Quelques notions à partir des représentations circulaires

1/ Le centre et la circonférence

« Trente rayons se réunissent autour d’un moyeu, c’est de ce vide dont dépend l’usage du char. » Lao Zi 11

Le centre et la circonférence correspondent au Principe et à la manifestation, à l’Unité et à la multitude.

« Tao engendre l’Unité, l’Unité engendre deux, deux engendre trois. Trois engendre les dix mille êtres » Lao Zi 42.

Le centre peut être symbolisé par le noyau (cf. zheng ming 1) par le cœur, par le soleil, la caverne, la montagne, l’île… Les différentes images pouvant se combiner entre elles.

«Occupant au- dessus de l’éther le trône du milieu, et ayant pour figure un cercle éblouissant qui est le Cœur du Monde, tu remplis tout d’une providence à même de réveiller l’Intelligence. » Proclus Hymne au soleil

« Le nom d’Intelligence du Monde que l’on donne au Soleil répond à celui de Cœur du Ciel ; source de la lumière éthérée, le soleil est pour ce fluide ce que le cœur est pour l’être animé. » Macrobe Le songe de Scipion I, 20

« [Le soleil] ayant la force d’un cœur, disperse et répand de lui-même la chaleur et la lumière, comme si c’était le sang et le souffle. » Plutarque De la face que l’on voit dans le cercle de la lune 15/4

L’intelligence dont il est question dans les deux premiers extraits est l’intelligence pure et non la raison qui est symbolisée par la lune qui ‘réfléchit’ la lumière du soleil.

Cette représentation (fig.1) est, en astrologie, le signe du soleil et en alchimie celui de l’or. Au niveau de la science des nombres c’est le symbole du dénaire (10), le centre étant le 1 et la circonférence le 9 (cf. PdH n°9, la rubrique de caractères). Il y a une relation évidente entre le soleil, l’or, le cœur et le centre. Une fois de plus les traditions qu’elles soient occidentales ou orientales s’accordent.

Notons d’ors et déjà que le centre est un point de départ, mais qu’il est aussi l’aboutissement : « Le retour est le mouvement du Tao » (Lao Zi 40) et qu’en tant que point principiel, il n’est pas soumis à la condition spatiale.

« (…) c’est un point, d’où ceci et cela, oui et non, paraissent encore non distingués. Ce point est le pivot de la norme. C’est le centre immobile d’une circonférence, sur le contour de laquelle roulent toutes les contingences. » Zhuang Zi chap.2/C

Si l’on trace des rayons du centre vers la circonférence on obtient le symbole de la roue. Le nombre de circonférences est véritablement indéfini tout comme le nombre de rayons. Le centre est indépendant de toute circonférence alors que celle-ci est soumise à celui-là.

Cette circonférence est le samsara ou la roue cosmique de l’Hindouisme et du Bouddhisme que Chakravarti fait tourner. Cette roue cosmique que l’on retrouve dans de nombreuses traditions symbolise le monde manifesté, c’est-à-dire la Nature dans son sens le plus large. Le Principe est le départ et l’aboutissement de toute manifestation, les rayons (non représentés sur la figure) en sont la voie (tao, tariqa cf.zheng ming) de communication et peuvent être parcourus dans les deux sens. Cela correspond à deux forces : l’une centrifuge, l’autre centripète (cf. le tout début du kai men shi). Du centre vers la périphérie et de la périphérie vers le centre. C’est aussi le flux et reflux de la respiration ou de la marée (cf. le tai su dans le xing yiquan) et le mouvement du cœur…

Remarquons ici que nous avons le centre, la circonférence et le rayon qui correspondent respectivement au Ciel, à la Terre et à l’Etre humain et que l’Etre est bien le produit en même temps que le médiateur entre Terre et Ciel (cf. PdH n° 2, la rubrique de caractères).

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2/ Représentation temporelle sous forme circulaire

On a pris comme exemple le déroulement d’une année en marquant les 4 ‘stations’ principales du soleil (Voir plus loin en figures 4 et 5).

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3/ Un axe vertical joignant les solstices

Il s’agit de la séparation des deux grandes périodes de l’année. Du solstice d’hiver à celui d’été c’est la croissance du yang (donc à gauche), du solstice d’été à celui d’hiver c’est la croissance du yin (à droite). Il s’agit du développement du yang représenté par la ‘marche’ du soleil au cours des six premiers mois. Passé le point culminant, le yang décline laissant la place au yin et ainsi de suite.

Première représentation du yin/yang : les monogrammes. Un trait plein : yang, un trait brisé : yin (pour plus de précision sur les notations du yin/yang sous la forme de traits pleins et brisés, voir ‘quelques notions sur le Yi Jing’ et PdH n°2, l’hexagramme du mois).

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4/ Séparation du cercle en quatre.

Les 4 saisons, les périodes de la journée et les orients (rappelons l’utilisation du gnomon pour définir les orients et obtenir un cadran solaire). On peut ajouter les 4 phases de la lunaison (cf. la croissance et décroissance du yang et du yin dans le daoyinfa)

Notion traditionnelle de cycle divisé en quatre : le manvantara dans la tradition hindoue (4 yugas), les quatre âges de la tradition gréco-latine (âges d’or, d’argent, de bronze et de fer), les quatre périodes de la vie…

Dans cette représentation on peut aussi comprendre dans l’horizontale et la verticale les principes confucianistes de zhong (s’élever) et shu (s’ouvrir) (cf. PdH n°1) ainsi que les notions d’ampleur et d’exaltation dans l’Islam. (Il faut cependant supprimer le rayon vertical inférieur qui n’a pas sa place ici.)

Représentation par les bigrammes

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5/ Déroulement de la journée et de l’année (suite).

La représentation de la rose des vents pour l’espace et celle du calendrier pour le temps. A ce propos voir le symbolisme d’Abel et Caïn, l’un pasteur (nomade) se mouvant dans l’espace et l’autre agriculteur (sédentaire) se tenant dans le temps. Remarquons que du point du vue solaire, le début de l’année se situe (à peu près) le 4 février et que les équinoxes et les solstices correspondent aux milieux des saisons.

Représentation par les trigrammes.

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6/ Rapports des orients, des saisons et des 5 mouvements énergétiques

(Cf. Georges Charles, Traité d’énergie vitale p 79)

Ici, les 5 agents sont représentés sous la forme d’engendrement (ou de génération) avec la terre en période transitoire entre chaque agent.

Le bois correspond à l’Est, au printemps, à la matinée, à la jeunesse… Le feu au Sud, à l’été, au midi, à la pleine vitalité de l’âge adulte ; l’automne à l’Ouest, à la soirée, à l’automne, à la maturité ; l’hiver, au Nord, à la nuit, à la vieillesse. Les périodes liées à la terre sont intermédiaires entre les saisons ou les périodes de la journée ; par rapport aux orients la terre représente le centre.

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7/ Yin/yang : positionnement des différents aspects et rotation

Le dessin représente le tai ji (le faîte ultime), il est une des représentations possibles du Dao.

Sous cette forme ses différents sens symboliques sont multiples. C’est la complémentarité des corrélatifs tels que Ciel/Terre, jour/nuit, mâle/femelle… après la séparation de l’Unité primordiale.

Notons le mouvement du cercle qui, en fait, doit se voir comme une spirale lorsqu’il est : « le cercle représentatif d’une évolution, individuelle ou spécifique » (cf. Matgioi La Voie Métaphysique).

C’est aussi la roue cosmique que l’homme véritable (zhen ren, ou le yogi ou le soufi) a cessé de subir. Passé de la circonférence au centre, il n’est plus soumis aux vicissitudes du yin/yang.

Ce symbole est à mettre, en relation, entre autre, avec celui du swastika en tant que représentation du mouvement de rotation autour de l’axe (pôle) ainsi qu’avec l’androgyne en tant que réunion des principes masculin et féminin.

Mouvement de la Grande Ourse autour de l’étoile polaire :

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« Analysant la production du cosmos par le Principe sous sa double modalité alternante yin/yang, l’éclosion du sensible du non sensible, le germe de l’action génératrice paisible du ciel et de la terre, les anciens sages y distinguèrent les stades suivants : grande mutation, grande origine, grand commencement, grand flux. » Lie Zi 1/c

 

8/ Passage du sapèque au yin/yang (Traité d’énergie vitale p.108)

A propos de cette ‘transformation’, il convient de comprendre le premier dessin, le sapèque (ancienne pièce de monnaie chinoise), comme la représentation de la Terre (le carré central), du Ciel (le cercle l’englobant), de l’Etre humain (les inscriptions *non représentées+) et le Tao (l’espace au-delà du cercle). (Concernant le symbolisme de la valeur de la monnaie cf. René Guenon Le Règne de la Quantité chap.16 : La dégénérescence de la monnaie).

On retrouve sous une forme un peu différente la séparation du Ciel et de la Terre décrite dans de nombreuses ‘mythologies’ archaïques de diverses civilisations. Après la séparation un mouvement de giration s’effectue qui doit être vu comme le mouvement d’une spirale (yin/yang en mouvement et volume).

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