LE SOJA

Une tradition du passé pour un aliment du futur
Le soja, un végétal irremplaçable

par Georges Charles

Soja, soya, Soy (glycine max ou soja hispida)

 

Quelques faits et quelques chiffres

 

Le soja (Glycine max ou Soja hispida), ou soya, est une légumineuse herbacée annuelle de la famille des papilionacées originellement originaire des steppes du sud de la Mandchourie.
Il ressemble donc quelque peu à un vulgaire haricot dont les fleurs, blanches ou violettes, à l’allure caractéristique de papillons, naissent à l’aisselle des feuilles.
Sa fructification est constituée par une gousse contenant deux ou trois graines, ou pois, de formes et de tailles variées, diversement colorées en fonction de ses variétés.
Si certaines d’entre-elles, assez rares, résistent au froid et à l’altitude leur majorité nécessite, pour un développement complet de la plante, un climat tempéré de tendance chaude assez proche de celui nécessaire à la vigne mais doté d’une pluviosité généralement plus importante que pour cette dernière.
Le soja est cultivé depuis plus de deux millénaires en Extrême-Orient, en Chine en particulier, ainsi qu’en Inde.
Il fut, et il est encore, consommé traditionnellement dans ces pays sous de multiples formes et il y constitue l’une des bases essentielles de l’alimentation, de la diététique et de la gastronomie.
Bien qu’importé en Europe dès le XVIIeme siècle ce n’est qu’à la fin du XIXeme qu’il sera cultivé de façon intensive.

 

Le soja se prète bien à la culture intensive !

Cette culture gagnera les Etats-Unis qui est désormais le premier producteur mondial avec plus de 80 millions de tonnes en 1994.
Cette production occidentale et américaine sera principalement destinée à l’alimentation du bétail et à l’industrie jusqu’à ce que l’on se rende compte des multiples possibilités offertes par le soja dans l’alimentation humaine soit directement, en utilisant les recettes traditionnelles des pays d’origine, soit indirectement, par l’adjonction à la nourriture industrielle de protéines végétales à fort rendement, donc à bon marché.
Depuis le début du siècle, le tourteau de soja constituait une part importante de l’alimentation de complément du bétail.
Il s’agissait d’une source protéïnique de qualité permettant l’élevage intensif en stabulation partielle ou complète.
Entre temps, certains industriels ont trouvé plus efficace et moins cher dans l’utilisation du recyclage fonctionnel des farines de viandes avec les excellents résultats que l’on connaît désormais.
Le tourteau de soja, qui fut jadis critiqué comme une alimentation par trop industrielle du bétail, apparaît donc désormais comme un recours essentiel et un moindre mal sur le plan de la qualité et de la salubrité des viandes de consommation courante.
Ce que l’on sait moins est que le soja, en dehors de ses qualités nutritives exceptionnelles dont nous reparlerons, est utilisé à grande échelle dans l’industrie pour de multiples productions. Il entre ainsi dans la fabrication de caséines destinées aux caoutchoucs synthétiques, matières plastiques, enduits, peintures, laques, colles, textiles artificiels, savons, cosmétiques, imperméabilisants, émulsifiants.
Il est également utilisé à grande échelle dans l’industrie pharmaceutique particulièrement à cause de sa forte teneur en lécithine et en lipides.
Les produits dérivés du soja connaissent donc de multiples applications.
Pour ne donner qu’un seul exemple, concernant son importance actuelle et future, il suffit de savoir que l’huile de soja représente désormais le quart de la consommation mondiale de corps gras alimentaires et qu’elle représente déjà, avec plus de quatre millions trois cent mille tonnes, la première matière grasse alimentaire produite par la CEE.
D’ici quelques années le soja remplacera le blé comme source mondiale de protéines la plus importante, son rendement étant plus productif et meilleur marché.
De plus, de par sa flexibilité, le soja se prête tout autant à des productions et à des transformations très industrialisées qu’à des productions et à des transformations artisanales traditionnelles de grande qualité.
Il peut donc tant participer à l’alimentation de type « fast-food » de la grande distribution qu’à une alimentation de type « biologique » proposée par de petits producteurs créatifs ou curieux de ses utilisations gastronomiques réputées en Extrême-Orient.
Entre la « World » cuisine de haute technologie destinée au micro-ondes et les recettes très classiques des maîtres queues de la Chine ou du Japon antique, le soja apprend désormais à naviguer ! La santé dans le bol, l’assiette ou l’éprouvette Depuis des millénaires en Chine, au Japon ou même en Inde on savait que le soja, particulièrement dans ses multiples transformations, est un aliment de santé. Malheureusement les savants, un peu trop poètes ou philosophes, de ces pays lointains n’avaient pas trouvé les mots pour nous convaincre.
La fève de soja, considérée comme la plus noble des « cinq graines » était qualifiée, en Chine, de Wang Sou ou « Roi des légumineuses ».

 

Le soja est un haricot !

 

Les mêmes secs avec les pois…de soja

On savait également par le biais d’ouvrages savants, généralement destinés aux sinologues et à quelques acupuncteurs que le soja, sous sa forme de caillé (DOUFOU ou TOFU), considéré comme de saveur douce, neutre et légèrement froide, était donc utilisé pour tonifier le QI (Souffle ou énergie vitale), le JING (Essence ou principe essentiel) pour harmoniser et équilibrer le foyer médian, pour favoriser la circulation des liquides (JIN) et du sang (XUE), pour neutraliser l’effet des toxiques, pour combattre les ballonnements, les flatulences, pour aider à l’évacuation des liquides endogènes, pour faciliter le travail du gros intestin et pour tonifier les méridiens de la rate et de l’estomac.
Il est donc prescrit dans les cas de rhumes accompagnés de diarrhées, de convulsions des nouveaux nés, dans l’alimentation des jeunes mamans.
En usage externe il est préconisé dans le traitement des furoncles, des anthrax, de l’herpès de la lèvre et des dartres enfantines.
Certains cliniciens avaient même remarqué, depuis des siècles, que le soja permettait de restreindre l’évolution de certaines tumeurs et que sa consommation journalière permettait une excellente prévention contre l’apparition même de ces tumeurs.
Ils avaient même remarqué que le lait de soja pouvait tout à fait remplacer le lait de vache dans l’alimentation quotidienne du nourrisson et que celui-ci ne s’en portait pas plus mal, au contraire.
Forts de ces indications traditionnelles plusieurs instituts médicaux chinois et japonais, dont le Centre National de Cancérologie du Japon, constatèrent statistiquement que l’utilisation du soja et de ses produits dérivés constituaient tant une prévention qu’un traitement dans plusieurs cas spécifiques de cancers du sein, des ovaires, des testicules, de la peau et de la lymphe.
L’utilisation habituelle du Miso (sauce de soja fermentée) suivant ce dernier institut, permettait même de réduire de trente pour cent le risque de cancer à l’estomac.
Suivant l’Institut de Médecine Traditionnelle de Shanghai, l’absorption de lait de soja permettait d’abaisser le risque de cancer de façon tout à fait significative, particulièrement chez la femme ménopausée.
Le simple fait qu’il s’agisse d’indications émanant d’instituts dits traditionnels, donc pratiquant une autre forme de médecine que celle habituellement admise et autorisée en Occident, et utilisant par conséquence, une autre terminologie que celle de nos scientifiques ne motiva que fort peu ces derniers.
Jusqu’au jour où ils firent une découverte étonnante.
Le soja et particulièrement le lait de soja, qui est à l’origine de nombreux produits traditionnels utilisés dans l’alimentation chinoise et japonaise, contient, en assez grande quantité, ce qu’il est désormais convenu de nommer des « phyto-oestrogènes » ou « phyto-hormones ».
A leur décharge, ils savaient déjà que la lécithine, constituant important du soja, possédait de fort intéressantes particularités.
Cette lécithine favorise, en effet le métabolisme des graisses en régulant le taux de cholestérol sanguin et en permettant les échanges intra et extra cellulaires.
Elle permet, en outre, de faciliter la sécrétion gastrique et de participer à l’émulsion des graisses, évitant que celles-ci ne se déposent sur les parois artérielles, provoquant ainsi l’artériosclérose.
Enfin, la lécithine est essentielle pour limiter les facteurs de fatigue et de stress et reconstituer la cellule cérébrale.
On imaginait donc simplement que tous ces facteurs pouvaient avoir une incidence globale quelconque, bien que non définie, dans la prévention et le traitement d’appoint de certains cancers, ce qui aurait déjà quelque peu confirmé les thèses de la médecine traditionnelle chinoise.
L’étude de l’endocrinologie permit une autre constatation étonnante : certaines mollécules présentes dans les végétaux, et en important concentration dans le soja ainsi que dans l’huile d’olive, ressemblent à s’y méprendre à des hormones sexuelles humaines.
De ce fait, elles se fixent sur les récepteurs cellulaires, déclenchant un réflexe permettant de produire une réaction réduisant l’action nocive de certains oestrogènes cocancérogènes.
Ce processus d’inhibition permettrait donc une protection non négligeable vis à vis des cancers hormono-dépendants touchant particulièrement le sein, l’utérus, la prostate, les testicules ainsi que d’autres cancers dont on ne connaît pas encore les implications oestrogéniques, comme, par exemple le lymphome ou lymphosarcome.
Ces « phyto-oestrogènes » ou « phyto-hormones », contenus notamment dans le soja, permettraient donc tant une prévention qu’un traitement prometteur en inhibant la protéase ce qui pourrait permettre dans certains cas la régression tumorale.
Au vu de ces études fort récentes (1993), menées notamment par le « Food resarch Institute » de l’Université du Wisconsin-Madison, le soja et certains de ces dérivés, pourraient être classés parmi les anticancérogènes les plus prometteurs de la fin de ce siècle.
Cela explique que le soja intéresse de plus en plus la recherche médicale dans le domaine de la cancérologie et de la prévention.
Des revues scientifiques comme « The Lancet » ou « Nature » n’hésitent désormais plus à considérer ces « phyto oestrogènes » comme une découverte de premier plan.

 

Les pois de soja, la farine de soja, la pâte de soja, la pâte de soja fermentée
le sel issu du soja (monoglutamate de sodium)

De l’alimentation traditionnelle à l’industrie…ou le contraire La graine, ou fève, de soja (semen sojae), récoltée à maturité contient des substances nutritives exceptionnelles.
Elle est tout d’abord très riche en protéines puisque sa teneur, atteignant 40%, la rend, à ce sujet, deux fois plus riche que la viande ou le poisson, trois fois plus riche que les oeufs et quatre fois plus riche que le blé ou le riz complet.
Le soja est donc, de loin, l’aliment possèdent la plus haute teneur protéique.
Il contient également tous les acides aminés nécessaires à notre organisme.
Sa richesse en lysine, contrairement à la majorité des céréales, facilite l’assimilation de ces dernières et permet leur association au cours d’un même repas.
Il est donc tout à fait possible de consommer au cours d’un même repas du soja et des céréales.
Cela explique que depuis des siècles, sinon de millénaires, l’alimentation traditionnelle Extrême-Orient a su pratiquer cette association essentielle entre le soja, et ses dérivés, et le riz ou le blé.
L’utilisation des pâtes de soja, fermentées ou non, ou de la sauce de soja en simple accompagnement ou assaisonnement des céréales ou de leurs dérivés (pâtes), du riz blanc ou complet permet, en quelque sorte, de remplacer la viande ou de restreindre notablement sa consommation.
Le soja a donc toujours été très utilisé par ceux qui, par éthique ou par religion, pratiquaient le végétarisme.
Ce n’est donc pas sans raison que le soja, et particulièrement le caillé de soja, le DOUFOU ou TOFU, est nommé « Viande du Bouddha » (FOUROU) dans tout l’Extrême-Orient.

 

Pois de soja et Tofou ou Doufou : le caillé de soja

La graine de soja renferme également un taux de lipides approchant les 20%.
Ces lipides sont riches en acides gras polyinsaturés (acide linoléique) et monoinsaturés (acide oléique) et ne contiennent donc pas de cholestérol.
Le soja est donc considéré comme un anticholestérolémique et peut être conseillé à ceux qui souffrent de troubles cardio-vasculaires liés à l’artériosclérose.
La présence de lécithine, dont nous avons déjà parlé, dans les lipides du soja en fait un aliment reconstituant de la cellule nerveuse et de la cellule cérébrale.
Contrairement aux autres légumineuses et céréales le soja ne contient pas d’amidon et ses glucides sont composés de sucres simples ce qui permet son utilisation par les diabétiques.
Enfin, le soja est riche en sels minéraux…calcium, chlore, fer, cuivre, iode, manganèse, phosphore, sodium, soufre, zinc…et vitamines A, B1, B2, B3 (PP), B5, B6, D, E. Il est donc, pour ces diverses raisons, considérés comme nutritif, énergétique, reminéralisant, rééquilibrant cellulaire et peut être conseillé aux femmes enceintes, aux jeunes mamans, aux jeunes enfants, aux adolescents en croissance, aux convalescents ainsi qu’à tous ceux qui souffrent de déminéralisation, de fatigue physique et intellectuelle, de surmenage.
Si on ajoute à cela ses propriétés anticholestérolémiques et antisclérotiques permettant de restreindre le risque d’infarctus ainsi que ses propriétés prometteuses dans le domaine de la prévention et du traitement de certains cancers, on se trouve presque en face d’une panacée exceptionnelle…
Malheureusement, il fallait bien que le soja ait également quelques petits défauts.
Le premier d’entre-eux est la présence de facteurs dits anti-nutritionnels.
Ces derniers sont d’autant plus présents lorsque la fève n’a subi aucun traitement ou aucune transformation.
La consommation de cette fève crue, ou d’une farine imparfaitement cuite, est donc fortement déconseillée.
Ces substances anti-nutritionnelles présentes dans le soja ont pour conséquence d’inhiber la trypsine (protéase pancrétique) et de causer une baisse d’assimilation des protéines, de rendre impossible l’utilisation de l’iode par la thyroïde, d’inhiber l’assimilation de certains minéraux comme le calcium et de provoquer, chez certains sujets, des chutes de tension ou des anémies hémolytiques.
Cela est particulièrement le cas chez des individus ne possédant pas une enzyme particulière, fait qui a été remarqué dans les régions méditerranéennes.
Le second défaut, beaucoup moins grave est que le soja, à l’instar du fameux topinambour et de certains haricots, est riche en oligo-saccharides, or, ces sucres complexes peuvent provoquer des fermentations stomacales et intestinales assez désagréables et se traduisant par des flatulences puis par l’émission sonore de gaz. Enfin, la présence de lipoxygénases, sans aucun danger pour l’organisme, communiquent au soja un arôme et une saveur très particuliers de légumineuse qui, souvent, déplaît. Certains accusent donc les fèves et la farine de soja, sinon le lait, de fleurer un peu trop le haricot mal cuit ou même le pipi de rat ou de souris.
Tous ces inconvénients peuvent, par contre, être totalement supprimés par des traitements divers que maîtrisaient fort bien, et depuis des siècles, les utilisateurs traditionnels du soja.
Il convient donc nécessairement que la fève soit impérativement séchée avant consommation et qu’elle subisse un trempage prolongé ou un traitement thermique approprié.
Dans le cas de l’utilisation de germes, ou pousses de soja, mieux vaut ne consommer que le germe seul en évitant la graine, et plus encore sa pellicule, bien que celle-ci ait subi un trempage qui limite notablement d’éventuels effets secondaires.
Ces divers facteurs anti-nutritionnels doivent inciter le consommateur à préférer les produits issus de fabrication traditionnelle bénéficiant d’un savoir faire ancestral.et à ne point trop innover sans tenir compte de ces données.
Les entreprises semi-artisanales ou industrielles spécialisées dans le traitement du soja destiné aux produits alimentaires, sachant ces inconvénients, utilisent le plus souvent des procédés thermiques qui restreignent les propriétés biologiques du soja.
Cela a souvent pour conséquence de restreindre la valeur protéinique ainsi que celle de certains acides aminés comme la cystine ou l’isoleucine.
Malgré cet inconvénient, les « soy-food » occidentaux (lait de soja, « yaourts » au soja, sauces au soja, farces végétales…) issus de l’industrie alimentaire demeurent de bonne qualité nutritive et sont un substitut non négligeable à une alimentation carnée excessive ou pour tous ceux qui ne tolèrent pas les laitages.
Ces produits nouveaux sont désormais disponibles dans la grande distribution.
Ces « soy-food » permettent également au consommateur, et particulièrement aux jeunes, de s’habituer au soja et, ainsi, de découvrir peu à peu les autres produits plus traditionnels comme le Tofou, le miso, le shoyou…ect.

 

Le très classique « Misoshiru » ou potage japonais au miso et tofou

 

 

 

Les produits traditionnels issus du soja Le Tofou (japonais) ou Doufou (chinois) : le lait caillé de soja

Tofou frais

(tofu, doufou, tao-fu..)

Le Tofou (japonais) ou Doufu (chinois).
Il s’agit de lait de soja caillé aussi nommé pâté de soja ou fromage de soja.
Suivant la tradition chinoise, il fut découvert en 164 av.J.C. par un Taoïste du nom de Liu An.
Celui-ci recherchait déjà les propriétés du lait de soja dans le domaine de la longévité et constata, suite à une erreur de manipulation, que le lait de soja caillait lorsqu’il était mis en contact avec du chlorure de magnésium issu de l’eau de mer.
Il nomma donc cette nouvelle substance Dou Fou, littéralement « mis en forme dans un vase ».
L’étymologie chinoise est donc similaire à l’ancien terme français « formage » (mis en forme), issu de l’italien « formaggio » qui, par altération a donné fromage.
L’appellation « fromage de soja » concernant le caillé est donc tout à fait justifiée.
Il serait d’ailleurs judicieux de nommer celui-ci « fromage frais de soja » car il existe également la possibilité de faire fermenter celui-ci par macération en présence d’un champignon issu du thé (Koji ou Aspergilus Kojiki).
Dans ce cas il est question de Tofu Ru ou Doufu Ru « fromage de soja fermenté », souvent agrémenté d’épices et de piment, qui n’a rien à envier au niveau de l’odeur, à un maroilles bien fait.

 

Tofou frit

La particularité du caillé frais, lorsqu’il est de bonne qualité, est de pouvoir se prêter à de multiples formes de cuissons et d’assaisonnements.
Il peut, en effet, être consomme cru, en l’état, mais supporte également très bien les cuissons à l’eau, en sauce, à la vapeur, au bain marie, en sauté, en friture et même grillé

 

tofou cuit à la vapeur

Etrangement, bien que semblant assez fragile, il peut bouillir des heures sans subir la moindre altération et demeure entier alors que viandes, poissons, légumes auront depuis longtemps fondu dans la sauce.
L’ « honorable Doufu » fut longtemps, pour ces diverses raisons, considéré par les initiés Taoïstes comme un aliment de longue vie.
Les Bouddhistes, à la fin du VIeme siècle adoptèrent son usage dans leurs repas végétariens et il devint alors tour à tour « le Légume du Bouddha » ou « la Viande du Bouddha ». Au VIIIeme siècle il fut introduit au Japon avec le Bouddhisme Chan qui y devint le Zen…le Doufu changea également de nom et devint le fameux « Tofu ». L’Empereur Kammu de la dynastie des Heian le goûta, fut enchanté, et lui délivra officiellement le titre d’ « Honorable Tofou » ( O Tofu). Afin de veiller à sa qualité il créa, par Edit Impérial, la corporation des « Maîtres Fromagers du Tofou » qui existe toujours. Le Tofou, au Japon, et le Doufou, en Chine demeure un aliment très apprécié dont on distingue de multiples crus dont certains, à l’instar de nos grands vins ou de nos fromages, bénéficient d’une image exceptionnelle et sont fort recherchés des gastronomes. Faisant partie de l’alimentation de tous les jours, il entre dans de nombreuses expressions populaires…d’un malchanceux on dit qu’il est capable de se blesser en heurtant le coin d’un cube de tofu, d’un crétin qu’il passe son temps à essayer de recoller deux morceaux de Tofu…Jadis, les Samurai matamores étaient désignés comme « sabreurs de Tofu », ce qui était une injure ultime !

Le Tofu peut également être moulé sous diverses formes ou aromatisé aux épices, aux champignons…et peut aussi être fumé. Passé au mixeur il peut servir à confectionner des sauces émulsionnées proches de la mayonnaise. D’une saveur très discrète il se prête à de multiples assaisonnements et accompagne aussi bien la viande ou le poisson que les légumes ou les céréales. Le Tofu demeure donc un aliment complet et exceptionnel tant sur le plan nutritif que dans ses multiples applications en cuisine moderne ou traditionnelle. La farine de soja : Go (Japonais) Dou Fen ou Sheng Fen (Chinois). Il s’agit simplement des graines (semen sojae), ou fèves, séchées ou légèrement torréfiées moulues très finement.

 

La farine de soja : elle est la plus consommée sur le planète !

Il existe deux catégories principales de farine de soja. La première est la farine non déshuilée qui s’obtient par broyage direct des graines légèrement grillées. Cette farine traditionnelle renferme tous les acides gras insaturés et poly-insaturés présents dans la plante. Elle est utilisée en Extrême-Orient pour la confection de sauces épaisses et de pâtes. C’est la base essentielle du lait de soja. Elle peut être conseillée dans la lutte contre les maladies cardio-vasculaires, en cas d’anémie ou de rachitisme. Bien que le grillage ou la torréfaction permette d’éliminer presque totalement les facteurs anti-nutritionnels, il convient de l’utiliser après trempage prolongé (lait de soja) ou après une cuisson complète. Sa faible teneur en glucides permet de l’utiliser également dans les régimes concernant les diabétiques. La seconde catégorie est la farine déshuilée qui est réalisée non à partir de la graine mais des tourteaux. Elle est donc plus riche en protéines mais moins en lipides. C’est la farine qui est principalement utilisée dans l’industrie alimentaire. Son exceptionnelle richesse en protéines en fait un aliment très énergétique dont il convient de ne pas abuser. Elle peut s’avérer de digestion difficile. Dans les pays anglo-saxons elle est utilisée à grande échelle pour la confection de la biscuiterie et de la boulangerie et entre avec d’autres farines (blé, maïs) dans la fabrication du pain de mie…notamment dans celui qui sert aux hamburgers…qui deviennent, on comprend pourquoi, de véritable pièges à calories, donc à kilos superflus. Ne renfermant que peu d’acides gras insaturés, elle ne possède pas la particularité anticholestérolémique de la graine ou de la farine non déshuilée ni les fameux phyto-oestrogènes aux propriétés antitumorales. S’il s’agit d’une source protéinique à bon marché, ce qui explique son utilisation intensive dans l’industrie, on ne peut donc pas considérer qu’il s’agisse d’un aliment de santé. L’huile de soja :

 

L’huile de soja : maintenant très consommée en Occident

Une fois encore il convient de distinguer deux produits distincts…l’huile de soja non raffinée, qui est un produit naturel utilisé depuis des millénaires en Extrême-Orient et l’huile de soja raffinée qui est un produit industriel. L’huile de soja non raffinée est obtenue par pression à froid des graines plus ou moins grillées ou torréfiées. D’une couleur jaune d’or tirant sur le vert ou le brun suivant le degré de torréfaction, c’est une huile possédant une saveur et un goût assez particuliers et facilement identifiable, propre au soja. Elle est utilisée traditionnellement en assaisonnement car sa forte teneur en acide linolénique ne permet pas de dépasser une température de 150°. L’huile de soja non raffinée possède les particularités de la graine…pouvoir anticholestérolémique, reconstituant des cellules nerveuses et cérébrales, phyto-oestrogènes permettant une prévention et un traitement de certaines tumeurs…Mais, son manque de tenue à la cuisson et sa saveur particulière ont incité les industriels à produire une huile raffinée plus souple d’emploi. Celle-ci est traitée par divers procédés mécaniques, thermiques et chimiques (soude caustique, acide sulfurique ou phosphorique, solvants, chlorure de zinc) qui permettent à l’huile d’être utilisée en cuisine sans trop d’inconvénients. Elle est généralement vendue sous la simple appellation « huile végétale » ou « huile de table » sans aucune autre mention. Comme pour la farine déshuilée ce qui a été gagné sur le plan de l’efficacité industrielle a été perdu sur le plan de la santé puisque l’huile a été démucilaginée, neutralisée, décolorée, désaromatisée…exit la lécithine, la majorité des phyto-oestrogénes, la plupart des vitamines. Elle demeure, malgré tout, un bon produit anticholestérol. L’huile de soja représente déjà presque le tiers de la consommation mondiale des corps gras alimentaires et est le premier corps gras alimentaire produit par la CEE. Elle entre en grande part dans la confection des margarines végétales, des sauces émulsionnées industrielles (mayonnaise, béarnaise, vinaigrettes toutes prêtes…). Elle est également utilisée à grande échelle dans la pâtisserie industrielle, la chocolaterie, la confiserie et les plats cuisinés…ainsi que dans la cosmétologie et l’industrie. Le fameux « lino », revêtement de sol qui a eu son heure de gloire, était et est encore fabriqué à partir des acides linoléiques et linoléniques issus de l’huile de soja ! En un mot comme en cent l’huile de soja non raffinée est un produit diététique de santé à utiliser comme tel, donc avec une relative parcimonie, tandis que l’huile de soja raffinée est un produit industriel avec ses avantages et ses inconvénients Le lait de soja :

 

Le lait de soja : un excellent substitut aux produits laitiers !
Des centaines de millions de bébés chinois ont été élevés à ce lait et ne s’en plaignent pas, au contraire.

C’est la base essentielle du Tofou mais c’est également le lait qui a nourri des centaines de millions de bébés en Extrême-Orient où la vache n’est pas monnaie courante. Ils ne semblent pas plus mal s’en porter. Ce lait possède la particularité d’être bien accepté, toléré, digéré par les adultes ce qui n’est pas toujours le cas des laitages habituels à nos contrées. C’est donc un excellent produit de remplacement pour tous ceux qui ne tolèrent pas les laitages et qui souffrent de décalcification. De nombreux médecins chinois le prescrivent donc aux sportifs souffrant de crampes dues à une mauvaise assimilation de l’acide lactique par la fibre musculaire. Il permet également un traitement de fond de certains eczémas dus à la non tolérance des produits laitiers. Si, en France, il s’agit encore quelque peu d’une mode, c’est donc un produit essentiel en Extrême-Orient. Comme pour les précédents dérivés du soja il existe, une fois encore, deux catégories principales de lait de soja…Celui qui est fabriqué artisanalement à partir des fèves et celui qui est produit industriellement à partir de la farine ou de fèves dépelliculées. Le premier possède l’inconvénient, d’une saveur prononcée de haricot. Le second, souvent aromatisé, est mieux accepté par les palais occidentaux. Le lait de soja entre désormais dans la confection industrielle de nombreux « soy-food »…boissons, « yaourts », crèmes, entremets, sauces. Il demeure un bon produit de remplacement des aliments d’origine animales…et le moyen de découvrir les produits plus traditionnels issus du soja. La sauce de soja :

 

Une grande variété de sauces de soja utilisées dans la cuisine asiatique

 

Sauce de soja épaisse préparée avec huile se sésame grillé

Il en existe de nombreuses généralement produites au Japon ou en Chine. La plus connue et la plus commune est la sauce de soja fermentée : Shoyu (japonais), Jiang You ou Shen Shou (chinois). Cette sauce est obtenue par simple fermentation de graines de soja dans une saumure de chlorure de sodium (sel de mer). Elle est utilisée en assaisonnement ou pour relever des sauces et des potages. Elle est riche en peptides et en sucres simples et constitue un excellent complément aux céréales. Il existe également des sauces fermentées plus épaisses comme le Tamari (japonais) ou le Lao Shou ou Shen Se Jiang You (chinois). Il s’agit d’une sauce maturée et vieillie plusieurs années. Ces sauces indispensables aux cuisines du Japon et de Chine sont riches en protides, glucides, lipides, sels minéraux et constituent un excellent complément nutritionnel. Des sauces d’excellente qualité sont vendues dans les maisons de diététique et, avec un peu d’habitude, deviennent d’un usage courant sinon indispensable fut-ce pour déglacer la sauce d’un vulgaire bifteck ou d’un poulet rôti ! Les pâtes fermentées de soja :

 

Pâte de soja brune avec pois fermentés

 

Pâte de soja jaune

Il s’agit simplement de pâtes de fèves fermentées de soja parfois agrémentées d’autres céréales. La plus connue est le Miso (japonais) ou le Dou Bang Jiang (chinois). Ce sont des produits très riches en protides, glucides, lipides, sels minéraux et vitamines qui sont utilisés traditionnellement dans des sauces ou dans des soupes très reconstituantes. Le Tempeh (japonais) est un biscuit de fèves de soja fermenté ensemencé de Rhizopus oligospous. Ce produit traditionnel, utilisé également en macrobiotique, contient les 10 acides aminés essentiels et est donc recommandé comme complément nutritionnel e première valeur. Germes de soja :

 

Les germes de soja crus : il faut veiller à enlever les « graines » ou pois !

Ce sont simplement des fèves de soja germées issues du haricot mungo (soja vert).
Ces germes contiennent des acides aminés essentiels : alanine, cystine, lysine, méthionine, phénylalanine, théomine, de nombreux oligo-éléments, des vitamines A, B, C, E et un taux important de chlorophylle.
Produites dans de bonnes conditions il s’agit donc d’un excellent légume qui se consomme cru ou cuit (bouilli ou sauté).

Germes de soja cuits

Mieux vaut éviter de consommer les graines et leur enveloppe ou pellicule qui produisent, à cause des oligo-saccharides, des fermentations et des gaz. Il suffit simplement de frotter légèrement les pousses de soja entre les mains sous l’eau courante pour se débarrasser de ces fèves. Les germes de soja sont facilement produites chez soi tout au long de l’année ce qui permet de disposer à tout moment d’un légume vert fort savoureux. Ces germes sont, évidemment, produits et consommés à grande échelle par la communauté asiatique…et sont désormais vendus dans certaines grandes surfaces.

 

Autres (produits chinois, japonais et macrobiotiques)

 

 

Yuba : peau de soja qui sert de papillotte
Cela ressemble tout à fait à la « peau du lait » qui serait séchée !

Il existe encore bien d’autres sous produits traditionnels issus du soja que l’on peut découvrir dans certaines épiceries asiatiques ou dans les maisons de régime possédant un rayon macrobiotique comme la peau de lait de soja (Cuba) qui se consomme fraîche, séchée ou cuite à la vapeur, la pulpe de fèves de soja (Okara), la sauce Hoisin ou Hai Xian Jiang, les haricots noirs de soja fermentés (Tu Su ou Hamanatto), les cubes de soja fermentés dans une sauce épicée (Chee Fan), la sauce sucrée de soja (Ketjap), la pulpe de soja séchée (Meitauza), le pâté de soja rouge (Sufu)…ect…sans oublier plusieurs sortes de pâtes ou de nouilles fabriquées à partir du soja : vermicelle chinois, nouilles de soja fraîches, pâte à raviolis… Pour en savoir plus : Secrets et mystères du soja par C. et L. Clergeaud (Editions La Vie Claire -1984-) Les nouveaux aliments -soja et algues- par M.P. et P. Dieudonné (Editions SAEP -1991-) La magie du Tofu par Yvon Tremblay (Editions Stanke – 1992-) Merveille du tofu dans la cuisine traditionnelle chinoise par Desheng Zhang (Editions Jouvence -1990-)