It’s a long way…to Nobel !
Par Georges Charles
Le prix Nobel de médecine vient d’être attribué à trois chercheurs, d’une part à William Campbell et à Satoshi Nomura pour leurs travaux sur l’avermectine, antiparasitaire qui permet de lutter efficacement contre les vers ronds, cause de nombreuses maladies particulièrement en Afrique et d’autre part à la Chinoise You You Tu qui, en 1972, a isolé le composant le plus actif de l’armoise à fleurs jaunes, artemisia annua, l’artemisine. Cette substance permet de lutter, quant à elle, contre le paludisme qui tue, toujours, près de 600 000 personne par an, en moyenne, sur l’ensemble de la planète. Le paludisme mais également la malaria ainsi que d’autres maladies secondaires transmises par les insectes et les tiques dont, très probablement, la maladie de Lyme qui infecte bon nombre de nos contemporains. Ainsi que bon nombre de maladies – dont certains cancers –
Article sur l’artemisia annua signé par Georges Charles et paru dans le N° 97 de « La Vie Naturelle » de septembre 1994 – il y a donc plus de vingt ans – la même question se pose toujours : Pourquoi tant de retard dans l’utiisation ?
Jusqu’ici rien de très extraordinaire si on excepte le fait qu’une découverte effectuée en 1972 soit officiellement récompensée en 2015, soit 43 ans plus tard. Et qu’en septembre 1994, dans le N°97 de « La vie naturelle » du Groupe Arys où j’étais rédacteur, j’avais publié, déjà, une fiche de phytothérapie concernant l’artemise, donc l’armoise à fleurs jaunes (artemisia annua – littéralement artémise annuelle) où je relatais ce fait. Donc il y a un peu plus de vingt ans. Par la suite Le Monde, en 2010, avait encore consacré un article, succinct, à cette plante essentielle dans tous les sens du terme. Si vous faites un rapide calcul vous vous rendez vite compte du chiffre effarant de morts qu’il aura fallu pour que la science se réveille *. Le Professeur Pierre Marie Girard, du service des maladies infectieuses de l’hôpital Saint Antoine explique « L’artémisine a désormais supplanté la quinine comme traitement préférentiel des formes sévères de paludisme « .
Et c’est probablement là où réside le problème que je dénonçais en 1994 : il a fallu substituer à un médicament très utilisé et bénéficiant d’un quasi-monopole une substance nouvelle qui était produite par d’autres laboratoires, notamment chinois. Je précisais dans cet article, dont vous trouverez le fac similé plus haut, que les effets de l’artemisia annua, qingshaosu en chinois, étaient connus, en Chine depuis près de deux millénaires (prescriptions médicales des grottes de Long Men reprenant des « formules magistrales » de la Dynastie des Han) et que le Dr Chamfrault dans son tome III de la Médecine Chinoise ((Editions Coquemard 1959) la donne comme « remède souverain contre le paludisme ». Les Américains la surnomment désormais « Golden Drug » .
Notre plante n’est donc pas une inconnue. Mais il est dit, euphémiquement, que suite à certaines polémiques les travaux de You You Tu n’ont été internationalement reconnus qu’en 2011 grâce au prix Albert-Lasker – « Une étape importante compte tenu des limites de la production d’Artemisia annua, essentiellement chinoise ».
Or, par expérience vécue, je peux affirmer que cette plante pousse très bien hors de Chine puisqu’elle est utilisée au Bénin grâce à une action d’œuvres humanitaires religieuses qui l’utilisent avec profit sur place où elle se reproduit très bien. Action entreprise grâce à l’Association Humanitrad et, conjointement, avec Georges Marie Mélin, enseignant des Arts Classiques du Tao et moi-même. Les semences fournies provenant de Nantes. La plante, par elle même, est très efficace, comme elle l’a d’ailleurs toujours été, sans la nécessité de passer par l’extraction industrielle de l’artémisine et de quelconques brevets d’exploitation de laboratoires médicaux. La plante dans son totum (sa totalité des racines aux infloraisons) a toujours été utilisée sous cette forme « naturelle » et depuis des siècles sinon des millénaires. Mais dans ce cas elle échappe, évidemment, à son industrialisation et à sa mise sur le marché pharmaceutique. Donc à la récolte de gros sous. Evidemment l’OMS, qui fut à l’origine de l’information sur la plante et ses effets met désormais en garde vis à vis de son utilisation exclusive pour favoriser l’utilisation de la molécule, l’artémisine, extraite en association avec d’autres substances. Ceci évidemment pour des raisons que l’on comprend très aisément.
De là à imaginer qu’on ait pu faire quelque peu traîner les choses, il n’y a qu’un pas. Que le monde scientifique ait mis plus de trente ans à s’intéresser aux travaux de Madame You You Tu pour finalement la récompenser non pas pour l’artemisia annua et son effet sur le paludisme, et d’autres maladies endémiques, mais sur l’extraction de l’artémisine, donc de la molécule extraite de la dite plante, est assez significatif. Comme on dit en Chine « un clou caché dans un sac finit toujours par ressortir ». Officiellement, ou peu s’en faut, il est d’ailleurs expliqué que » l’artemisine est utilisée avec grand succès en combinaison avec d’autres médicaments contre le paludisme ». On imagine bien que les « autres médicaments » ne sont pas sous une licence chinoise mais sous des licences émanant des laboratoires qui, auparavant, étaient uniquement motivés par la quinine et ses avatars. Mais tout cela je l’ai déjà écrit, et publié, il y a plus de vingt ans. C’est probablement parce que je préfère me répéter que de me contredire.
* Je vous laisse faire vous-même les multiplications entre la moyenne du nombre de morts par an et le nombre d’années passées depuis l’invention* de l’artemisine. Sinon de la découverte de l’effficacité de l’artemisia annua dans le traitement du paludisme.
*En langage juridique l’inventeur est celui qui fait une découverte. Lorsqu’on découvre un trésor on est donc, juridiquement et légalement, l’inventeur du trésor. Et dans ce cas l’étymologie ne trompe pas : on ne créé rien, on ne fait de que remettre au jour ce qui était caché. Donc recouvert du manteau de l’oubli. Il est parfois nécessaire de regarder sous ce manteau pour comprendre que la vie humaine n’a que peu de valeur au regard des profits économiques. La perte des uns c’est le profit des autres.
J’ai horreur d’avoir tort mais très peur d’avoir raison. Mais heureusement comme le dit si bien Elvis Gratton
« Si on n’en parle pas, ça n’existe pas ! ».
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En dernière nouvelle une excellente vidéo de Christophe Bernard sur YouTube traitant de l’Artemisia annua dans le traitement non seulement de la malaria et du paludisme mais également du cancer :