Le choux chinois
par Georges CHARLES
Il ne s’agit pas d’un nouveau légume exotique
puisque ce fameux chou chinois (Brassica sinensis), aussi nommé
chou de Pékin (Brassica pekinensis) est bel et bien présent
dans les catalogues des grainetiers du tout début vingtième
siècle.
C’est, en fait, une variété intermédiaire entre
le chou et la salade romaine. Certains le comparent à la
poirée aussi nommée bette ou blette.
Pendant quelque temps il a aussi été appelé
chou de glace à cause de sa couleur translucide. Cette couleur
particulière ainsi que sa forme, impliquée par ses
longues feuilles blondes, a inspiré bon nombre d’artistes
chinois qui le reproduisirent dans les jades des meilleurs qualités.
Il s’agit, en fait, d’une plante annuelle
de la famille des choux orientaux (brassica rapa) qui se multiplie
par semis courant juin, en juillet ou, au plus tard, pendant la
première quinzaine d’août.
Les spécialistes affirment qu’il convient d’effectuer les
semis en lune décroissante. Les semis se font en poquets
contenant 3 à 4 graines et espacés de 30 à
40 cm. Les graines sont ensuite recouvertes de terre fine plombée
avec le dos du râteau. Ces graines lèvent en une semaine
et lorsque les plants ont plusieurs feuilles ils convient de ne
conserver que les plus beaux spécimens.
C’est un légume peu exigeant qui peut se contenter d’une
terre humide et froide et qui n’a besoin pour se développer
que de beaucoup d’eau. Il pousse même très bien en
altitude jusqu’à près de deux mille mètres.
Il n’occupe que peu longtemps le terrain puisqu’il faut compter
seulement trois mois entre le semis et la récolte.
Il peut être la cible de divers parasites du jardin… limaces
et escargots, mille pattes, altise – qui est un petit coléoptères
s’attaquant aux feuilles les plus tendres – mais est assez résistant
aux maladies d’autant plus que le chou chinois d’origine présente
désormais des variétés dites » améliorées »
comme le » Tip-top » ou le » Two seasons
hybrid « . Ce dernier peut également être
semé en fin d’hiver pour produire un chou de printemps très
honorable… à conditions que les conditions climatiques
s’y prêtent Il existe également des variétés
orientales classiques comme le Tah Sai chinois de saveur plus douce
ou le mizuma et mizuma purple japonais qui ressemble plus à
une chicorée et que l’on peut se procurer chez des herboristes
spécialisés ou des graineteries Bio *.
L’inconvénient majeur du chou chinois est que la chaleur
le fait rapidement monter en fleur… il résiste, par contre,
assez bien aux premières gelées et peut donc être
laissé en terre jusqu’au moment de la récolte… donc
de l’utilisation. Cette rotation rapide et cette périodicité
réduite ont incité les asiatiques à le conserver
de multiples manières, soit frais en l’enterrant dans le
sable ou en l’entourant de papier et de tissus soit en diverses
conserves et, plus particulièrement, celles utilisant le
sel et la lacto-fermentation.
L’intérêt réel du chou
chinois est qu’il peut se consommer de multiples façons…
cru, cuit ou en conserve. Il ne présente généralement
pas les inconvénients intempestifs des autres choux et ne
provoque donc pas de flatulences.
Il est donc accepté par tous car d’une saveur douce rappelant
la noisette ou le beurre frais.
Sur un plan diététique et énergétique
il s’agit d’un légume-feuille très intéressant
car il renferme, en quantités assez exceptionnelles des vitamines
A, C, B1, B2, PP et des oligo-éléments comme le fer,
le calcium, le phosphore, le cuivre. Il possède des propriétés
digestives, béchiques, stomachiques, diurétiques et
est légèrement laxatif.
Suivant la tradition médicale chinoise, le chou chinois (Wang
Ya Bai Cai) lorsqu’il est cru est de saveur légèrement
acide et froide et lorsqu’il est cuit il est de saveur douce et
neutre. Il » nourrit l’estomac » et fait circuler
l’énergie dans les vaisseaux et les méridiens, il
harmonise les six entrailles et restaure l’Essence (Jing).
Il est, de plus, utile aux reins, à la moelle des os et du
cerveau.
En diétothérapie traditionnelle il est souvent associé,
dans des recettes, au chrysanthème comestible (Chrysanthenum
coronarium), ou chrysanthème à couronne (shungiku)
dont les jeunes pousses sont consommées en légume
tant en Chine qu’au Japon ou en Corée.
Recettes :
Comme nous l’avons vu ce chou chinois se consomme tout à
fait aussi bien cru… comme une salade que cuit comme ses Congénères
choux. Il convient malgré tout, pour lui préserver
ses qualités organoleptiques et énergétiques
de ne pas le faire trop cuire.
La cuisson en sauté rapide, à la chinoise, dans un
Wok (poelle ronde) lui convient parfaitement. Il est aussi possible
de l’ébouillanter pour le blanchir rapidement afin de le
servir en sauce occidentale (béchamel, jus de rôti…
) ou chinoise (sauce d’huîtres, sauce épaisse de soja).
En salade à la japonaise (Japon)
Hacher le chou cru en fines lamelles.
L’assaisonner avec un mélange de vinaigre blanc de riz, de
sauce mirin (sorte de sauce douce à base de saké ou
vin de riz) et d’un peu de moutarde douce dite » Rose
trémière de montagne « …
Si ces ingrédients japonais ne vous évoquent rien
vous pouvez simplement les remplacer par une émulsion de
vinaigre blanc, ou vinaigre d’alcool adouci d’un peu d’eau tiède,
d’huile végétale (huile de pépins de raisin
ou huile de tournesol ou d’arachides), d’une cuillerée à
café de moutarde de Dijon douce ou mi-forte et de quelques
gouttes de vermouth sucré… ou d’une pincée de sucre.
Cette salade se sert en entrée ou accompagne un poisson cuit
à la vapeur d’algues.
En soupe légère d’hiver
de Pakjung (Corée du Sud)
Utiliser l’os d’une côtelette de porc ou (et) d’une
cuisse de poulet cru.
Plonger cet os cru dans une casserole d’eau froide (5 bols d’eau
froide pour 4 bols de soupe chaude… ) et amener à ébullition
une dizaine de minutes.
Ecumer. Retirer les os.
Ajouter quelques lamelles de porc ou de poulet cru ainsi que quelques
lamelles de carotte (détaillées à l’épluche
légume), trois rondelles d’oignon, une gousse d’ail écrasée.
Laisser cuire doucement moins de dix minutes.
Au moment de servir ajouter les feuilles vertes hachées ainsi
que quelques morceaux du blanc d’un chou chinois qui seront juste
ébouillantés. Un filet de sauce de soja légère
ou une bonne pincée de sel… et servir.
Eventuellement, pour les vrais amateurs de cuisine
coréenne, ajouter quelques gouttes d’huile de sésame
ou un peu de piment en poudre dans les bols.
Cela se boit bouillant. Les Coréens feront » chabrot »
avec un petit verre de Jinro ou alcool de ginseng. La recette classique
s’effectue avec une vieille poule à pattes noires, une grosse
racine de ginseng, quelques vieux navets d’hiver ou des radis blancs…
et cuit à feu doux sur le fourneau à charbons de bois
quelques heures.
La soupe est servie quand la poule se découpe avec des baguettes
coréennes de métal. Dans ce cas la soupe est servie
pimentée… ce qui n’empêche nullement de manger du
Kimchi avec la chair… et d’accompagner le tout de Jinro !
Lorsqu’il fait très, très froid les Coréens
ajoutent quelques rondelles de moelle de buf. Avec une demie douzaine
de bols de riz par personne cela constitue un repas très
complet. Attention aux insomnies !
Chou chinois sauté à la
sauce d’huîtres (Chine)
Détailler grossièrement le chou
ou séparer simplement les feuilles.
Dans une sauteuse ou dans un Wok faire chauffer deux cuillerées
à soupe d’huile végétale.
Faire sauter le chou à feu très vif pendant quelques
minutes de manière à ce que les feuilles saisies demeurent
croquantes.
Ajouter une cuillerée au soupe de sauce de soja et deux cuillerées
à soupe de sauce d’huîtres ainsi qu’un demi verre
d’eau chaude.
Remuer et servir bien chaud. Il est possible d’ajouter à
l’huile végétale une gousse d’ail hachée qu’on
laissera brunir.
Ce plat peut également se réaliser en ajoutant quelques
tiges et feuilles de moutarde chinoise.
Il se sert en accompagnement de plats sautés de buf, de
port ou de poulet.
Baiku Kimchi ou chou de printemps macéré
à la Coréenne
(recette simplifiée)
Hacher le chou grossièrement et le disposer
dans un saladier en verre.
Ajouter une cuillerée à café de sel de mer
et une cuillerée à café de bicarbonate de soude.
Laisser macérer trois à quatre heures.
Malaxer avec les doigts pour amollir les feuilles sans les casser.
Rincer abondamment et bien égoutter.
Remettre le chou dans le saladier ajouter :
trois cuillerées à soupe de vinaigre blanc,
3 cuillerées à soupe de sauce de soja,
2 cuillerées à café de gingembre frais
haché ou une demie cuillerée de gingembre en poudre,
1 cuillerée à café d’ail haché,
2 cuillerées à café de sucre en poudre,
1 grosse pincée de piment rouge séché,
1 grosse pincée de sel de mer.
Bien remuer.
Couvrir avec une assiette qui reposera sur le mélange puis
hermétiquement avec une feuille de papier aluminium ou de
film alimentaire.
Laisser macérer une demie journée à température
ambiante puis laisser au réfrigérateur au moins 24
heures.
Au moment de servir ajouter quelques gouttes d’huile de sésame.
Le mélange peut être plus ou moins pimenté.
les coréens le préfèrent très pimenté
et le servent en accompagnement de très nombreux plats avec
le riz.
Le véritable Kimchi est préparé en automne
dans de grandes jarres et le chou subit une lente lacto-fermentation.
C’est l’accompagnement nécessairement indispensable à
la cuisine coréenne.