Qui  » étaient  » la Bête du Gévaudan ?

QUI ETAIENT ILS EN REALITE ?

bedegi_johana_ost

La Bête du Gévaudan vue par Johana Ost (2010) Un sacré bestio ! Armé, membré, lampassé comme il se doit dans les armoiries. Mais qui ne dévora aucune petite marquise, rien que des bougresses et quelques lardons du bas peuple.

Si on excepte Rose de la Tallière , une petite cousine de Verny de La Vedrines, âgée de 12 ans et de la commune de Lair, la seule victime de la Bête qui faisait partie de la petite noblesse.

Ce même Verny de la Vedrines, gentillhomme verrier résidant au Chamblard et exerçant à Nozeyrolles et qui avait déjà blessé une bête d’un coup de canardière, qui malgrè tout s’enfuit, et qui en fut très touché puisqu’il écrivit dans une lettre pathétique « Nous voilà dans bien des peines, Dieu le Veut, nous le méritons. Mauvais pays, mauvais gens, mauvais vivre, aussi, et il faut que l’on prie pour avoir quelque peu de blé »

Ce qui n’est pas sans rappeler le Sieur Antoine qui à propos d’Auvers écrivait  » Mauvais accueil, mauvaise paille et mauvais pain dans ce mauvais village ! »

Mais revenons à notre fameuse Bête de Chastel ! Si Jean Chastel n’a pas abattu une hyène, puisque le rapport Marin décrit la denture d’un canidé, il n’a pas non plus abattu un loup ! Suivant le description du très officiel rapport Marin il semble bien que ce soit, par contre, un animal hybride. Mais cette Bête de Chastel n’est pas non plus la seule a avoir été abattue puisque plusieurs chasseurs se sont vantés, à tout ou a raison, d’avoir mis fin à la carrière de cette fameuse bête. Parler d’une seule Bête du Gévaudan semble bien, désormais, une hypothèse monomaniaque comme, par ailleurs, attribuer tous ses méfaits à un seul éventuel sadique.

Admettons simplement que cette affaire est quelque peu plus complexe qu’il n’y paraît au premier abord. Un loup ou une bête, fut-elle hybride, ne déshabille pas ses victimes pour les rhabiller à l’envers comme cela s’est vu. Il ne découpe pas la tête d’une personne qui court et qui continue à courir sans tête. Il ne pose pas cette tête sur un muret en ayant le soin de disposer la chaîne d’un crucifix bien en évidence. On ne peut pas remettre en cause, ou écarter d’un simple revers de main, tous les rapports relatant de semblables faits qu’on ne peut en aucun cas attribuer à un seul animal fut-il parfaitement dressé. Mais un sadique, de son côté, ne dévore pas plusieurs organes et une grande quantité de chair en moins de temps qu’il faut pour le dire.

Donc il convient mieux de se pencher sur une association homme(s) animal ou plus probablement animaux et parmi ceux-ci rien n’exclut la présence d’une hyène dressée. Que Chastel n’ait pas abattu une hyène ou un loup ne change rien à l’affaire. Parmi ces animaux il est également possible d’imaginer la présence de molosses protégés par une carapace comme on le faisait à l’époque pour certains chiens de guerre.

Et le loup, toujours opportuniste, n’est pas non plus blanc comme neige puisqu’il a fort bien pu dévorer, à postériori, des victimes de la Bête (ou des bêtes !) ou d’un quelconque sadique. Sans compter quelques réglements de compte qu’on a mis sur le dos de la Bête alors qu’il s’agissait d’assassinats programmés.

A la lecture minutieuse des compte-rendus qui parfois étaient eux-mêmes minutieux on constate facilement plusieurs modes opératoires très différents et que les blessures et traitements infligés aux victimes n’avaient pas nécessairement la même cause ni les mêmes effets. Malheureusement la médecine légale n’existait pas et, de plus, les éventuelles atteintes sexuelles n’étaient jamais évoquées pour des raisons socio-religieuses. Il est donc difficile sinon impossible de détenir « La Vérité » ! « La Vérité » !

Et il en va de même du Saint Suaire de Turin qui, par un tour de passe-passe habile, est désormais exclu de toute analyse possible suite à un traitement organique à base d’essences qui interdit sa datation par le carbone 14 ou la thermoluminescence. La réalité dans ce type d’affaire importe plus qu’une certaine vérité ou qu’une vérité certaine. Soyons donc réalistes et considérons l’impossible.

Il existe simplement plusieurs vérités !

loup4

Bouh ! Fais moi peur, gros loup noir !

 

La « Bête du Gévaudan » et non le loup du Gévaudan

Plusieurs auteurs (sans parler d’Alphonse Boudard !) dont Gérard Ménatory, spécialiste incontesté des loups, font valoir à juste titre qu’il n’a jamais été question du  » Loup du Gévaudan  » puisque tous ceux qui connaissaient bien les loups, et ils étaient nombreux à l’époque, savaient parfaitement qu’il ne s’agissait nullement de cet animal. Le loup fut donc, plus tard, accusé injustement des méfaits imputés à la seule et unique  » bête « .

Encore faut-il rappeler qu’à l’époque et dans le Gévaudan il ne fut pas question de ête du évaudan mais de la Bestia del Gebaudan ou d’el Bestio del Gebaudan.

Il s’agit donc d’un « mâle bestiau » ou du « mâle beste » mais non de la mâle beste et moins encore de la bête !

C’est la langue d’Oil qui féminise le phénomène et qui se l’approprie.

Si on respecte la Langue d’Oc (ou la Langue d’Or !) on peut même fort bien se passer de l’article puisqu’il s’agit, alors, d’un nom propre ou de son équivalent. On dit alors simplement « Bestio » ! Gébaudan ou Gebaodan étant surfétatoire.

Ceci pour montrer les difficultés de transcription du nom même de cette Bête !

Et le fait qu’elle passe du propre en Oc au commun en Oil.

Mais Bestio n’est pas lopo ! Il est rappelé que le loup craint l’homme et n’attaque que très rarement celui-ci sauf lorsqu’il se trouve acculé. Il était, par exemple, courant, à l’époque des faits, que des bergères chasse

nt un loup qui s’était introduit dans la bergerie… à grands coups de sabots dans le derrière. Un simple bâton suffisait à les faire reculer puis prendre la fuite. L’hypothèse d’un autre animal a été plusieurs fois émise: hyène, lynx, ours, panthère et même singe ou bête fabuleuse résultant du croisement de plusieurs de ces animaux qui se seraient échappés d’un cirque de Mende. Les recherches d’un auteur attestent du fait que les animaux de cirque ou de ménagerie étaient fréquents et que, parfois, ils s’échappaient mais il n’existe nul document attestant que l’un de ces animaux se soit enfui d’un cirque qui aurait stationné à Mende.

Mais alors pourquoi pas la fameuse hyène très souvent citée dans les textes et gravures de l’époque ? Et si il s’était agi d’un loup, Monsieur de la Palice l’aurait appelé « Le Loup du Gévaudan  » et non pas la Bête du Gévaudan – en patois local « El bestio del Gébaudan » Il est encore à noter que « el bestio », terme utilisé à l’époque et à l’endroit de ses méfaits, ne devrait pas se traduire par la bête (au féminin !) mais par « le bestiau » au masculin ce qui est tout à fait différent pour la compréhension des faits ou du moins pour mieux comprendre comment les gens de l’époque appréhendaient l’animal. Il est vrai qu’il est aussi parfois question, mais en langue d’Oil et non en langue d’Oc, d’une « beste dévoirante » ou simplement « de la dévoirante ».

Mais en tout cas jamais d’un loup alors que ceux-ci étaient communs quena on connaît un loup, on reconnaît un loup ! IIIl demeurait donc la solution facile du  » fléau envoyé par Dieu pour châtier les péchés des hommes  » comme le suggérait l’évêque de Mende. Et qui, bien évidemment, accomplissait sa tâche salvatrice en égorgeant des enfants en bas âge et des petites filles ou des petits garçons qui, pour la plupart, avaient pourtant été baptisés et dont certains avaient fait leur communion.

Cela ne tient pas debout.

Pourquoi donc se limiter à UN suspect ou à UNE hypothèse monomaniaque ? Et si la vérité était un tout petit peu plus complexe.

Il demeure, par contre, une toute autre hypothèse liée à la perversion sadique d’individus exerçant leurs crimes dans une totale impunité et avec la bienveillance complice de certaines autorités qui fermaient les yeux sur la vérité mainte et mainte fois suggérée mais immédiatement écartée par principe. Rien, dans le contexte cité plus haut, n’interdit à considérer l’action combinée de plusieurs individus utilisant également de grands chiens dressés et même d’une hyène ou d’un hybride.

Or, le dressage était, semble-t-il, la grande spécialité des Chastel père et fils. Le père, lui-même, surnommé « Le Masque » (le sorcier) ou « De La Masque » (le fils de la Sorcière) passait même pour un « sacré meneux de loups », donc quelqu’un qui « avait passé un pacte ».

Ces chiens, cette hyène ou ces hybrides, dont l’un fut probablement blessé à mort par Verny de la Védrines, puis d’autres dans divers combats contre des armes à feu ou des armes blanches, comme la lance de Marie Jeanne Valet, étaient simplement grimés et protégés par une sorte de cuirasse probablement réalisée en peau de sanglier tannée et renforcée. Les fusils d’époque, chargés à la poudre noire, n’avaient, en effet, qu’un pouvoir de pénétration assez relatif Mais étendaient quand même habituellement de grands et gros loups !

le Sieur Antoine, lui-même, avouait surcharger ses fusils au risque de les faire éclater. Et, suivant la tradition, Chastel ne put tuer la « Bête » que grâce à une balle d’argent bénite qui provenait d’un chapelet et d’une croix légués par sa brave môman.

Brave femme que les villageois de La Besseyre Saint Mary nommaient quand même « La Masque », donc la sorcière ! Ces divers animaux furent donc probablement blessés à plusieurs reprises , ce qui explique les périodes de jeune et d’accalmie plusieurs fois constatés. Mais ils revenaient généralement se faire soigner dans l’un des repaires du Mont Mouchet ou de la faille de Desges. Le feldspath fluor était extrait de nombreuses mines, déjà en activité ou abandonnées à l’époque de la « Bête » car utilisé par les verriers nombreux dans les environs. Verny de la Védrine qui reçut tant Duhamel que les Denneval ou Monsieur Antoine au Chateau de Chamblard, situé entre Paulhac et Saugues, était lui-même un « gentilhomme verrier », donc un Maître verrier qui ne pouvait pas ne pas connaître ces mines et ces réseaux.

Une étrange légende locale prêtait par ailleurs aux Maîtres Verriers le pouvoir de mener les loups , donc d’avoir « passé un pacte » avec les puissances des ténèbres. En effet, suivant une tradition ésotérique ces Maîtres Verriers étaient pour la plupart des alchimistes qui transformaient des matières aussi grossières et insonores que le plomb et la silice en cristal, passant ainsi de l’obscurité à la lumière et du silence à la musique. Ce qui ajoute encore au mystère du Chamblard et du Besset où, suivant une tradition populaire, se déroulaient des « choses pas très catholiques ».

A cette époque le château du Chamblard ne se situait pas en pleine forêt et était en vue du Besset.

 

Divers animaux dressés, dont une hyène, expliquent divers modes opératoires

Cela explique également plusieurs types d’attaque, l’un du vraisemblablement à ces animaux dressés pour tuer (si il s’agit de lévriers afghans ceux-ci sont utilisés pour la chasse au guépard et au lion et sont réputés pour leur courage et leur férocité lorsqu’ils sont dressés à l’attaque), l’autre du à des individus déguisés et également cuirassés assouvissant leurs penchants meurtriers et leur goût de la mise en scène. Il n’était pas rare qu’ils déshabillent leurs victimes, leur tranchent la tête ou un sein et déposent ces trophées à quelque distance du corps.

bdg_cartpostal2

Une vision populaire et actuelle de la « Bête » : carte postale APA-POUX En parcourant la Lozère 48 PP 1213 Les Vieilles Légendes de chez nous Légende de la Bête du Gévaudan (coll. G.C.)

« Il y avait une fois…un pays où les gens vivaient durement, mais il étais si beau L’eau claire coulait au creux des montagnes. Le pain était bien noir, cependant il y avait du pain, et le bonheur était, bien sur, de ne pas avoir des voisins riches. La vertu et un bon bâton suffisait à éloigner les loups. Mais un jour…une bête énorme et afreuse, la plus féroce parmi les bêtes, bondit sur les femmes, les enfants et les dévora. Mais le bon roi Louis XV envoya ses chasseurs et sa meute pour tuer la grosse bête. Cependant la bête que l’on ne trouvait nulle part était partout et devenait de plus en plus grosse. En ce temps le chef des chasseurs eut une bonne idée bien courageuse.

Il s’habilla en demoiselle tendre et se coucha en serrant fort sa longue lance. C’est ainsi que l’on apporta au roi la peau de la terrible bête ». Comme on le voit sur cette image, la Bête s’intéresse aux filles et à leurs charmants atours.

Toute l’ambiguité de l’affaire est là.

La  » bête  » était, de plus, parfaitement renseignée sur ces fameuses battues, les évitait soigneusement, ce qui ne l’empêchait pas, par défi, d’attaquer à proximité immédiate de celles-ci. Les frères Chastel, qui étaient censés participer à la battue, se trouvaient donc très souvent les premiers sur les lieux de l’agression. Sauf lorsque celle-ci avait échouée et que la victime s’en était réchappée. Se dressant sur les pattes de derrière il lui arrivait aussi de regarder aux fenêtres puis de s’enfuir en riant. et même de se déguiser en portant un chapeau ou une cape. Les témoins de ce genre de manifestations passaient donc le plus souvent pour des dérangés ou des affabulateurs.

Comme de nos jours les rapports mentionnant ce genre de faits sont rejetés avec mépris par les historiens locaux. Le cri de cette « Bête » qui vous glaçait d’effroi ressemblait à la fois à un hennissement de cheval et à un rire diabolique.

Ce qui peut, fort bien, rappeler le cri de certaines hyènes. Plusieurs fois la « bête » humaine ou animale fut blessée. Ce fut le cas le 12 janvier 1765 où elle attaqua un groupe d’enfants armés de  » baïonnettes  » (couteaux aveyronnais emmanchés sur un bâton) et où elle fut touchée plusieurs fois à la tête par le jeune Portefaix qui la contraignit à lâcher le jeune Joseph Panefieu qu’elle avait saisi à la gorge. Portefaix fut récompensé et élevé au frais de la nation il finira officier et fut tué au siège de Cambrai dans une manipulation de munitions qui lui arracha la tête. Ce qui rappelle étrangement quelques méfaits de la Bête !

Il semble qu’il ait envoyé un rapport au Roi quelques temps auparavant sur les agissement de la bête et qu’il y aurait accusé un certain « Messire », homme très influent dans la région. Comme il ne conduisait pas de moto, ne prenait pas l’avion ni l’hélicoptère au dessus du Ténéré cette manipulation explosive tomba donc fort bien et le fameux rapport fut enterré pour de bon. La femme Jouve, pourtant de faible constitution, fit de même contraignant la bête à lâcher son enfant après l’avoir frappé durement à plusieurs reprises avec une pierre qui fut tachée de sang. Le 11 août 1765 à la métairie de Broussous à coté de Paulhac, Marie Jeanne Valet, servante du curé, est attaquée et porte à la  » bête  » un coup de pique au poitrail qui se marque encore de sang. La  » bête « , suivant un témoin, Thérèse, la sœur de Marie Jeanne, poussa un cri déchirant et se porta la patte au poitrail, se jeta à l’eau, s’y roula plusieurs fois puis disparut, toujours en se tenant la poitrine, donc debout mais cassée en deux, sans demander son reste.

Etrangement, un auteur très récent, alors que tous les compte rendus d’époque, sans exception, parlent bien de  » patte portée au poitrail  » ou de  » pied porté à la poitrine « , ce qui ressemble à un geste humain, remplace ce fait par  » lèche sa blessure puis disparaît  » ce qui est, admettons-le , tout autre. Il est vrai que cet auteur défend la thèse d’un autre animal que le loup tout en excluant l’homme. Ce petit  » tour de main « , pour ne pas parler de manipulation, arrange bien les choses !

 

Le renard du Gévaudan précurseur bu bon docteur Guillotin !

bdg-cartepostal1

Une autre « Bête du Gévaudan » popularisée en carte postales Editions Pastre 43230 CHAVAGNAC LAFAYETTE

Aquarelle Marie Noëlle MOURGUES série 1 collection 08/9 (collec. G.C.° Cela pourrait « presque » être ce fameux renard à guillotine !

Mieux, un site Internet local n’exclut pas l’hypothèse d’un renard !

L’auteur confond probablement musaraigne et être humain. Car si il est facile à un renard de détacher la tête de l’une ce serait plus difficile pour l’autre, d’autant plus que les têtes retrouvées séparées du corps étaient souvent retrouvées assez rapidement. il ne s’agissait donc pas de charogne animale mais de dépouille humaine.

Ce fameux renard était probablement un fervent du docteur Guillotin. On frémit de savoir qu’il rôde encore de ces bêtes rousses dans la campagne actuelle et même dans certains squares parisiens ! Ce même auteur, probablement de bonne foi, mais particulièrement naïf, précise par la suite

 » Que des loups enragés aient attaqué l’homme, je le crois volontiers, mais que ceux-ci déshabillent leurs victimes me paraît un peu exagéré « . C’est un fait, on imagine alors qu’il penche pour une autre hypothèse que son renard à guillotine. Un bon vieux sadique, par exemple !

 » Il est clair que le bouche à oreille de l’époque a du modifier les faits « . En gros, les multiples témoins (gendarmes, curés, notaires, notabilités locales, chasseurs, paysans, militaires… ) sont tous, sans exception, des andouilles, sinon des crétins des Alpes, et que les victimes soigneusement dépecées après avoir été déshabillées en rajoutent rien que pour brouiller les pistes. Que fait la police ? Ce qui n’empêche pas la bête de poursuivre inlassablement ses méfaits et de prendre encore quelques mauvais coups. Une autre fois ce fut un jeune vacher, très robuste malgré sa petite taille et qui avait déjà remporté plusieurs concours de lutte qui saisit la bête à bras le corps et la jeta au sol pour l’immobiliser… Mais elle parvint à échapper à la prise, probablement grâce au déguisement, et fila sans demander son reste.

Le vacher, un certain Bouqui, assura à plusieurs témoins qu’il ne s’agissait pas d’un animal mais d’un homme robuste et particulièrement souple. Et qui combattait avec une peau de bête dont on pouvait voir les boutons sous le ventre ! Mais Bouqui était probablement un vantard et un affabulateur !

 

Probablement une association hommes et animaux !

bdg_bete_glattier1

La Bête vue par Gérard Lattier dans « Une histoire de la Bête du Gévaudan racontée et peinte par Gérard Lattier Aux Editions de Candide (1996)

Si on ne doit lire qu’un seul ouvrage sur la Bête c’est nécessairement celui-ci ! Score de la Bête 107 à zéro !

L’hypothèse récente de R.F. Dubois (Vie et mort de la bête du Gévaudan 1988 réed. 1991)  » la bête pourrait-elle être une association homme/animal ou hommes/animal ou homme/animaux ou bien encore hommes/animaux  »

Il est donc plus que plausible que la dernière solution soit probablement la bonne. Plusieurs enquêtes, bien évidemment sans la moindre preuve ( !), tournent autour des Chastel qui étaient, par le biais de Madame d’Apcher (ou Apchier en Langue d’Oc), au service du Comte de Morangiès et du marquis d’Apcher, donc de très hauts personnages très influents dans la région. Mais, après plus de deux siècles, ceci est une hypothèse qui est toujours soigneusement évitée sinon inconcevable.

En un mot comme en cent, tout concorde pour qu’il s’agisse, en fait, d’une bande organisée disposant de nombreux repaires et bénéficiant d’une certaine impunité ainsi que de renseignements précis sur les recherches et battues en cours . Cela n’exclut nullement, au contraire, l’utilisation de loups, de chiens dressés, d’une hyène ou d’hybrides dressés à l’attaque et protégés par un artifice particulier les mettant le plus souvent à l’abri des tirs et des attaques à l’arme blanche fussent-elles maniées par un individu robuste. Donc d’une cuirasse comme on savait fort bien en en confectionner pour les chiens de guerre encore fort utilisés à cette époque.

Cela n’empêche nullement, par ailleurs, l’utilisation de déguisements, également protégés, portés par des humains ainsi que l’utilisation de griffes et de crocs artificiels L’armurerie chinoise classique démontre que de telles armes étaient utilisées très efficacement. Ceci en fonction des circonstances. Cela expliquerait les différentes sortes de blessures constatées sur les victimes qui, d’une part, pouvaient être partiellement dévorées ou, d’autre part  » simplement  » mutilées. La plupart de ces mutilations ne peuvent être imputées, suivant des témoignages précis, à l’œuvre d’un animal mais sont le fait d’armes particulièrement tranchantes et utilisées par des mains expertes.

Il demeure donc à chacun d’en tirer les conclusions qui s’imposent.

Le problème de la plupart des auteurs contemporains est qu’ils réagissent avec un souci de logique contemporaine. Donc fort linéaire. Ils réfutent généralement une hypothèse afin de présenter une autre hypothèse diamétralement opposée qui sera rapidement contestée par un autre auteur et ceci sans fin.

Prétendre qu’il ne peut s’agir d’un sadique en démontrant que la plupart des victimes ont été dévorées, ce qui est le fait, n’exclut pas qu’un sadique ait pu utiliser les services d’un animal dressé à tuer et qu’il laissait, ensuite, dévorer partiellement ses victimes. A l’opposé prétendre qu’il ne peut s’agir d’un animal en démontrant que certaines victimes étaient deshabillées et sexuellement mutilées, ce qui est également le fait, n’exclut pas qu’un animal dressé ait pu servir de rabatteur. Une hypothèse n’exclut pas l’autre comme elle n’exclut pas une troisième hypothèse où plusieurs types d’animaux seraient intervenus sous la direction de plusieurs humains. Cela expliquerait, notamment, les modes opératoires très différents constatés ainsi qu’une certaine confusion dans les fameuses descriptions de la bête. Une éventuelle protection de celle-ci a pu se modifier au cours du temps évoluant d’une simple peau tannée à une véritable cuirasse. Le fait que plusieurs témoins ne décrivent pas la même chose n’implique donc pas que cette chose soit une simple affabulation. Prétendre que tel individu ne pouvait être coupable car honorablement connu des plus hautes autorités locales et rémunéré pour avoir participé à des chasses n’est pas le meilleur gage d’innocence. Surtout si on croit estimer que ces hautes autorités étaient quelque peu mêlées à

ces crimes et commanditaient ce personnage tout en le protégeant. Prétendre qu’un autre individu ne pouvait être coupable car seulement âgé de dix neuf ans ne tient pas compte des réalités de l’époque. A dix neuf ans on avait déjà souvent beaucoup vécu.

Prétendre opérer des recherches historiques rigoureuses et oublier de citer le fait que la hyène est abondamment citée dans les rapports d’époque ainsi que sur les gravures contemporaines des exploits de cette « Bête » n’est pas nécessairement la meilleure solution lorsque l’on souhaite donner des leçons de probité morale. Alors qu’il suffit d’une simple loupe pour lire sous la plupart de ces estampes le mot hyène dont on ne parle pas au profit du loup. Prétendre que nulle victime qui a réchappé de la Bête n’a vu en celle ci autre chose qu’un animal est un effet de style car nombreuses sont ces victimes, hommes, femmes et enfants qui émirent des doutes sur l’animalité de la Bête. Certaines prétendirent même avoir observé des boutons sous son déguisement. On imagine mal un loup assis sur un muret et observant tranquillement ses victimes avant de les attaquer. Mais il est vrai qu’à l’époque, comme de nos jours d’ailleurs, les lunettes coûtaient fort cher et étaient très mal remboursées. Ces victimes qui détonnaient du lot sont donc suspectes de mauvaise vue, sinon de mauvaise foi. En allant plus loin que Dubois on peut évoquer plusieurs hypothèses nullement contradictoires. Tout d’abord celle d’une bête. Elle demeure indéniable. Probablement une hyène ou un hybride.

Ou les deux alternativement ou succesivement. Mais une bête n’agissant pas seule et profitant de l’intelligence humaine pour accomplir ses méfaits. Une bête qui a pu, plusieurs fois, être blessée et même tuée mais remplacée. Une bête unique et en même temps multiple, ce qui égare les diverses pistes, les diverses bêtes successives n’agissant pas et ne réagissant pas exactement de la même façon. Ces diverses bêtes pouvaient, au demeurant, être protégées de diverses manières. Du coté humain un acteur principal qui manoeuvrait cette bête, donc ces bêtes, d’une manière magistrale et qui bénéficiait non seulement d’une complicité mais de hautes protections.

Cet acteur principal agissant lui-même avec des acolytes pour le compte d’un haut personnage. Les uns comme les autres, acteur principal, acolytes, haut personnage pouvant à leur tour, en se déguisant, prendre l’apparence d’une bête « humaine ». Ce qui explique les différences de témoignages entre les bêtes « bestiales » et les bêtes « humaines ». Portefaix en donne une description très imagée pjisqu’il compare la Bête qu’il a combattu à celle du conte de la Belle et la Bête. Ce haut personnage pouvait donc, grâce à ses sbires et à leur bêtes, assouvir ses passions les plus bestiales. De par sa position il bénéficiait de hautes complicités et de hautes protections, ce qui lui permettait, en outre, de toujours trouver un point de chute particulièrement bien protégé à chacune de ses expéditions.

 

Le Mont Mouchet, lieu de repli stratégique et épicentre de l’affaire Donc un lieu de repli stratégique.

bdg_bete_glattier2

Le massacre des innoçents par les Denneval Père et fils… Mais cela pourraient aussi être Monsieur Antoine et son fils Antoine de Beauterne ! Ilustration issue de « Une histoire de la Bête du Gévaudan racontée et peinte par Gérard Lattier Aux Editions de Candide (1996) Score des Denneval : Match nul ! .

Il en existe plusieurs entre les abris du Mont Mouchet, le chateau du Besset, les galeries et mines de la Desges, le chateau du Chamblard, tous situés à proximité les uns des autres et d’où on pouvait communiquer visuellement par divers signaux et même par la voix. Donc prévenir les complices de l’imminence de l’arrivée d’une battue ou d’une troupe, si.. Et d’où on pouvait fort bien suivre et diriger la fameuse « Bête ».

Cela explique que, malgré d’immenses battues la Bête ne fut jamais réellement inquiétée. Ce personnage et ses sbires apparaissaient par contre toujours fort à propos lors de ces battues et étaient, comme on s’en doute, souvent les premiers sur les lieux. Les hautes protections se bornèrent, tout d’abord, à une totale indifférence puis à une complicité passive aboutissant peu à peu à une aide logistique. Le fameux « secours » expédié de la cour à Monsieur Antoine fait visiblement partie de cette aide logistique.

Malgré cette mise en scène bien orchestrée d’en haut, ce haut personnage passa visiblement outre la promesse qu’il avait faite de cesser ses activités criminelles. Ses protecteurs furent donc contraints de demander à l’acteur principal d’abattre la dernière bête. Ce qui fut fait à la Sogne d’Auvers par Jean Chastel, probablement l’exécuteur des basses oeuvres. de ce fameux « Messire ». Puis ils assignèrent à résidence forcée le commanditaire en question, donc Messire, et prièrent ses divers complices de se faire oublier. Ils le firent assez mal puisque quelques années plus tard une autre vague de crimes bestiaux eut lieu et fit encore une trentaine de victimes dans le Vivarais fort proche. On s’efforça d’effacer les traces compromettantes. La maison de Chastel père située à la Besseyre Saint Mary fut rasée, le château du Besset, quartier général de Monsieur Antoine de Beauterne, fut rasé, la chapelle de Notre Dame de Beaulieu où eut lieu le dernier pèlerinage avant que la Bête fut abattue par Chastel et ses balles bénites sur place fut rasée, la maison forestière d’Antoine Chastel située au sommet du Mont Mouchet fut rasée. Le château d’Apcher était déjà en ruine et, hormi le donjon, était considéré par le notaire du lieu comme une masure. Il ne fut donc pas nécessaire de le raser !

On évita quand même de raser la demeure de Messire Jean François Charles de Molette, Comte de Morangiès, ou Morangias suivant l’écriture usuelle à l’ époque de la Langue d’Oc, à Saint Alban sur Limagnole, qui est désormais, juste retour des choses, un hôpital psychiatrique hautement renommé. Et l’on put, enfin, dormir tranquille !

griffes1

Dormez tranquilles braves gens ! Juste une petite griffe pour mieux te saisir mon enfant ! Griffe de combat XVIIIe