Le thé des Indes
Par Georges Charles
Depuis des temps immémoriaux
le thé des jardins du plateau de Chillong, situé dans
l’état d’Assam, entre Pakistan oriental et Birmanie fut réputé
des cours des plus grands Rajahs jusque dans les plus humbles demeures
des lettrés brahmanes.
Cette région demeure toujours
celle où le fameux camélia, dont les feuilles produisent
le thé, pousse à l’état sauvage sur les flancs
du plateau.
Lorsqu’il est cultivé, il produit un thé très
parfumé et corsé et qui, de plus se conserve très
bien.
Ce fut le thé qui, le premier, conquis l’occident en
passant par la Hollande et sa célèbre Compagnie des
Indes Orientales et qui parvint, en 1610, en Angleterre où
son engouement fut si rapide qu’il fut lourdement taxé par
Cromwell.
En France il ne faudra pas attendre très longtemps pour que
les savants s’y intéressent puisqu’une thèse fut déposée,
en 1648, sur » Le thé d’Assam, ses vertus médicinales
et thérapeutiques » à l’Académie
de Médecine de Paris par un nommé Morisset.
Ce thé
d’Assam demeure donc le fer de lance de la production indienne et
est toujours apprécié à travers le monde comme
le thé matinal par excellence.
Mais, si certains ont pu le
comparer au Bordeaux, à cause de la subtilité du mélange
des cépages, le Champagne du thé indien demeure le
fameux Darjeeling qui est cultivé entre quatre cents et trois
milles mètres d’altitude sur les contreforts du Tibet.
A l’instar du Champagne ce Darjeeling se répartit en multiples
crus ou jardins, on en dénombre plus de deux cents, qui,
habilement opu subtilement mélangés vont donner naissance
aux » grandes marques » qui ont depuis près
de deux siècles conquis le monde.
Mais, dans ce cas précis,
ce sont principalement nos chers amis Anglais, ces maudits Godons, qui ont mis la main
sur le marché et qui influent toujours lourdement sur celui-ci et jusque sur les appelations concernant le commerce et l’utilisation du thé. .
La plupart des Jardins de Darjeeling portent donc des noms évocateurs
de la puissance feutrée de l’ancien empire sur lequel jamais
le soleil ne se couchait : Margaret’s Hope, Bloomfield, Castelton,
Mary Bong, Namring, Thomson Flower, Happy Valley…
La qualité
juste en dessous conserve encore son nom indien, souvenir des anciens
Rajas alliés à la Couronne : Makaibari, Phuguri,
Jungpana, Jopur…
Charles George Gordon (au centre) avec la Garde du Vice-roi des Indes
C’est, suivant les connaisseurs, le thé idéal pour
l’après-midi lorsqu’on ne l’assassine pas avec du citron
ou, pire encore, du lait ou de la crème fraîche. Certains
prétendront pourtant que cette coutume barbare provient pourtant
du Pendjab où le thé, très corsé, est
servi avec un laitage.
Il est vrai que les Tibétains apprécient ce breuvage
lorsqu’il est abondamment mélangé avec du beurre de
yak rance. Mais, dans ce cas, mélangé à de
l’orge grillé et broyé en farine, le Tsampa, devient
un véritable repas qui n’a que très peu de relations
avec ce qui est consommé à la cour d’Angleterre en
milieu d’après-midi.
Le thé de Ceylan, l’Ile au thé
(Tchai Lan dans son ancienne dénomination chinoise qui a donné Cey-Lan ), désormais Sri-Lanka, troisième producteur
mondial, est également fort réputé puisque
les meilleurs crus poussent jusqu’à 2500 mètres d’altitude.
Ce que l’on sait moins est que cette île produisant principalement
du café jusqu’en 1850 et que, suite à une épidémie,
on remplaça ces plantations devenues trop fragiles par du
thé de souche indienne.
Le thé de Ceylan, lorsqu’il
est de bonne qualité, offre un équilibre harmonieux
entre puissance et subtilité.
Certains le considèrent
donc comme le mi-chemin entre le thé d’Assam et le Darjeeling
ce qui permet de le consommer tant le matin que l’après-
midi, ce qui est une raison de son succès à l’étranger.
Que ce soit en Inde, au
Pakistan ou à Sri-Lanka le thé est consommé
de mille et une manières : nature, fortement aromatisé
à la cardamome, au clou de girofle, à la noix de muscade,
légèrement ou fortement sucré, infusé,
bouilli, macéré, avec adjonction de jus d’agrumes
ou de corps gras, rafraîchi, glacé, en sorbet ainsi
que dans de multiples recettes.
Il demeure également un produit
cosmétique utilisé à grande échelle
tant pour la peau que pour les cheveux ainsi que dans la médecine
Ayurvédique puisqu’il entre dans de nombreuses formules magistrales,
emplâtres, onguents et autres décoctions.
Depuis des temps immémoriaux le thé des jardins du
plateau de Chillong, situé dans l’état d’Assam, entre
Pakistan oriental et Birmanie fut réputé des cours
des plus grands Rajahs jusque dans les plus humbles demeures des
lettrés brahmanes.
Cette région demeure toujours celle
où le fameux camélia, dont les feuilles produisent
le thé, pousse à l’état sauvage sur les flancs
du plateau.