Le Feng Shui, les bases fondamentales (3/7)
par Georges Charles
UN – L’Unité du Tao : « Le Tao engendre l’Unité » (Daodejing)
Mieux considérer le global pour mieux harmoniser le local : Nous avons vu que le Feng Shui était, en Chine, depuis des millénaires un fait de société. Or, nous avons également vu que la société chinoise était, depuis toujours, basée sur le concept d’ordre et de totalité. Cet ordre, jadis nommé « Mandat Céleste » (Ge Ming), et cette totalité, donc cette unité fondamentale (Tai Yi ou « Grande Unité« ), ne sauraient se manifester en dehors du principe ultime qu’est le Tao * ou la Voie.
Tao – caractère 4767 du dictionnaire Ricci – qui peut également s’écrire Dao en pinyin ou Do dans les transcriptions issues du japonais signifie originellement voie, route, chemin, passage et, par extension, ce qui mène d’un point à un autre donc le cheminement. Le caractère ancien comportait une tête chevelue vue de face qui représentait le chef de clan accolée à la notion de marche, de conduite laissant une empreinte profonde. Il s’agissait donc de « la conduite tracée par le chef de clan« , de la « voie à suivre« . Le caractère ancien indique donc tant la notion matérielle de voie tracée par celui qui marche que la notion de mouvement impliqué par une autorité suprême, symboliquement le chef de clan, le roi ou l’empereur. Le Tao inclut à la fois la notion d’origine, de mouvement et d’aboutissement suprême. Il s’agit donc d’une notion fondamentale à la pensée chinoise et à sa mise en application. Tao, par la suite, a donc pu être traduit de multiples manières par mi lesquelles on retrouve les notions objectives et subjectives de règle essentielle, de principe absolu, de doctrine, de conduite à tenir… mais également de moyen, de procédé, de méthode, d’art.
De ce fait, le terme Tao fut très anciennement utilisé en Chine par les taoïstes (… les praticiens du Tao) mais également par les confucianistes (… les praticiens de la doctrine de Kongzi ou Confucius) qui lui donnaient le sens de « Voie de l’Homme« , donc le comportement humain régi par les lois morales et les principes de la société… ainsi que par les bouddhistes qui y voyaient « la Voie Royale permettant d’accéder au Nirvana« . Il ne s’agit donc pas, comme on le croit souvent, d’une notion exclusivement taoïste mais bel et bien d’un principe philosophique global à la Chine et du pilier essentiel de la pensée chinoise. Ce faisant, le Tao peut se manifester de multiples manières qui, elles-mêmes, se démultiplient à l’infini… avant de rejoindre l’unité. Ceci est exprimé dans le chapitre 42 du Tao Te King (Daodejing) attribué à Lao Tseu (Laozi) : « Le Tao engendre Un. Un engendre Deux. Deux engendre Trois. Trois engendre dix mille êtres… « . Ces dix mille êtres, ou dix mille manifestations, issues du Tao, représentent à leur tour une unité, donc un cycle sans fin qui est l’origine et l’aboutissement du mouvement de cheminement sur la Voie. Le Feng Shui, au même titre que la cuisine, le « Qigong« , l’acupuncture, la calligraphie représente l’une de ces manifestations, donc l’un de ces cheminements sur la Voie.
Cela implique tout simplement que le Feng Shui ne peut se concevoir en dehors de la notion fondamentale d’unité, d’ordre et de totalité. Avant de considérer les choses dans le détail, donc dans ce qui les différencient et les séparent, il convient donc d’adopter une vision globale qui permet de définir une unité dans l’harmonie.
Cette vision globale permet, ainsi, de définir ce qui est essentiel, ce qui est important, ce qui est secondaire et ce qui est superflu… puis de procéder, dans cet ordre, à une prise de conscience de ce qu’il est possible de réaliser pour que cette unité dans l’harmonie soit le plus profitable sur un plan global puis sur divers plans particuliers. Certains rétorqueront immédiatement qu’il est plus facile de changer un cendrier de place que de modifier l’orientation d’une ville mais un authentique expert en Feng Shui rétorquera immédiatement qu’il est difficile de trouver une bonne place pour ce fameux cendrier si on ne sait pas d’où vient le vent, donc comment s’oriente la maison dans la ville et la ville dans l’environnement. Lorsque la ville est mal orientée dans l’espace, lorsque la maison est mal orientée dans la ville, lorsque la pièce est mal orientée dans la maison, lorsque la table est mal orientée dans la pièce, le cendrier sera mal orienté sur la table et la fumée de cigarette particulièrement gênante pour qui ne fume pas. Toutes ces mauvaises orientations inciteront, de plus, à fumer plus… donc à utiliser plusieurs cendriers. Or, la facilité ne consiste pas à passer sa vie à changer des cendriers de place sous le prétexte que la fumée est de plus en plus gênante… Il serait peut-être plus judicieux de trouver les raisons du stress qui incite à fumer toujours plus. Donc de revenir à plus global et de prendre conscience que la mauvaise orientation d’une ville dans l’espace n’est pas sans conséquence sur le stress de tous ceux qui y vivent. Mais le fait que la ville soit mal orientée n’est pas une excuse suffisante pour construire n’importe où ou acheter n’importe quoi.
Si cela était, il est toujours possible de tenter modifier la répartition des pièces… dans la mesure où l’arrivée du gaz et l’évacuation des eaux limitent quelque peu les possibilités de déplacer la cuisine ou la salle de bains. Il est, de même, déconseillé de concevoir une cuisine au rez-de-chaussée et une salle à manger au premier étage sauf si on dispose d’une nombreuse domesticité ou d’un monte plats. Par la suite il est toujours possible de revoir l’aménagement des pièces en imaginant simplement qu’il est toujours plus facile de bouger un meuble léger qu’un meuble lourd et qu’une armoire normande ne dispose pas de multiples emplacements de rechange, ce qui limite ses déplacements dans la maison.
Dans tous les cas il est donc préférable de considérer chaque chose comme une entité globale même et surtout si cette entité fait partie d’un ensemble. Une maison est une entité globale dans son environnement direct. Un appartement est une entité globale dans un immeuble. Dans le premier cas il est donc difficile d’éviter de considérer les abords immédiats de cette maison avec l’extérieur, donc la rue ou le jardin. Cette « entité » maison se constitue donc d’un ensemble plus ou moins harmonieux permettant la mise en relation directe ou indirecte entre l’intérieur et l’extérieur. Si est possible d’agir sur l’extérieur, par exemple le jardin qui précède ou entoure la maison, cela sera un facteur essentiel d’harmonie globale qui sera favorable à l’intérieur même de la maison. Dans le second cas il devient plus difficile, par contre, d’agir sur l’extérieur… donc sur l’immeuble et ses alentours. Tout au plus il sera possible d’agrémenter quelque peu le palier par une éventuelle plante verte. Il conviendra alors de renforcer plus que jamais l’harmonie interne de l’appartement. Sur un plan énergétique plus l’unité est restreinte moins il convient de commettre des erreurs car celles-ci ont, évidemment, plus de conséquences sur l’harmonie générale d’un lieu.
Les facteurs d’unité et d’harmonie.
Concernant l’habitat, et plus particulièrement l’intérieur, afin de concevoir une unité (Yi) qui soit facteur d’harmonie (He ou Aï) il a de tous temps été remarqué, en Orient comme en Occident, que les dimensions générales d’un lieu et des objets qui s’y trouvent doivent correspondre à des règles basées sur les proportions du corps humain. De ce fait, pendent plusieurs millénaires ce qui était construit, fabriqué ou produit se devait de demeurer à l’échelle humaine… même si celle-ci était quelque peu idéalisée (… en occident le « pied » dit « pied de roy » mesurait 0,3248… ce qui correspond à une grande pointure 45 tandis que la « toise » qui, elle aussi se voulait l’idéal de la taille humaine valait 6 pieds… c’est à dire 1,949 m ce qui était également une « toise royale » et une belle taille pour l’époque où l’homme moyen était censé, suivant certains historiens, être un nabot dépassant rarement le mètre quarante cinq…).
Les mesures étaient donc le pouce (0,027 m) , le pied (0,3248 m), le coude (ou la coudée) (0,504 m), la toise (1,949 m) et la lieue commune (4444 m). Bien que les mesures varient quelque peu on retrouve ces anciennes mesures en Chine et dans tout l’Extrême-Orient où le pouce (Tsun) mesure 0,024 m (0,010 m dans certains cas) le pied (Chi ou Chih) mesure 0,324 m, le pas (Pu) (0,50 m) et la toise (Chang) 2 pas 4 fen soit 2 m… tandis que le Li vaut 576 m.
Il est à noter, une fois encore, que la toise représente une belle taille pour un homme asiatique du temps jadis ! Ces mesures classiques désormais devenues étranges et obsolètes ont été remplacées à peu près partout par le système métrique lorsque le technocrate, qui prétend savoir dire comment faire, a simplement remplacé l’artisan qui faisait.
On est donc, dans le principe, passé d’une mesure humaine à une mesure sidérale puisque, très officiellement, le mètre est la longueur égale à 1 650 763, 73 longueurs d’onde dans le vide de la radiation correspondant à la transition entre les niveaux 2p10 et 5d5 de l’atome de krypton 86. Ce qui est, évidemment, beaucoup plus simple qu’un pied fut-il royal ! Dans la réalité, rassurez-vous, l’artisan, bien souvent sans le savoir, fait de la résistance en persistant à produire des portes et fenêtres, des tables et des chaises, ainsi que des marches, des fourchettes et des couteaux à dimensions humaines puisque basées sur les anciennes mesures. Dans la plupart des cas, ne cherchez pas un compte rond et parfaitement métrique qui serait, par ailleurs, totalement inadapté et invivable. Dès qu’il est question de mesure humaine… on en revient à des mesures humaines et il ne faut donc pas s’étonner qu’en matière d’ameublement le mètre comporte tout à coup quelques virgules dans le devis. Cette dimension humaine se retrouve, bien évidemment, dans les chaussures : un 39 ne correspond pas à 0m39 de même que dans le vêtement un 42 n’a rien à voir avec un quelconque 42 cm même royal. Ne parlons pas des matelas aux dimensions particulièrement étranges mais plus adaptées à un être humain qui souhaite se reposer, dormir ou se reproduire qu’à une norme Iso 2000.
Seule la télévision, et, par extension l’écran d’ordinateur, on s’en doute déjà, s’achète en cm et en diagonale. Mais est-ce bien un instrument totalement humain ? Si le gros rouge industriel se vend au litre, et donc s’achète probablement au mètre chez le grossiste, remarquez que le bon vin ne se conçoit encore que dans des bouteilles de 75 cl… et, il n’y a pas si longtemps encore, dans des bouteilles de 72.5 cl… mémoire d’un temps où la boisson des dieux était encore liée à l’alchimie subtile entre le ciel, l’homme et la terre.
Etrangement, la qualité, la vraie qualité, demeure humaine, donc de dimension humaine, tandis que le quantitatif se normalise de plus en plus dans l’abstrait sidéral du mouvement imbécile d’un atome de krypton. Après il est facile de faire prendre n’importe quelle vessie industrielle quantitativement normalisée pour une lanterne à laquelle, tel un ivrogne, va s’accrocher désespérément le statisticien des temps modernes. Cela est particulièrement significatif lorsque des normes dites qualitatives (… qualité France… etc) sont uniquement basées sur des quantités n’ayant plus rien à voir avec l’homme, donc l’utilisateur.
Lorsque l’on confond allègrement, et officiellement, quantité et qualité le pire est à craindre. Lorsque les anciens se basaient sur les dimensions humaines cela n’était peut-être pas très pratique pour les comptables mais correspondait au souci d’harmoniser le lieu et l’humain dans leur intérêt réciproque. Dans le même esprit il convenait de préserver une proportion harmonieuse entre les diverses dimensions d’un lieu et les anciens utilisaient, pour ce faire, plusieurs règles dont le fameux nombre d’or.
Celui-ci représente une proportion fréquente tant dans la nature que dans le corps de l’homme et est doué de propriétés mathématiques remarquables que l’on retrouve dans de nombreux modèles de croissante liés à la « spirale dorée » qui est obtenue par une progression géométrique de rectangles d’or dont la longueur divisée par la largeur est égale à 1,618. Il est actuellement trop souvent considéré que ce nombre d’or et les diverses mesures qui en découlent possèdent uniquement une fonction esthétique qualifiée d’académique.
Or, de très nombreux édifices anciens ont été construits grâce à ce Nombre d’Or et semblent mieux défier le temps que plusieurs constructions beaucoup plus modernes qui, peu de temps après leur construction, se dégradent déjà.
Lorsque le mètre technocratique remplace les maîtres du temps jadis il semble que le moche pifométrique d’aujourd’hui ne soit ni plus résistant ni plus pratique que l’esthétisme académique d’autrefois. Les dimensions « classiques » tendent donc à considérer que microcosme et macrocosme s’interpénètrent et que l’homme doit s’adapter à la nature dans laquelle s’adapte également l’habitat.
Afin de préserver cette unité, donc cette harmonie, entre l’homme et la nature au travers de son habitat et de son mobilier, les experts chinois du Feng Shui utilisent diverses formules mathématiques qui ont été synthétisées dans une règle aux dimensions particulières* basées sur l’ancien système de mesure impérial. Suivant Kongzi (Confucius) lui même « Les nombres n’ont pas pour fonction d’exprimer des grandeurs mais ils servent à ajuster les dimensions concrètes aux proportions de la nature et du Tao » (Liji Livre des Rites).
* Concernant ces nombres et leur utilisation particulièrement dans l’architecture chinoise les passionnés et les curieux liront avec intérêt l’important chapitre qui leur est consacré dans « La pensée chinoise » de Marcel Granet aux éditions Albin Michel.
Cette règle, qui jadis était en jade (Yu Pi Sien), comporte huit divisions traditionnelles dont quatre sont considérées comme favorables et quatre comme défavorables. Cette règle peut donc servir à vérifier les dimensions particulières des objets, du mobilier, des pièces et des maisons et même à organiser les éléments décoratifs situés dans l’environnement de la maison. Chacune de ces huit divisions (Chin) mesure précisément 5,968cm : la mesure de base est donc de 47,774 cm correspondant à l’ancien pas (Pu) qui valait lui-même cinq pouces (Tsun). Lorsqu’on utilise une telle règle il est à remarquer que la plupart des objets anciens, orientaux ou occidentaux, sont de dimensions « favorables » alors que de nombreux objets modernes ne le sont pas.
Est-ce simplement le fait du hasard ? Marcel Granet dans « La pensée chinoise » (Albin Michel) relate le fait que 6 ou 12 couteaux mis bout à bout doivent former un cercle parfait, donc une unité harmonieuse puisqu’ils se vendent par 6 ou 12 ! Ces dimensions favorables, ou « bénéfiques« , et défavorable, ou « maléfiques« , en chinois Shun (caractère 4494 du dictionnaire Ricci signifiant littéralement suivre dans le bon sens, se conformer à, docile, obéissant, favorable, propice, commode, aisé, naturel, paisible) et Ni (caractère 3639 du dictionnaire Ricci signifiant au contraire, dans le sens contraire, s’opposer à, contrarier, adverse, se révolter, désordre, trouble, perturbateur) demeurent un bon critère de jugement et d’estimation à condition de ne pas tomber dans la rigueur excessive dont chacun peut, à son insu, être la victime malheureuse.
En effet, il est assez amusant de constater qu’un coffret sur le Feng Shui destiné au grand public comporte plusieurs éléments dont cette fameuse règle. Le mode d’emploi accompagnant la règle précise que l’utilisation de celle-ci peut être appliquée à tout ce qui peut être mesuré afin de choisir des dimensions favorables. Or, le coffret contenant ces objets, suivant le même mode d’emploi et mesuré avec cette même règle, est de dimension tout à fait défavorable puisque annonçant la perte et même, si on en croit le fameux mode d’emploi, la mort ! Visiblement l’auteur, pourtant très péremptoire, a oublié de vérifier les dimensions de son fameux coffret Feng Shui puisque celui-ci est particulièrement dangereux dans ses dimensions. L’autre hypothèse est qu’il n’y a pas unité ni harmonie entre cet auteur et son éditeur, ce qui est un comble dans ce cas précis. Admettons simplement que tout le monde peut se tromper et que l’erreur est, heureusement, encore de dimension humaine.
L’Unité dans le domaine du Feng Shui :
La visualisation de l’unité, donc du global, implique qu’il faut savoir prendre suffisamment de recul pour observer les choses et éviter de se laisser distraire par des détails sans grande importance qui finissent par dissimuler ou contrefaire la réalité.
« Il faut donner de l’importance aux choses qui ont de l’importance et ne point perdre de temps avec celles qui n’en n’ont pas« . Charles De Gaulle.
Cela est facile à dire mais moins à appliquer car on préfère souvent ce qui est compliqué et inutile à ce qui est simple et pratique. Les vendeurs en immobilier le savent bien lorsqu’ils préfèrent faire visiter un bien en assez mauvais état lorsqu’il est habité et occupé… puisqu’il semblera alors habitable même et surtout si il ne l’est plus tout à fait.
Le mobilier présent habillera encore quelque peu les murs et les sols et le client potentiel achètera alors plus la pièce potentielle que le local présent. Dans le cas où le bien est inoccupé depuis un certain temps, un simple carreau cassé « par hasard » attirera l’attention beaucoup plus que la grosse tâche d’humidité au plafond. Mais, un carreau cassé se répare en quelques dizaines de minutes alors qu’une fuite dans un toit exige de grosses réparations…
Unité ne veut pas pour autant dire uniforme car il ne faut pas confondre harmonie avec rigorisme. L’unité n’est pas forcément simpliste car une maison de plusieurs étages comportant des parties de plusieurs époques peut-être plus harmonieuse qu’un bunker d’un seul étage en béton. Dans cette optique particulière d’unité et d’harmonie un couple, ou une famille, qui s’entend bien vaut mieux qu’un individu isolé ne se sentant bien qu’avec lui-même. Il est, en effet, parfois plus facile de s’harmoniser avec l’univers qu’avec son voisin de palier.
Une immense maison dans un tout petit terrain ou une toute petite maison dans un immense terrain rendent difficile cette unité et cette harmonie. Il en va de même pour une maison trop riche dans un quartier trop pauvre ou pour une maison trop pauvre dans un quartier trop riche.
Certains objecteront qu’il vaut mieux une maison en bon état dans un terrain vague qu’une maison en mauvais état dans un parc bien entretenu… sauf qu’il suffit de quelques jours pour repeindre une façade et quelques volets et éventuellement refaire des gouttières et une partie du toit alors qu’il faut au moins dix ans pour faire pousser un arbre et trente ans pour obtenir un parc digne de ce nom.
Quelques bâtiments, parfois même disparates, harmonieusement disposés sur un terrain de bonne proportion peuvent tout à fait constituer une entité particulière, donc une unité harmonieuse alors qu’une maison unique mais mal située sur un terrain mal défini peut tout à fait ne représenter aucune unité donc aucune harmonie. En quelque sorte l’unité est aussi affaire de proportion.
Or, il existe des proportions favorables et des proportions défavorables et il vaut toujours mieux tendre vers une unité dynamique que de se complaire dans l’uniformité statique. Un chemin simplement matérialisé par quelques pierres plates peut fort bien réaliser une unité favorable entre deux bâtiments comme un pont matérialise une unité entre les deux rives d’un cours d’eau.
Il convient donc de favoriser ce qui réunit et d’éviter ce qui sépare ou ce qui divise. Pour les anciens, le puits symbolisait la rencontre, donc l’unité et l’harmonie entre la terre et le ciel et la terre et l’homme de même qu’il unifiait un terrain, donc un territoire, à un habitat. Le simple fait de boucher un puits ou de le faire disparaître pour de simples motifs de sécurité ou de manque d’utilité risque de faire également disparaître cette unité et cette harmonie subtile. Par la suite, l’eau devenue stagnante devient peu à peu « perverse » ou pathogène sinon perturbatrice (Xie ou Sha).
Dans ce cas il convient de remettre le puits en état ou, à défaut, d’élever une pierre oblongue à proximité de son ancien emplacement. Cette « pierre levée » (men-hir ou pierre-fitte) permettant, on s’en doute, de pratiquer une forme d’acupuncture terrestre se retrouvait à peu près partout sur la planète et permettait d’évacuer les « énergies perverses » (Xie Qi ou Sha Qi) en facilitant la circulation entre l’en deçà et l’au delà… .donc la profondeur la plus interne avec le sommet le plus externe : le Yin de la Terre et le Yang du Ciel.
Dans certains cas un arbre peut jouer le même rôle puisqu’il va plonger ses racines à la source même du problème et transformer l’énergie « perverse » en mouvement végétal puis en mouvement de dispersions dans le ciel. Avant de boucher un puits ou d’arracher un arbre il faut donc être quelque peu prudent car, dans les deux cas, il s’agit purement et simplement d’une blessure infligée à l’unité, donc à l’harmonie.
Mieux vaut ne pas parler de la suppression ou de la destruction d’une « pierre levée » ou même d’une simple borne. Cette dernière situait les limites d’un terrain… donc de son unité. Lorsqu’on supprime ou déplace une borne il convient donc de remplacer celle-ci par une simple « pierre levée » ou simplement un arbre. Si on ne le peut il faut alors soigneusement reboucher le trou après avoir effectué l’offrande d’une pièce ou d’un objet de fer. La perte d’unité, donc d’identité, d’un terrain provoque toujours une perturbation plus ou moins passagère ou durable. Si on recrée, plus ou moins consciemment, une autre unité la perturbation cesse d’elle-même.
Dans le cas contraire c’est la perturbation elle-même qui deviendra unitaire et cherchera à s’imposer par le biais de la division. Pour certains experts il s’agit simplement d’une modification vibratoire dans l’environnement, donc de ce qui peut être considéré comme une fracture entre deux plans, ce qui se matérialise bien souvent par une ligne de force particulière : une nouvelle « veine de dragon« . Comme l’acupuncteur qui insère un aiguille sur le « point » d’un « méridien » pour accroîtra ou diminuer, donc modifier, la circulation de l’énergie il est tout à fait possible de découvrir sur cette ligne de force la fameuse « caverne du tigre » et d’opérer un traitement en insérant une « aiguille » naturelle, pierre, arbre, portique. Dans certains terrains qui n’ont pas été entretenus depuis de longues années il n’est pas rare, au contraire; que d’anciens piquets métallique blessent les « veines du dragon » d’une manière incontrôlée allant jusqu’à provoquer des perturbations énergétiques se matérialisant parfois dans la présence de plantes plus ou moins dangereuses comme la datura, la belladone, la jusquiame, la bryone dioïque.
Il en va évidemment de même pour les décharges enfouies contenant, particulièrement, des rejets métalliques comme le fer, l’aluminium ou le plomb sinon le mercure qui polluent le terrain non seulement d’une manière chimique mais également profondément énergétique. En matière de Feng Shui les cavités (Xue ou Hsueh) ou « terriers » (il s’agit du même terme utilisé en acupuncture) sont toujours considérées comme perturbatrices sinon dangereuses car elles remettent justement en cause l’unité et l’harmonie, lorsqu’elles sont « habitées » elles deviennent toujours « perverses » (Xie ou Sha).
Ce terme « pervers » est celui qui fut utilisé par les premiers traducteurs de la langue chinoise, les Jésuites, il y a près de deux siècles mais, originellement Sha (Cha, Shar, Char… ) représentait un animal féroce avec de grandes griffes et de grandes dents (ressemblant tout à fait à l’image occidentale de la bête du Gévaudan !) qui avait remplacé après l’avoir tué l’animal paisible habitant le fameux terrier (Xue). Ce caractère (4425 du dictionnaire Ricci) signifie donc tuer, assassiner, massacrer, faire mal exprès, détruire… et par extension (caractère 4227 du dictionnaire Ricci) génie malfaisant, influx néfaste, entité perverse, revenant maléfique, funeste, délétère. Des morceaux de ferraille tranchants et rouillés dans une cavité souterraine ou, pire encore, des déchets chimiques ou radio-actifs représentent bien cette image assez terrifiante… le tigre lui-même a été remplacé dans sa caverne et le nouvel occupant commence à attaquer les « veines du dragon« , lequel tente de se défendre en produisant, à son tour, du venin.
L’image est peut-être simpliste mais vaut bien toutes les formules mathématiques. En tous cas l’unité de la Terre et l’harmonie entre Terre et Ciel ne sont plus préservées… et l’homme subit l’effet du « souffle pervers » (Xie Qi) ou du « souffle assassin » (Sha Qi). Il est à noter que le cri de ralliement « Sha ! » fut utilisé par les Boxeurs en 1900 lors de la révolte contre les concessions occidentales. Il convenait, en effet, » de détruire les mandchous (Qing) afin de prendre leurs armes puis de se retourner ensuite contre les occidentaux pour les exterminer avec la plus grande sauvagerie » (Tu Mou, Chef Boxeur de la Secte du Mao Shan). Le rôle du « Sha Qi » est donc, par le biais de la perversion qui consiste principalement à corrompre, de s’attaquer à l’unité afin d’en rompre ou d’en dissoudre l’harmonie.
Or, dans la conception classique du Feng Shui tout ce qui ne circule pas a tendance à se corrompre… donc à devenir « pervers » et dangereux d’autant plus que cette action demeure sournoise et cachée le plus longtemps possible. Si il existe unité (Yi et harmonie (He) il est difficile, sinon impossible, à l’énergie de ne pas circuler. Un début de dissension, donc une disharmonie, ne peut engendrer que plus de dissension encore… et provoquer le processus de la perversion. Cela est traditionnellement exprimé dans la formule :
« L’énergie meurt où commence la forme sauf si celle-ci est animée d’un mouvement« . (Littéralement « énergie – meurt – naît – forme – sauf – mouvement-engendre« ). Si l’énergie meurt, elle se corrompt et, peu à peu, attaque la forme qu’elle a fait naître… donnant naissance à une autre énergie « perverse« . Dans la recherche de l’Unité il est donc important de considérer le mouvement global et, surtout, la capacité de transformation et d’évolution.
UNITÉ ET HARMONIE DANS LE FENG SHUI :
Une unité entre la maison et le terrain
Une unité du terrain
Un terrain à forme régulière
Un terrain de forme carrée ou rectangulaire
Un terrain possédant un puits
Un terrain sans cavités
Un terrain avec eau visible (étang, rivière)
Une source visible
Une maison située au centre d’un parc
Une maison cachée dans la forêt
Une façade de matériaux uniques
Des portes plus hautes que les fenêtres
Une maison séparée des voisins
Une entrée principale sur le devant
Une entrée secondaire sur le coté
Une entrée située en face de l’escalier
Une entrée principale donnant sur la rue
Une entrée située plus à gauche
Une entrée avec vestibule
Une entrée donnant sur le salon
Un garage situé sur le coté de la maison
Une façade sur la rue principale
Un escalier unique menant aux étages
Les pièces où l’on vit au rez de chaussée
Les pièces où l’on se repose à l’étage
Cuisine et salle à manger sur le même plan
Salle de bain et WC sur le même plan
Pièces habitées au dessus du niveau du sol
Pièces d’habitation dans le même bâtiment
Une seule cave sur habitation principale
Un seul grenier sur habitation principale
Des pièces qui communiquent
Des paliers à la même hauteur
Une maison située en dehors du terrain principal
Plusieurs terrains (jardin + cour + stationnement)
Un terrain à multiples cotés et irrégulier
Un terrain de forme triangulaire ou indéfinie
Un terrain dont on a bouché le puits
Un terrain avec cavités ou piquets de fer
Un terrain avec eau invisible (source souterraine)
De l’eau qui coule sans source visible
Une maison située en bordure d’un parc
Une maison en lisière de forêt
Une façade de matériaux composites
Des fenêtres plus hautes que les portes
Une maison mitoyenne entre habitations
Plusieurs entrées sur le devant de la maison
Plusieurs entrées secondaires sur l’arrière
Une entrée principale dissimulée
Une entrée située derrière l’escalier
Une entrée située plus à droite
Une entrée sans vestibule
Une entrée donnant sur la cuisine ou la chambre
Un garage situé en façade principale
Trois façades en triangle (étrave de bateau)
Plusieurs escaliers menant aux étages
Les pièces où l’on vit à l’étage
Les pièces où l’on se repose au rez de chaussée
Cuisine et salle à manger sur des plans différents
Salle de bain et WC sur des plans différents
Pièces habitées sous le niveau du sol (cave… )
Pièces d’habitation dans plusieurs bâtiments
Plusieurs caves sur habitation principale
Plusieurs greniers sur habitation principale
Des pièces qui ne communiquent pas
De multiples paliers de hauteurs différentes
* Il est entendu que le Feng Shui peut apporter diverses solutions pratiques et simples à une situation défavorable et qu’il n’est pas toujours nécessaire de casser un mur ou de boucher une fenêtre pour rééquilibrer l’énergie de l’habitat !.