Le Dôjô : lieu d’édification de la Voie

par Georges Charles

Le Dôjô un espace temps immémorial Que l’on soit Judoka, Karateka, Aïkidoka, Kendoka, Kyudoka…le lieu où l’on construit sa pratique est le Dôjô.

Malheureusement ce terme, comme l’endroit qu’il désigne, est souvent vide de signification et la pratique perd alors sa vocation profondément éducatrice.

Il n’en demeure qu’une image vaguement orientalisante dans un contexte sportif.

L’entrée du vieux Dojo du Kodokan de Kano O Sensei Rendre aux mots leur signification originelle : une tâche herculéenne ! A l’heure où, officiellement ou peu s’en faut, le simple fait de lire, de s’habiller autrement, de se soigner autrement, de manger autrement, de se distraire autrement, donc de vivre autrement est considéré comme une suspicion d’appartenance à une secte, il devient délicat, sinon risqué, de parler de tradition.

Et plus encore de tradition orientale.

Malgré tout, certains termes traditionnels et orientaux sont passés dans le langage courant et utilisés quotidiennement et ceci, bien souvent, avec une toute autre signification que celle qui est employée dans le pays d’origine.

Dojo, avec ou sans accent circonflexe, est l’un d’eux.

En France, par le biais des pratiques japonaises, et particulièrement du Judo, quelques centaines de milliers de personnes, parfois majoritairement des enfants, emploient ce terme sans se poser la moindre question puisque, de toute évidence, il désigne simplement un « club » comportant quelques « tatamis ».

De ce fait, n’importe quelle salle agréée par un ministère, à la simple condition que son sol soit recouvert de quelques tapis orange ou vert, également agrées, devient donc, par miracle républicain, un Dojo.

Si on demande ce que cela signifie réellement il faut se contenter, dans le meilleur des cas, de la formule lapidaire et convenue de « lieu (Jo) où l’on étudie (?) La Voie (Do) ».

On constate rapidement, en comptant sur ses doigts, qu’il manque un caractère.

On retrouve, en effet, le caractère japonais très connu et utilisé Do, en chinois Dao ou Tao, qui signifie la Voie et le caractère japonais Jo, en chinois Chang (Jang) , qui signifie le lieu, l’endroit mais qui provient également du japonais ancien ageru signifiant construire, élever, édifier, mettre en place et également offrir un présent, faire une offrande, sacrifier rituellement.

On ne retrouve donc pas de trace d’étude si on excepte que le caractère chinois désigne également le lieu, la salle, où se tenait les examens officiels.

Il convient également de noter que le caractère Do, la Voie, le Principe demeure un concept global lié à la pensée, donc à la philosophie, originellement chinoise qui s’est transmise au Japon.

Ce type de concept global demeure difficile à définir comme il est difficile de préciser formellement ce que signifie exactement des termes comme paix, santé, liberté, démocratie.

Dans la conception occidentale de paix comme absence de guerre, de santé comme absence de maladie, de liberté comme absence de contraintes, de démocratie comme absence de dictature la Voie serait, en quelque sorte, l’absence de néant.

Signifiant originellement la voie, le chemin, le sentier et, par extension, le mouvement le déplacement vers un but ultime, ce caractère représentait à l’origine une tête chevelue vue de face et qui représente, étymologiquement, le chef (tête) accolé à la notion de marche laissant une empreinte profonde.

Il s’agit de la « conduite tracée par le chef du clan », donc de ce qui fut considéré pendant très longtemps comme l’autorité suprême.

En Chine, on considérait cette autorité suprême comme celle de l’empereur, qualifié de « Fils du Ciel ».

Au Japon l’empereur était également le garant de cette autorité mais comme « Descendant du Soleil ».

Dans les deux cas l’empereur est alors considéré comme le « chef de clan » qui « imprime la Voie à suivre ».

Cette Voie (Do ou Tao) est alors à la fois l’origine, le mouvement et l’aboutissement. L’endroit où s’élève et se construit (ageru…puis Jo).

La racine chinoise ancienne de ageru est « marcher » « avancer » « progresser »

Ce parcours, ce cheminement, est donc ce qui mêne à la Voie, donc au Do ou au Tao.

Pour les bouddhiste, qui utilisent également ce terme, particulièrement dans la doctrine du Chan ou du Zen, Dojo se traduit également en sanscrit par Bodhimanda : le « Lieu d’édification ».

Manda que l’on retrouve dans Mandala signifie alors enceinte et par extension cercle ou roue.

Manda est donc l’enceinte circulaire consacrée puisque représentant le microcosme universel. Bodhi, de son coté, signifie originellement « édifier les quatre stades de la Voie Surnaturelle » ( Bodhi Arya Mârga) et, par extension, parvenir à l’ éveil.

Bodhimanda, le Dojo, est donc, une fois encore, le « Lieu sacré de construction de la Voie » ou le « Lieu d’Eveil ».

Les caractères les plus anciens désignaient de fait un lieu où l’on venait faire une offrande afin de mieux se construire, de s’élever vers l’éveil donc de se réaliser.

Or, Kongzi, Confucius, dans le « Livre des Rites » précise  » : On réalise (construit) la Voie moitié par l’étude, moitié par l’enseignement… ».

Dans cette dernière hypothèse classique on retrouve alors le fameux caractère manquant, l’étude, mais également un autre, l’enseignement.

Sans risquer alors de contresens on peut affirmer que, traditionnellement, le Dojo est le « Lieu où l’on s’éveille progressivement par l’étude et par l’enseignement ».

Le fait qu’il y ait ou non des tapis vert ou orange n’y change rien.

L’ancien caractère Kara, utilisé dans le terme Karatedo, signifiait littéralement « Ce qui même de la porte d’entrée à l’autel des Ancêtres » et par extension la Chine ancestrale qui fit connaître le Tao, donc Do (Karatedo Kyohaan de Funakoshi Gichin Kodansha Press).

Il fut remplacé à la fin des années trente, en plein nationalisme nippon par le caractère Kara signifiant « vide ».

Mais pour Funakoshi, le Fondateur de l’Ecole du Shotokan (« Les pins bleus qui ondulent sous la brise ») qui était un fin lettré, il signifiait aussi en chinois classique brutal, bestial (avant que l’homme ne sache se servir d’un outil !), imbécile.

Cette subtilité de lettré avait bien évidemment échappé aux militaires, aux « martiaux » de l’époque.

Le Maître Funakoshi ne pouvait que regretter cet état de fait et il le fit savoir.

Une anecdote vécue dans un Dôjô : l’art d’arranger les mots

Dans un Dojo de Rouen où j’ai assuré quelques cours de San Yiquan le professeur de Karaté avait effectué un « copier-coller » de cet article qui était paru sous une forme simplifiée, voire estropiée, mais sous mon nom propre, dans le revue Tao-Yin que j’avais créée et dont j’occupais alors, à la fois, les fonctions de rédacteur en chef, de rédacteur tout court et de pigiste sous divers pseudonymes – Charles Larcher, Chan Sanyi, François Libert, Pierre Couturier et j’en passe quelques uns – En oubliant, bien évidemment et comme très souvent, d’en citer la provenance et l’auteur.

Cet article apocryphe figurait donc en bonne place sous verre à l’entrée du Dojo.

Hormis l’oubli, probablement involontaire, cela me sembla une bonne idée et une initiative louable d’informer les pratiquants de ce qu’est un Dojo.

Mais à la fin de l’article la citation de Confucius était mise en valeur et encadrée.

Tout était donc, ou presque, pour le mieux dans le meilleur des mondes sauf que la proposition de Confucius avait été, probablement aussi involontairement quelque peu modifiée.

Au lieu de lire « on se réalise moitié par la pratique et par l’enseignement » on lisait alors « on se réalise moitié par la pratique moitié par l’enseignant ».

Ce qui est, admettons le quelque peu différent dans l’esprit et dans la forme.

Le lapsus était probablement involontaire et il semblait donc que pour cet enseignant la réalisation du pratiquant ne pouvait provenir que de lui et de lui seul puisqu’il dirigeait à la fois la pratique et son enseignement.

Nous honorons donc ici sa profonde modestie.

Wang Yang Ming aurait pu constater que les « boutiquiers de Confucius » ne sont pas une espèce propre à la Chine et en voie de disparition ! Le Dôjô et sa disposition dans le temps et dans l’espace

 

En visite chez le Shogun Par essence le Dojo demeure avant tout d’origine japonaise et, ce faisant, les règles le concernant furent fixées par l’Empereur Kammu (736-805), pendant l’ère Heïan, en 794 lors de l’édification du Butokuden ou « Salle de la Vertu chevaleresque », Dojo situé dans le parc du Palais Impérial de Heïan Jingu à Kyoto.

Ces règles, désormais plus que millénaires, se sont transmises de génération en génération et ceci sans trop d’altération jusqu’à nos jours.

Il existe donc toujours une disposition particulière au Dojo traditionnel japonais ainsi qu’un rituel qui lui est attaché.

Cette disposition et ce rituel sont, au sein des Ecoles traditionnelles (Ryu), toujours respectés.

Les présents entretiennent l’amitié !

Cette transmission immémoriale permet au Dojo, lorsqu’il est authentique, de se situer en dehors du temps tout en maintenant la cohésion de l’espace.

Il s’agit, concernant en particulier le Japon, d’un fait hautement culturel plus que d’une quelconque tendance sectaire.

En effet, il est fort rare qu’une secte ne cherche pas, à un moment ou à un autre de son évolution, à s’échapper du classicisme parfois contraignant de la tradition authentique pour recréer un autre système plus adapté à convaincre, endormir et à dépouiller des adeptes qu’à éveiller des pratiquants.

Le rituel sectaire n’est donc souvent qu’un parodie de la tradition et le fait de connaître cette dernière permet dans bon nombre de cas d’éviter de se laisser étourdir par les néons des manèges.

Il devient alors facile de différentier l’authentique et traditionnelle lanterne japonaise de la vulgaire vessie folklorique ou sectaire.

La première particularité du Dojo est son orientation traditionnelle dans l’espace qui lui permet d’échapper au temps qui passe.

Un vieux Samourai au garde à vous mais à qui on ne le la fait plus !

Si on excepte la lumière électrique et quelques aménagements particuliers à notre époque comme les fermetures des portes et des fenêtres, les extincteurs et les indications pour les sorties de secours, le Dojo traditionnel se situe dans un espace-temps immémorial.

Lorsqu’on salue le lieu, le fait d’être à Paris, à Bourges, à San Francisco, à Singapour ou à Tokyo n’a strictement aucune importance.

Certains rétorqueront qu’il pourrait en être de même lorsqu’on commande un hamburger dans l’une de ces même villes, à la seule différence que le Dojo se situe également hors du temps puisqu’il n’existe aucune différence entre un salut effectué dans un Dojo de la capitale au début des années cinquante ou en l’an 2006 et que ce même salut aurait pu être effectué dans un Dojo semblable de Kyoto, la capitale japonaise d’il y a trois siècles.

A cette époque particulière il aurait été plus vraisemblablement difficile d’y trouver le fameux hamburger.

Le Très Vénéré Prince Shôtoku (572 622) et ses deux fils

le Prince Yamashiro et le Prince Ekuri

Notez le sceptre et l’épée droite d’origines chinoises

Cette disposition particulière ne peut être respectée que lorsque l’on construit un Dojo dans les règles ancestrales en vigueur au Japon depuis la première année l’Ere Heïan (794-1185).

Cette date marque le départ de la cour impériale de Nara à Kyoto qui devient la nouvelle capitale et la construction officielle du premier Dojo impérial en l’honneur de Sakanoue Tamuramaro qui, après une campagne militaire reçut le titre de Sei I Tai Shogun ou « Généralissime Dompteur des Barbares » !

Ce premier Dojo prit donc le nom de « Salle de la Vertu Chevaleresque ».

Afin de se conformer à l’ancienne tradition chinoise du Feng Shui ce Dojo devait appuyer son mur principal sur la « Tortue-serpent Noire » qui représentait le « Guerrier Noir », donc l’Empereur du Nord, ce qui était le titre préféré de l’empereur Kammu.

Celui-ci prenait donc place sur la partie centrale de ce mur du Nord, devant le Shinza. Shinza signifie littéralement Assise (Za) du Coeur-esprit (Shin).

C’est donc le lieu essentiel du Dojo où réside l’Esprit Originel du « Centre Auguste du Ciel » (Ame No Minakanushi No Kami)

Donc de la divinité solaire d’où descend l’empereur du Japon.

Suivant le rituel chinois ancien relaté par Laozi (Lao Tseu) dans le Daodejing (Tao Te King) au chapitre 31, le généralissime en présence de l’Empereur devait s’asseoir à sa gauche, donc à l’Est.

Les « traineurs de sabre » armés devaient, par contre, être situés à droite.

« La place d’honneur est à gauche pour le gentilhomme mais à droite lorsqu’il porte les armes. » Daodejing XXXI (Laozi ou Lao Tseu).

Dans son « Discours sur l’Epée » (Oeuvre complète XXX) Zhuangzi (Tchouang Tseu) fait une belle description de ses fameux sabreurs : « Les bretteurs que voit le Roi ont les cheveux en désordre avec des mèches en avant, ils se coiffent d’un bonnet rabattu aux rubans non ornés ; ils portent une veste écourtée par derrière. Ils écarquillent les yeux et parlent fort mais avec difficulté. Le Roi n’aime que ce genre. Si vous voulez voir le Roi en restant vêtu d’une robe de lettré, l’affaire ne se fera pas ». Cette description savoureuse évoque bien quelques films de cape et d’épée avec Toshiro Mifune ou, si on excepte le bonnet quelques démonstrateurs fédéraux !

Les temps n’ont pas tellement changé. Kamiza Shinza Shimoza – Nature Esprits Ancêtres

Plan du Dojo traditionnel

Cet emplacement d’honneur prit donc le nom de Kamiza.

C’est « l’Assise (Za) des Esprits (Kami) ».

Kami signifie littéralement Feu (Ka) et Eau (Mi) : Les Kami, divinités de l’Eau et du Feu, protègent le Japon comme le « Généralissime Dompteur des Barbares » et ce n’est pas un hasard si les pilotes-suicide se jetant sur les porte-avions américains à la fin de la seconde guerre mondiale se nommaient « Kamikase ».

Kase, dans ce cas représente le vent.

Le Kamikaze est donc le « Vent Divin Protecteur du Japon » mais aussi le « Vent de Feu et d’Eau », ce qui est explicite.

Contrairement à une erreur communément admise le Kamiza, bien que très important au Dojo, peut n’être matérialisé d’aucune manière.

Cependant comme c’est le Lien de l’Est, donc du Bois, il est de tradition d’y déposer un bouquet (Ikebana) ou un Bonsaï qui matérialisera les « forces de la nature ». .

Il correspond à l’Energie du Bois et au Dragon Vert, donc à la bravoure chevaleresque. Il est dédié au « Kami de la Haute Protection Auguste ».

Sur le même mur, à l’opposé du Kamiza est le Shimoza. C’est l’Assise (Za) des Ancêtres (Shimo – du japonais ancien Shimeru : être à l’origine).

Ce Shimoza représente à la fois le culte des ancêtres et la piété filiale ainsi que la force des anciennes traditions. Comme le Kamiza il n’est pas matérialisé. Il correspond à la justice et à l’équité, au Tigre Blanc.

Il est dédié au « Kami des Naissances Divines ».

C’est, par contre, traditionnellement l’endroit où se trouvaient exposés les éventuels portraits des « Fondateurs » ou leurs calligraphies.

Yamagushi Gogen O Sensei dans son Dojo

« L’arme précède le poing ! « 

L’ensemble Shimoza, Shinza, Kamiza forme une trinité qui se confond en Un comme expliqué dans le chapitre 14 du Daodejing.

Cette Unité se matérialise alors dans l’Autel, le Tokonoma situé devant le Shinza mais ne se confondant pas avec celui-ci.

A l’origine cet Autel était constitué d’une niche représentant symboliquement la grotte céleste dans laquelle s’était régugiée Amateratsu O Mi Kami « Grande Auguste Kami Illuminant du Ciel » et qui est à l’origine des dynasties impériales.

Dans cette niche l’empereur conservait les « Trois Joyaux » du Japon : un miroir de bronze poli, une épée droite, un joyau écarlate.

Le miroir servit à faire sortir Amateratsu de sa retraite en lui renvoyant son propre reflet qu’elle prit pour une concurrente.

L’épée droite fut trouvée dans un dragon tué par Hayasusanoo No Makoto le « Prince Masculin Puissant et Impérieux ».

Cette épée nommée « Fauchant l’Herbe » (Kusanagi No Tsurugi) sauva des flammes le Prince Shotoku (572 – 622) qui échappa grâce à elle à un incendie allumé par des conspirateurs.

Il s’agit, en réalité, d’une merveilleuse épée chinoise (Jian) à double tranchant qui servit de modèle aux premiers sabres japonais (Ken).

Le joyau écarlate est d’origine inconnue et seul l’empereur peut le contempler.

Le Prince Yamato sauvé par la fameuse épée « Coupeuse d’herbe « 

Epée devenue Trésor Impérial du Japon Par la suite, le Tokonoma fut donc dédié à la famille impériale et, plus particulièrement à l’impératrice, puis à l’empereur lui-même et, plus récemment, au Maître Fondateur du Dojo qui dans ce lieu représente l’empereur et son autorité donc le Japon tout entier. Une place pour chaque chose et chaque chose à sa place… C’est dans le Tokonoma que l’on dispose des objets consacrés que l’on désire honorer. Bien souvent un miroir de bronze ou un petit miroir triangulaire.

Au delà de sa fonction hautement symbolique il permettait jadis de saluer cet autel et le Shinza sans perdre de vue ce qui se passait derrière soi.

Il était donc parfois remplacé par des cloches de bronze qui jouaient un rôle similaire.

Par la suite on y disposa également des armes et plus particulièrement une paire de sabres, Daisho, constituée d’un grand sabre le Katana et d’un plus petit, le Wakizashi. Bien que les sabres demeurent au fourreau, la laque polie joue également le rôle d’un miroir.

On n’est jamais trop prudent lorsque l’on tourne le dos à des gens armés.

Dans les périodes moins troublées le Tokonoma était plus pacifiquement orné d’une calligraphie (Kakemono)

Au centre du Tokonoma ou du coté du Kamiza il est possible de disposer un arrangement floral (Ikebana) ou un Bonsaï.

En fait on peut utiliser de nombreux éléments décoratifs : pierre ou poterie ancienne, statuette de bronze, éventail de fer, casque (Kabuto)…ou même une armure ancienne… à condition de respecter l’harmonie des lieux. Ceci est la partie visible. Ce que l’on sait moins est que, dans la plupart des Dojo traditionnels, ce mur est composé d’une cloison de bois…ce qui permet d’y disposer, hors de vue, divers rangements.

On y dissimulait donc particulièrement des armes ainsi que les archives du Dojo dont les fameux rouleaux (Maki) comportant les enseignements ésotériques de l’école (Himitsudo).

Dans bon nombre d’écoles traditionnelles existait, et existe encore, le principe des « étudiants internes » (Ushi Deshi) qui, le plus souvent, entretenaient le Dojo mais couchaient également dans celui-ci.

Le couchage (Futon) était alors dissimulé dans les fameuses cloisons et il suffisait le plus souvent de faire jouer une glissière puis de dérouler celui-ci.

Il était par ailleurs très rare que le Dojo soit chauffé et bon nombre de Uchi Deshi se souviennent que leur respiration se changeait en glace au petit matin lorsque la chaleur de la pratique de la journée disparaissait.

Les ablutions et purifications rituelles (Misogi), et particulièrement le bain chaud (O Furo) étaient donc attendus avec impatience.

Fendre du bois et souffler pour allumer du feu sous un immense chaudron situé à l’extérieur était donc le premier entraînement matinal.

A l’opposé de ce mur, donc au Sud, se trouvait généralement l’entrée (Mon) du Dojo ainsi que l’aire d’attente (Hikae Seki – littéralement lieu où l’on prend des notes) réservée aux visiteurs. Un espace sacré et un espace profane

Cette aire d’attente était souvent constituée d’une estrade avec une balustrade ce qui permettait d’accueillir des visiteurs sans que ceux-ci pénètrent dans l’espace de la pratique.

Cette aire d’attente pouvait être séparée du Dojo à proprement parler par une cloison amovible ou un rideau afin de conserver la confidentialité de certains cours.

L’aire d’attente, ouverte sur le monde extérieur, correspond au Phénix Rouge.

C’est également le lieu « profane » où s’effectuaient les formalités administratives. On y recevait les débutants qui venaient s’inscrire.

Au début du Judo, par exemple, ceux-ci signaient avec leur sang un serment où ils s’engageaient à ne pas divulguer à l’extérieur les secrets de la pratique.

Sur le mur de l’Est, dans cette aire d’attente, étaient disposées les plaquettes de bois portant le nom et parfois le grade, ou le niveau, des pratiquants et des anciens.

Une disposition en pyramide permettait de se situer dans la hiérarchie.

Dans bien des cas le « droit d’entrée » consistait lors de l’obtention du premier grade à acheter cette plaque de bois et à la faire graver à son nom.

Au fur et à mesure de la pratique cette plaque se déplaçait pour aller, peu à peu, de la base vers le sommet.

Lorsqu’un pratiquant abandonnait ou décédait sa plaque était brisée ou brûlée cérémonieusement.

Ce qui permettait à toutes les plaques situées en deçà de grimper d’un échelon.

A partir de cette aire d’attente et jusqu’au milieu du Shinza le Dojo était séparé par une ligne centrale fictive, le Seitchu Sen, en deux parties distinctes.

Cette ligne représentait l’axe du monde.

Sur le coté Est, donc à droite en regardant le Shinza, se trouve alors le Migi Gawa (coté droit) considéré comme Ura, donc Yin et féminin.

Sur le coté Ouest, donc à gauche en regardant le Shinza se trouve le Hidari Gawa (coté gauche) considéré comme Omoté, donc Yang et masculin.

Le Migi Gawa, situé du coté du Kamiza, est traditionnellement le coté réservé aux plus anciens.

Les plus haut gradés se situant le plus près du Kamiza, donc dans la zone Nord-Est, qui demeure la place d’honneur qui est également nommée Joseki.

Par conséquence le Hidari Gawa est la zone réservée aux moins anciens et aux moins gradé.

Les débutants se trouvant donc près de l’aire d’attente dans le coin sud-ouest qui correspond bien souvent à la porte d’entrée et de sortie.

C’est le coin des « sans-grade » (Mukyu) probablement de ceux qui se faisaient tuer en premier lorsque le Dojo était attaqué !

Mukyu signifie littéralement « sans grade », donc « sans nom » puisqu’il n’y a pas de plaquette comportant celui-ci dans l’enceinte du Dojo.

Dans bon nombre de Dojo japonais les Mukyu étaient considérés comme la dernière forme de vie animale sur la planète juste entre le protozoaire et la méduse ou le lombric. Ils étaient donc taillables et corvéables à merci.

A l’opposé les plus hauts gradés protégeaient le Maître de leur sabre.

Il est à noter que le premier Kuy, donc le « premier nom », très souvent un pseudonyme assez peu flatteur, correspondait à ce qui est actuellement la ceinture marron.

Donc un être commençant tout juste à simplement exister, comme un embryon, dans et pour le Dojo.

Le Premier Dan, donc la fameuse « ceinture noire » correspondait donc au début de la pratique, à la naissance.

« Jusqu’à la ceinture marron on apprend à pratiquer, à la ceinture noire on commence la pratique » se plaisait à répéter le Maître Kawaishi qui fut « l’inventeur » des ceintures de couleur !

En délivrant les ceintures jaunes, oranges, vertes, bleues, marrons il n’était donc pas dupe qu’il s’agissait là d’un truc sinon d’un gadget pour attirer les occidentaux.

Ceux-ci considéraient donc, à tort, que la ceinture noire premier Dan était le bâton de maréchal alors qu’au Japon cela correspondait, ou peu s’en fait, au grade de caporal, le premier Kyu était première classe et en dessous la « troupe » des « ashigaru » littéralement « ceux qui vont à pied ».

Donc le strict équivalent de nos « va nus pieds ».

Ce n’est en fait qu’à partir du Troisième Dan qu’on commence à réaliser sa pratique.

Les autres Dans étant, somme toute, très honorifiques et délivrés pour service rendu au cours, au Dojo, à l’Association, à la Fédération ou au Ministère.

Mais ne le répétez surtout pas. Sempai et Kyohai – L’Ancien et le nouveau

Strictement entre nous la seule distinction réelle et respectée au Japon est l’ancienneté. Un Sempai (celui qui était là avant) prime toujours sur le Kyohai (celui que est arrivé après).

Le Sensei, ou enseignant, est simplement « celui qui est en avant », donc celui qui montre le chemin, la Voie.

C’est étymologiquement le « guide », terme précis qui dans certaines langues peut faire assez peur (Führer ou Conducator), le terme de « maître » demeurant une notion très occidentale et très romaine (Magister), à l’origine celui qui possède des esclaves, puis, par extension « chef de famille ».

Mais on peut être le Sempai (l’ancien) du Sensei et suivre son cours si on ne désire pas « se mettre en avant ».

Puisqu’il a décidé de « rester en arrière », donc de « rester sur ses gardes » pendant le cours le Sempai doit le respect au Sensei mais en dehors du cours les choses s’inversent.

Ce respect à l’enseignant date de la doctrine Confucéenne qui expliquait que même l’empereur devait le respect à un enseignant dans l’exercice de sa fonction essentielle de sa fonction, de même qu’il devait le respect aux familles représentant les défunts morts pour la patrie. I

l devait donc attendre, avant de déranger l’enseignant que son cours soit fini.

Il va sans dire, bien évidemment, que les enseignants mettaient rapidement fin à leur cours en présence de l’Empereur !

Mais le principe demeure.

Nul n’est censé déranger un enseignant pendant son cours et à plus forte raison pendant ses explications (ou les élèves sont à genoux ou debout alignés) ou pendant le cérémonial qu’il dirige.

Puisque le Cérémonial est destiné aux Esprits de la Nature (Kami), aux Esprits (Shin) et aux ancêtres (Shimuo) ce serait un sacrilège contre la Voie (Do) de le perturber, sacrilège que même et surtout l’empereur, évitait de commettre.

La Déesse du Mont Fuji

Protectrice du Japon et des Dojo

Notez la similitude avec la Bannière de Mawangdui

dans la présence simultanée du Soleil et de la Lune (Ming) Des déplacements très particuliers dans le Dôjô Cette disposition spécifique du Dojo traditionnel impliquait des déplacements qui ne l’étaient pas moins et à moins de passer pour un barbare il convenait d’apprendre à évoluer harmonieusement suivant les règles du Dojo, le Kihontai.

On entre et on sort du Tatami par la partie faisant directement face au Shimoza en saluant en direction du Kamiza et en déplaçant en premier le pied situé du coté du Shimoza (Shimo No Ashi), donc généralement le pied gauche.

Si on entre du coté du Kamiza, ce qui est déconseillé, il faut, par contre utiliser le pied droit (Kami No Ashi).

Dans la mesure du possible il convient d’éviter de marcher sur la ligne d’entrée du Dojo ou sur la partie centrale (Seitchu Sen).

Ensuite, en se déplaçant dans le dojo et sur le Tatami il convient que la jambe qui se déplace en premier ne présente pas son arrière au Kamiza.

Par rapport à l’axe central il suffit de se souvenir que le pied qui se déplace en premier présente sa face interne et non sa face externe.

Lorsqu’on se situe face au Shinza et dans la partie gauche (Hidari Gawa) mieux vaut donc déplacer le pied gauche d’abord.

Si on se situe face au Shinza mais dans la partie droite (Migi Gawa) mieux vaut donc déplacer le pied droit d’abord.

Cela s’inverse lorsqu’on tourne le dos au Shinza !

Pratiquer autrement dans un Dojo traditionnel est une faute d’éducation.

A vrai dire les Japonais ne le feront pas remarquer, ou très rarement, car ils considèrent les étrangers, particulièrement les Occidentaux (Gajin), comme de grossiers barbares qu’il est difficile d’éduquer à ces subtilités.

Il est, en effet, difficile d’admettre que le salut lorsqu’on entre sur le tatami ou que l’on sort de celui-ci se fait en direction du Kamiza alors que le salut rituel de début de cours se fait en direction du Shinza et plus particulièrement du Tokonoma à moins que l’on salue la photo du fondateur qui ne se trouve pas nécessairement dans l’autel mais à coté de celui-ci !

Il est également considéré comme une malpolitesse de passer entre le Kamiza en un ancien ou un enseignant.

On ne passe pas dans le dos d’un plus gradé que soi, sauf si il en donne l’autorisation expresse.

Dans ce cas il convient alors de le saluer d’une simple inclinaison du buste.

Tout cela semble bien évidemment un peu compliqué mais était rendu nécessaire par l’utilisation d’armes dangereuses et tranchantes comme des rasoirs.

Il convenait alors de savoir où chacun se trouvait.

De même cela évitait bon nombre d’accidents lors de projections intempestives.

Ces simples règles évitaient tout simplement le risque d’un coup de sabre ou de recevoir un pratiquant dans les jambes.

Si elles étaient respectées bon nombre d’accidents seraient évités.

De même on ne sortait jamais du tatami sans en avoir demandé l’autorisation.

En cas de blessure cela permettait à l’enseignant d’être immédiatement tenu au courant de la situation et d’éviter de perdre du temps.

De nos jours les pratiquants entrent et sortent souvent du tatami comme d’un moulin et nul ne sait alors ce qui se passe.

De ce fait un blessé peut fort bien demeurer dans le vestiaire sans que nul ne le sache. Par conséquence les vestiaires sont également de véritables moulins ou n’importe qui entre et sort à sa guise, ce qui sur le plan de la sécurité n’est pas un réel avantage ! Le salut et les saluts

Le salut, salus, c’est originellement, en latin, la cessation du danger, la conservation de la vie, par extension la santé et même le bonheur. On retrouve cette racine dans salutaire, salubre.

Par le simple fait de se saluer on se souhaite donc vie, bonheur et santé.

Grâce au salut on est donc sain et sauf, que demander de plus ?

Il semble donc naturel que dans le Dojo, lieu où l’on construit la Voie, on utilise le salut. Mais, que salut-on exactement ?

On salue tout d’abord le lieu et ce qu’il représente symboliquement, donc la Pratique.

il est donc normal de saluer en direction du groupe Shimoza, Shinza, Kamiza et plus particulièrement le Kamiza qui est le siège des divinités protectrices.

Ce salut s’effectue debout (Ritsureï), talons joints et paumes des mains sur les cuisses. On salue ensuite la pratique, le Do (Voie), sa transmission et ses représentants, c’est à dire le Maître Fondateur, ses descendants et ses héritiers donc les enseignants et les anciens éventuellement présents sur le tatami.

Cette salutation si on est à l’extérieur du tatami, donc dans l’aire d’attente (Hikae Seki) se fait également debout. Dans les Dojo traditionnels on salue le Senseï (littéralement celui qui est né avant celui qui est en avant) lorsqu’il entre ou sort du Dojo, lorsqu’il monte ou descend du tatami, lorsqu’on lui demande conseil.

Ce salut se fait habituellement à genoux (Zareï).

On salue, enfin, les pratiquants et les instruments de la pratique.

Cela se fait lorsqu’on invite un partenaire, lorsqu’on est invité par un ancien (Sempaï – littéralement précurseur, celui qui était là avant)) ou qu’on utilise un instrument permettant de « construire la voie » donc un arc, un sabre, un bâton ou même un makiwara (paillasson de frappe) ou un sac de frappe !

On cite, à ce sujet, l’exemple du Maître Funaloshi Gichin, fondateur du Karatedo Shotokan, l’une des écoles les plus réputées au Japon et dans le monde qui saluait toujours respectueusement le Makiwara au début et à la fin de l’entraînement à la frappe. Il expliquait en souriant que ce Makiwara était plus ancien que lui et que malgré tous les coups qu’il prenait était toujours disponible et de bonne humeur.

Cela vaut bien un salut.

Cela permet également d’indiquer que le travail est fini et que l’instrument est libre et en bon état.

Le fait de saluer une arme après son utilisation permet, également, de vérifier son état général et donc d’éviter des blessures si l’arme a été endommagée.

Un bâton fêlé est un excellent moyen de se blesser gravement la main lors d’une utilisation postérieure et une lame de sabre qui s’envole dans le public faute d’être bien fixée, cela s’est vu, est un risque qui s’évite en grande partie grâce au salut à l’arme. Pour ceux qui sont autour, le fait de saluer une arme indique que l’on va l’utiliser ou que l’on cesse de s’en servir.

C’est donc une indication essentielle à la sécurité.

Ces divers saluts n’excluent pas, au contraire le salut de cérémonial (Reiho – littéralement salutation rituelle ou étiquette).

Ce salut collectif s’effectue au début et à la fin de chaque cours et regroupe l’enseignant en titre, ses assistants, les anciens, les pratiquants et au Japon le public qui se lève lors du salut.

Dans les grands Dojo un salut collectif exceptionnel s’effectue au début et à la fin des cours journaliers puisque la pratique ne cesse pas de tôt le matin jusqu’à tard le soir. Dans ce cas les saluts intermédiaires s’effectuent lorsqu’un enseignant en titre monte ou descend du tatami.

Ces saluts s’effectuent nécessairement à genoux (Zareï) et le cérémonial peut varier suivant les écoles.

Ce rituel peut être très complexe, ceci en fonction des différents grades, titres ou distinctions, donc groupes présents sur le tatami.

En sus des « jeunes » (Kohaï) et des « anciens » (Sempaï) donc de ceux qui sont arrivés après ou de ceux qui étaient là avant, qui constituaient une hiérarchie interne toujours très respectée car un « jeune », quelque soit son grade, devait toujours le respect à un « ancien » on distinguait encore les Mukyu (« sans grade »), les Kyu (grades inférieurs) et les Dan (grades supérieurs ou niveaux de pratique).

L’obtention du Dan se symbolisait habituellement, au Japon, par le port de la fameuse ceinture noire qui était une ceinture blanche ou marron teinte pour la circonstance. Les grades les titres les distinctions : une confusion entretenue

Le premier dan (Shodan) est, traditionnellement, considéré comme le début de la pratique.

Avant celui-ci, jusqu’au premier Kyu (Ikkyu) on apprend à pratiquer, après, seulement, on pratique.

Par la suite, en fonction du travail et des mérites on monte peu à peu dans la hiérarchie de la pratique.

Parallèlement aux grades et aux niveaux, souvent officialisés par les fédérations sinon les ministères, existent des titres et distinctions.

En Aïkido, ainsi que dans de nombreuses écoles de Jujutsu, par exemple, en sus des niveaux d’enseignants, on trouve encore six titres (dans les Ecoles classiques !) :

Monshi (« celui qui a passé la porte » donc l’initié);

Kenshi (celui qui recherche donc le chercheur);

Sushi (celui qui applique sa pratique à l’extérieur);

Renshi (celui qui est droit);

Kyoshi (celui qui transmet);

Hanshi ( celui qui donne)*.

Ce dernier titre est le plus élevé : c’est le fameux Shihan (inversion des caractères comme dans l’Hexagramme Tai (11) où le Ciel est en bas et la Terre est en haut !) .

Celui qui a tout reçu et qui, a son tour peut donner.

Le Hanshi prend place sur la ligne centrale (Seitchu Sen), dos au Shinza.

Les Kyoshi prennent place sur le coté du Kamiza.

Les Renshi prennent place sur le coté du Shimoza.

Kyoshi et Renshi regardent vers la ligne centrale.

Les Sushi prennent place face au Kamiza. Les Kenshi et les Monshi prennent place face au Shimoza.

Viennent ensuite les Niveaux (Dan), les Grades (Kyu) et les néophytes (Mukyu). Habituellement tous se tournent vers le Shinza et saluent celui-ci.

Les divers groupes séparément saluent ensuite le Hanshi qui demeure immobile.

Dans ce cas un second salut permet à ce Hanshi de saluer tous les groupes qui s’inclinent alors en même temps que lui.

Si l’enseignant est d’un titre moins important le salut est global et cet enseignant s’incline en même temps.

Il convient d’attendre que l’enseignant ait fini de saluer avec de se relever.

Lorsque le groupe est important, pour éviter tout flottement ou indécision il est alors courant de procéder à des commandements qui sont effectués par un des anciens attitré çà cette fonction.

Ces commandements sont, dans la majorité des cas, les suivants :

« Rei ! » (Salut !)

Cela indique que le salut va avoir lieu et chacun regagne sa place.

« Seiza ! (A genoux !) .

C’est l’invitation à se mettre en posture à genoux.

On pose d’abord le genoux gauche au sol, puis le genoux droit, on met les mains sur les cuisses, on conserve le dos droit, on ouvre la poitrine, on rentre légèrement le menton et on regarde en direction du Shinza.

« Choshin ! » (littéralement « calmer le coeur » ou début de la méditation) ou « Mokuso !  » (« Méditation » littéralement « trouver le centre »).

Fermer les yeux quelques instants et faire le calme en soi.

« Yame ! » (Fin de méditation, littéralement « Prêt ! »).

« Shomen Ni Rei » (Salut en face!…)

donc salut au groupe Shimoza, Shinza, Kamiza…ou au Kamiza symbolique (photo du Maître Fondateur, Ikebana…).

« Sensei Ni Reï ! » ( Salut à l’enseignant).

« Ritsu ! » (Debout !).

Fin du salut de cérémonie.

Dans certains Dojo le plus ancien s’adresse alors au Senseï :

« Domo Arigato Gozaimashita » (Merci pour votre enseignement !).

Le Senseï répond alors invariablement

« Gokuro Sama Deshita » (Nous avons obtenu satisfaction !).

Le cours peut alors commencer ou se terminer. Faire partie du Clan ou faire du karaté

Précisons encore que c’est à partir du Premier Dan que l’on fait « partie du Dojo » donc de l’Ecole (Ryu) comme on fait partie d’un Clan.

Avant le premier dan on peut donc dire que l’on « fait du karaté, de l’Aïkido, du Jiu Jitsu… ».

Comme on dit que l’on fait la Thaïlande, les pyramides, du tourisme, son âge ou un infactrus.

Donc pour la première fois et en touriste.

Après le premier Dan on précise l’école : je pratique Shotokan avec Sensei untel..

Entre initiés il n’est plus besoin de rappeler le nom de l’école.

Etre l’assistant de Sensei Untel suffit. Et il n’est nul besoin de l’affirmer puisque tous les anciens le savent pertinemment !

A partir d’un certain niveau prétendre « faire du Karaté » serait un peu comme si Zidane prétendait « faire du ballon ».

Ridicule. Mais , malheureusement il y a bien longtemps que le ridicule n’a jamais plus tué personne.

La preuve, désormais on applaudit à la fin de certains cours comme on applaudit lorsque le pilote s’est bien posé, qu’on applaudit une dinde ou un boutonneux en « standing ovation » à la Starac, qu’on applaudit quelqu’un qui parle ou donne son nom comme dans les formations d’entreprise, où même lors de l’arrivée du cercueil lors des enterrements !

Très vulgaire et mauvaise habitude venue, comme beaucoup de choses détestables, des Zétazunis.

L’excessif est insignifiant et applaudir pour un oui ou un nom n’est pas une preuve d’estime ou de respect mais un réflexe de mouton de Panurge.

La pratique n’est pas un spectacle qu’on applaudit comme la performance d’un artiste ou d’un sportif.

Je refuse la dénomination d’ « Artiste Martial » si chère à nos lointains cousins passés directement de la barbarie à la décadence sans étape intermédiaire.

J’aime les artistes comme j’aime la musique ou la justice.

Mais je me méfie quelque peu de la musique militaire, donc martiale, comme je me méfie de la justice militaire et de ses cours martiales. Au sujet de l’ancienneté il existe, par contre, une « caste des anciens » qui se reconnaissent fort bien même entre écoles différentes.

On aime ou on n’aime pas mais on respecte.

Et dans ce cas on peut même se respecter entre « Chinois », « Japonais », « Coréens », « Vietnamiens », « Thaïlandais », « Indonésiens » et même « Français », « Anglais », « Américains » et « Brésiliens ».

Il s’agit, somme toute d’une même grande famille.

Les différences minables entre « interne et externe » ne valent donc pas la peine de déterrer la hache de guerre parce que la plume n’est pas au même endroit !

Au-delà de ces problèmes on distingue donc une certaine « aristocratie » de celles et ceux qui en on pris pour vingt ans et souvent même à perpétuité, parfois héréditaire, et une sympathique plèbe des « touristes » qui en ont pris pour trois semaines à l’essai et avec sursis.

Et qui sévissent généralement dans les forums sous des pseudonymes orientaux plus, heureusement, que sur les tatamis ou les parquets qu’ils évitent de fréquenter.

Et puis celles et ceux qui s’engagent pour un certain temps et qui méritent réellement de ne pas être déçu(e)s.

Malheureusement un pratiquant sincère déçu par un enseignant est souvent un pratiquant perdu pour la pratique.

Le Mont Fuji et un bateau en flammes

Coffret de Dojo
L’entretien du Dôjô Cet entretien est le fait des anciens qui veillent à ce que les plus jeunes maintiennent le Dojo dans un état de propreté indispensable à la pratique de la Voie.

Jadis c’était un honneur, en tant que pratiquant de nettoyer le Dojo et il n’était pas rare de voire des anciens et des ceintures noires passer le balais sur le tatami * ou la serpillière sur le parquet.

Cela faisait partie de l’enseignement du Zen ainsi que des rituels du Shintô * .

Cette propreté à la japonaise était la caractéristique la plus évidente du Dojo.

Celui-ci pouvait être modeste voire franchement vétuste il n’en était pas moins briqué comme un sou neuf.

De nos jours les photos des Maîtres (pourquoi sont-ils là ?) sont souvent recouvertes d’une telle couche de poussière qu’on se croirait dans une brocante.

Lorsqu’une telle attention est apportée au Maître Fondateur on imagine celle qui doit être apportée au tapis synthétique qui recouvre le sol !

Il ne faut donc pas s’étonner du risque de verrues plantaires ou de mycoses les plus diverses.

Lorsque le Tokonoma (autel) est poussiéreux le tatami est nécessairement suspect.

Il devient rapidement un véritable nid à microbes et autres champignons.

Ce qui était jadis un honneur et en enseignement est aujourd’hui, une contrainte et on laisse ce soin de pureté à un « technicien de surface », donc un profane, ce qui n’est pas, loin s’en faut, une évolution.

Par simple raison d’hygiène on ne monte pas sur le tatami avec des chaussures « de ville » ou « de sport » qui amènent de nombreux miasmes et les pieds doivent être d’un propreté absolue.

Dans le cas contraire mieux vaut prévoir des chaussons de pratique ! Quelques définitions bien senties

* Le tatami : C’est à l’origine une natte de paille de riz tressé recouverte de toile de lin mesurant 1M90 de long et 97cm de large.

Il servait donc de mesure au Japon.

Une salle, ou un Dojo, se mesurait en surface de tatami.

.Par extension le tatami représente donc l’ensemble des nattes disposées dans une salle.

Cette paille de riz tressée permettait d’amortir les chocs lors des chutes et projections

Mais il convenait encore d’apprendre à chuter !

Le tatami authentique n’était donc pas très confortable mais évitait bon nombre d’accidents que l’on constate désormais avec les tatami (…ou tatapis !) de mousse.

Ces derniers sont plus confortables et ne nécessitent donc pas d’apprendre à chuter, d’où de nombreuses blessures par manque de technique.

Les anciens tatamis s’ils provoquaient des bleus absorbaient le choc, les nouveaux, bien qu’homologués, donc officiels et obligatoires, n’absorbent plus ce choc de la même manière ce qui à long terme provoque des problèmes de dos, de genoux et de chevilles. C’est le phénomène du matelas de lit trop mou !

Lorsqu’on chute sur un matelas on se laisse aller, mais le véritable brise-chute (Ukemi) est tout sauf un laisser aller !

De plus, si elle est bien entretenue, la paille de riz respire, ce que ne fait pas la mousse synthétique.

La bonne odeur de paille de jadis valait bien la mauvaise odeur de pieds d’aujourd’hui. * Shintô :

Littéralement la pratique, ou la discipline (To) de l’Esprit (Shin – littéralement coeur originel).

Ce qu’on peut traduire en chinois classique, qui fut à l’origine du terme par Shen Dao (Voie des Esprits ou Voie de l’Esprit ).

Cependant notez que le caractère originel tant chinois que japonais (Shen ou Shin) désigne l’Esprit, par extension les esprits et non comme on le traduit souvent des « divinités ».

Il existe une petite différence entre les « esprits de la nature » et des « Divinités de la Nature ».

Un arbre, un rocher, une chute d’eau peuvent, à la rigueur représenter la force du Divin ou la manifestation de celui-ci mais n’en sont pas pour autant des divinités pas plus que nos Saints ou nos églises ne sont divinités !

C’est la religion propre au Japon et qui consiste à honorer les Kami (Esprits de la nature) au travers de rituels de purification et d’offrandes.

Parfois très proche du Taoïsme originel, le Shintoïsme est considéré comme l’une des trois religions officielles du Japon, les deux autres étant le Bouddhisme et le Confucianisme (culte des ancêtres et piété filiale).

Dans le Dojo traditionnel ces trois courants de pensée cohabitent le plus naturellement du monde et il est souvent bien difficile de savoir à quelle tendance appartiennent réellement les rituels pratiqués. Le Shintô se veut, bien évidemment, très respectueux de la nature dans laquelle l’être humain doit s’inclure sans la perturber.

A son contact l’être humain éveillé se purifie peu à peu.

Dans une certaine mesure le Dojo, en tant que microcosme de la nature, est considéré comme un lieu idéal de purification et d’éveil aux principes, donc aux Esprit (Kami) de la nature.

Respecter le Dojo c’est respecter la Nature au travers de l’être humain.

Mais tout ceci est peut être un peu excessif dans le contexte actuel ou « le sport pourrit le fric » et même, comme c’est le cas pour la coupe du monde de foot, la prostitution ! Oubliez donc rapidement tout ce que vous venez de lire.

Le plan du Dojo traditionnel