rouge fut sorti de l’habitacle et déposé sur une plaque de tôle. Brown accompagné du Major Cairns vint rapidement en voiture sur le lieu où les soldats présents avaient déjà commencé à dépouiller le triplan. De nombreuses photos furent prises.
La dépouille mortelle du Baron Rouge fut inhumée avec tous les honneurs le 22 avril, donc le lendemain matin, au petit cimetière communal de Bertangles.
Le 23 avril au soir un Sopwith anglais viendra lâcher un message sur le terrain de Cappy où était stationnée le » Cirque de Richthofen » et portant cette mention laconique :
» Capitaine von Richthofen, blessé mortellement en combat aérien et enterré avec les honneurs militaires « .
La Jasta 11 escadrille d’élite du Baron Rouge appelée « Le cirque von Richthofen » ou les « Papagai » (papagali), les perroquets en raison de la couleur bariolée des avions
Les pilotes de la Jasta 11 en juillet 1917 croqués à la mine de plomb par Arnold Busch Chaque pilote a signé son portrait De haut en bas et de gauche à droite Bodenshatz ; Scheffer ; Schonecke ; Niederhoff ; Bush ; Groos ; Bockelmann ; Brauneck ; Stapehorst ; Manfred von Richthofen ; Mohnike ; Kurt Wolff ; Krefft ; J.A. Wolf ; Lothar von Richthofen ; Meyer.
Doc. La guerre Aérienne 1917 – archives G. Charles
« Le cirque von Richthofen » en pleine action
Australian National Memorial Villers-Bretonneux (80). Un point rouge indique le lieu où le Baron Rouge est tombé le 21 avril 1918. C’est dire l’importance du symbole.
Le 24 avril un communiqué officiel de l’armée allemande officialise ce fait.
Le 20 novembre 1925 le cercueil contenant le corps du Baron Rouge, transféré au cimetière de Fricourt en 1920, restitué aux autorités allemandes, sera inhumé après une grandiose cérémonie, au Cimetière des Invalides (Invalidenfriedhof) à Berlin.
En 1975, enfin, Manfred von Richthofen, sera enterré près de sa soeur Ilse, de son frère Karl-Bolko et de sa mère dans le caveau familial de Wiesbaden. Il aura eu le triste record d’être inhumé quatre fois. Sa pierre tombale sera transférée à la base aérienne de Wittmund, où se trouve toujours l’Escadrille Von Richthofen, la fameuse Jasta 11.
Siegfried Missalla sur la tombe du Baron Rouge à Wiesbaden.
Il est à remarquer, encore actuellement, que toutes les cartes anglaises, françaises et allemandes relatant la bataille de la Somme font mention de l’endroit où le Baron Rouge fut abattu.
Juste après la guerre il y eut pourtant une polémique, vite étouffée, développant l’hypothèse que le Baron Rouge n’était pas mort en parvenant au sol et qu’il aurait été achevé (erschlagen) par ceux qui l’avaient abattu. (Peter Supf).
Une hypothèse qui dérange mais qui, au vu de notre contre-enquête est désormais plus que probable !
Reconstitution Siegfried Missala (c).
Cette polémique engage néanmoins à se poser quelques questions.
La première : Le fait que le Baron Rouge ait été abattu est-il le simple fait du hasard ? Le fameux syndrome de Murphy et du coup de « pas de bol » ? Ne s’agirait-il pas plutôt d’un magnifique traquenard tendu par les services secrets (MI6 – SIS ) alliés ?
La seconde question est : May et Brown ne jouaient-ils pas le rôle de la chèvre et du rabatteur ?
La troisième est : Qui était réellement « Wop » May et était-il le novice que l’on prétend ?
La quatrième est : Qui a décidé du lieu et des moyens de cette affaire. Ou à qui profite le crime ?
La cinquième est : pourquoi nous-a-ton menti puisque le siège du DRI 425/17 que le Baron pilotait ce jour même est parfaitement intact : aucun impact ni la moindre trace de sang.
Le siège baquet du Fokker DRI 425/17 que Manfred Von Richthofen pilotait le 21 avril 1918.
Photo Manfred Missalla (c)
Le trou que l’on remarque au centre du siège sert à la fixation sur le fuselage comme indiqué dans la notice du constructeur et sur la plaque apposée près de ce siège conservé ay Royal Canadian Military Institute de Toronto au Canada. « The hole in the seat’s center is not a bullet hole, it is a mounting hole » « Le trou situé au centre du siège n’est pas un trou causé par une balle. Le trou sert à la fixation ».
La notice est explicite sur l’origine du trou situé au centre du siège : il sert à la fixation et n’est pas du à l’impact
d’une balle !
Pour les sceptique voici la notice de montage du siège sur le fuselage, en rouge les points de fixation.
La blessure mortelle du Baron Rouge telle que constatée par le Colonel Thomas Sinclair et A. Nixon.
Le trait bleu représente l’axe dorsal qui était donc appuyé contre le siège baquet. L’impact de la balle mortelle aurait donc du nécessairement se trouver sur le siège et avoir perforé celui-ci.
La balle a pénètre au niveau du dos au niveau de la 9eme côte à droite en la fracturant et est ressortie 1/2 pouce sous le mamelon gauche. La trajectoire est légèrement ascendante et les deux orifices ne présentent pas de dommages, ce qui implique une balle à vitesse réduite et exclut une balle de mitrailleuse ou de fusil. La balle a été retrouvée dans la combinaison de vol mais a malheureusement disparue. Probablement récupérée comme « souvenir ».
Selon l’angle et la position de la blessure elle aurait du nécessairement laisser un impact dans le siège baquet or il n’en est rien. Si le Baron Rouge avait été touché en vol comme on l’a toujours soutenu le siège aurait du nécessairement comporter un orifice d’entrée de la balle et des traces de sang. Or comme on le voit sur la photo il n’en est rien. Et, précisons le encore, le Royal Canadian Military Institut de Toronto (Canada) atteste formellement qu’il s’agit bel et bien du siège du Fokker 425/17 que MVR pilotait ce jour là. Le fait que la balle en question ne soit pas ressortie de la combinaison de MVR laisse à penser qu’elle a simplement heurté le sol dans sa course finale. Qui dit sol ne dit pas ciel. Le Baron Rouge n’a pas été atteint en vol par cette balle mais très probablement au sol, donc après son atterrissage. Les autres blessures constatées n’étaient pas mortelles (plaies aux jambes, à un genou et plaie en séton au niveau du ventre un peu sous le nombril, donc toutes en dehors du siège baquet). Il ne faut pas être Sherlock Holmes ni même le Dr Watson pour conclure qu’on nous a, jusqu’ici, mené en bateau et raconté une belle histoire. Et que la réalité est que le Baron Rouge a bien été exécuté froidement sur ordre.
Manfred von Richthofen et son frère cadet Lothar. Le baron porte les bottes en fourrure que l’on retrouvera sur lui lors de son dernier vol du 21 avril 1918. La photo a nécessairement été prise avant le 13 mars 1918, jour où Lothar a gravement été blessé.
La botte droite en fourrure récupérée après la mort du baron. (Australian War Memorial)
La légende explique qu’il y a une perforation due à une balle en haut de la botte et que le Baron fut donc blessé aux jambes ce qui le contraignit à un atterrissage d’urgence car il ne pouvait plus manœuvrer le RDI. Le palonnier se manœuvrait en effet avec des pédales actionnées par les pieds du pilote.
Exceptionnel ! La dernière photo du Baron Rouge vivant. Il s’apprête à partir pour cette dernière mission
du 21 avril 1918.
Il est souriant et on lui fixe ses fameuses bottes en fourrure. Si on compare avec le document juste au dessus on voit que la balle qui a perforé la botte droite l’a atteint juste au niveau du genou.
Manfred von Richthofen et son dogue d’Ulm, le chien Moritz Plaque de verre colorisée