Qui propos : Quiproquos.
« L’Interne masque la boxe, un boxeur d’interne ressemble à tout sauf à un boxeur » Guo Yunshen
« L’Art du Poing consiste tout d’abord à protéger la santé. Il peut servir, ensuite, à se défendre. Il éveille l’Esprit et, parfois peut modifier le cours de la destinée « .
Sun Lutang- Sun Fukuan (1860 1933) « Le Maître des Trois paumes »
QUIPROQUO : Sommaire
- • Histoire d’un quiproquo » Quid Pro Kuo ? » par Georges Charles
- • Gu Ruzhang ou Ku Lu Zan ou Ku Yu Cheung (1894 1952)
- • En guise de conclusion et d’épitaphe à Gu Ruzhang
- • Quelques explications…
- • Et avant 1969 ? C’était quoi le Kung Fu ?
Histoire d’un quiproquo » Quid Pro Kuo ? » par Georges Charles
Quid Pro Quo
signifie « qui pour quoi » et a pris le sens de « prendre quelqu’un pour quelqu’un d’autre ».
En 1979 je me suis rendu une dernière fois à Hong Kong afin de faire valoir ma succession concernant l’Ecole San Yiquan que venait de me léguer, en tant que « Maître Héritier » (Zengren Daoshi) le Maître Wang Zemin (alias Wong Tse Ming à Hong Kong et Wong Tai Ming en France (donc Tai Ming Wong).
De Liannanquan (Lien Huan Chuan) (Poing des générations en cercle) *, l’Ecole de Wang Zemin, on passait donc à San Yiquan (San I Chuan) de Cha Lishi qui est mon nom dans les généalogies chinoises puisque c’était le souhait de Wang Zemin de respecter la tradition confucéenne où l’Ecole change de nom lorsqu’elle change de chef de file.
San Yiquan était le nom qui fut donné pour honorer le Yiquan comme il est également de tradition. Yiquan en référence, évidemment, à Wang Xiangzhai mais également, et surtout, à Li Laoneng et, ce faisan, à Yue Fei qui fut, probablement le premier à l’utiliser dans le Liuheyiquan (poing de l’Unité des Six Harmonies) dans ce qui deviendra, par la suite, le Xingyiquan.
C’est ce qui est affirmé sur la pierre tombale de Guo Yunshen.
Tradition confucéenne qui n’est évidemment plus respectée depuis 1949 mais qui pourrait se faire à nouveau valoir puisque Kongzi est désormais en odeur de sainteté pour ne pas dire à la mode. Tout est toujours un éternel retour ou un re-commencement.
* Liananquan ou Lien Huan Chuan l’Ecole de Wang Zemin
Cela nécessite une explication ou, plutôt, une mise au point.
C’est le nom particulier de l’Ecole de Wang Zemin (Wong Tse Min ou Tai Ming Wong) (1909 2002) qui, suivant la tradition confucéenne, ne reprit pas le nom de l’Ecole de son Maître, ou plutôt de l’un ses ses maîtres, Wang Wiangzhai, le Dachengquan (Ta Cheng Chuan) qui devint après 1949 le Yiquan (I Chuan) bien que les deux noms aient continué à être utilisés assez indifféremment par la suite ce ui ne fut pas sans entretenir une certaine confusion.
Yiquan était, originellement, le nom particulier de l’Ecole de Li Laoneng, le « Maître Ancestral » qui, lui-même le tenait de Yue Fei (1103 1142) qui utilisa le nom de Liuheyiquan (Liu Ho I Chuan).
Lian ou Lien (caractère 3139 du Ricci Clé 162 7 traits) signifie joindre, unir, assembler, fondre avec, continu, consécutif, fusion, fusionner mais aussi continuer, succéder, s’enchaîner se suivre.
C’est le terme utilisé pour désigner la « lance fondue à un crochet de Yue Fei (Yu Fei Gu Lian Jiang) mais aussi par Gu Ruzhang dans « Lian Huan Tui » (Liaison des coups de pied en cercle) dans les « Dix Voies du Shaolin » (Lian Huan Tui et Lian Huan Chuan ont probablementune parenté lointaine piisque le premier concerne le pied et l’autre le poing !). Il est également utilisé dans Neilianquan (Nei Lien Chuan) « Poing de la Fusion Interne » l’Ecole de John William Squier en référence, duivant cette même tradition, à l’Ecole de Wang Zemin.
Huan (caractère 2212 du Ricci Clé 162 13 traits) désigne revenir, faire retour à l’origine, mouvement de retour mais également ce qui est circulaire, continu.
Quan (Chuan) désigne évidemment le poing, donc l’Art du Poing.
On retrouve donc une notion de fusion et de retour à l’origine.
Liannanquan ou Lien Huan Chuan n’est donc pas uniquement la succession de Yiquan puisque cette école inclut également des principes liés à Tang Lang et plus particulièrement à la forme « de la Mante Religieuse des Sept Etoiles du Nord » (Xie Pei Xing Tang Lang Quan) en référence au Clan Wang de Yue d’où était issu Wang Zemin (dont nous pratiquons et ransmettons toujours les formes d’armes).
C’est au sein de ce même Clan Wang de Yue que se transmettait la forme de la « lance fondue à un crochet de Yue Fei » et qui aurait donné naissance au Xingyiquan, ceci suite à un accord entre le Clan Wang et le Clan Yue puisque le premier aurait « recueilliet adopté Yu Fei » (Yue You Mou Wang). Egalement des principes issus du Yongchunquan alias Wing Chun puisque Wang Zemin fut, entre 1965 et 1970 un disciple répertorié de Yip Man (généalogie de l’Ecole et historique du Wing Chun proposés par les fils de Yip Man à Hong Kong). Sans oublier, également, des principes essentiels liés au Hongquan (Hung Gar Chuan) Wang Zemin connaissant fort bien Yuen Yik Kai (Yuan Yixi, disciple de Fu Liu Hin du Wuxing Hongquan) (Wuxingquan) ancien « patriarche » du Hung Gar. En précisant, encore, que Liananquan de Wang incluait la « philosophie morale » (Xinxue) de Wang Yang Ming et particulièrement le San Jiao He Yi (Les Trois Enseignements – Taoïsme, Bouddhisme et Confucianisme – s’harmonisent en Un) qui est à l’origine du nom de San Yiquan.
Et en ajoutant encore le Tao-Yin (Daoyin) du Lingbaoming tel qu’il fut transmis à Wang Zemin d’une part dans le milieu familial et d’autre part, très probablement, sous la direction du fils de Guo Yunshen, Guo Yuan.
C’est un secret de polichinelle d’affirmer que Madame Wang Yu Fang, la fille de Wang Xiangzhai, pratiquait et étudiait également cette forme interne de « Qigong taoïste » sous la direction de Guo Yuan mais qu’il valait mieux ne pas en parler ouvertement car l’influence taoïste n’était pas trop appréciée des autorités.
Le Shifu Chen Yang, lors de la rencontre entre Xavier Garnier et cette dernière peu avant son décès à Beijing en avril 2012, affirma que Wang Zemin serait venu dans cette capitale en 1970 afin de remettre une importante donation à l’Ecole qui en avait alors fort besoin.
Wang Zemin avait donc, finalement, conservé de bonnes relations avec le Yiquan-Dachengquan et, dans une certaine mesure, aidé à ce qu’il puisse se développer en Chine. Mais il ne s’en est jamais vanté ni n’en a jamais tiré profit.
Ci-contre Wang Zemin (RPC)ou Wong Tse Min (Hong Kong)
(1909 2002) par Patrice Vaidie
En France il s’agit de Wong Tai Ming
ou Tai Ming Wong.
Lorsque certains se posent donc la question de savoir si San Yiquan est oui ou non du Yiquan ou du Dachengquan je ne puis que répondre négativement car si San Yiquan intègre des principes du Yiquan ou du Dachengquan il est également constitué d’autres principes qui ont été transmis par Wang Zemin en toute connaissance de cause et qui appartiennent à son fond propre.
Il existe donc un lien de parenté mais pas de dépendance.
San Yiquan se veut donc, comme le proposait Li Laoneng à l’origine, un style évolutif, le terme de synthèse ne semblant plus approprié car le synthétique se porte mal alors que le naturel ‘st plus, désormais, qu’un argument de vente, un label, du »green washing ».
Lorsque Xavier Garnier lors de l’inauguration du Mémorial de Li Laoneng à Shenzhou a présenté ce que nous pratiquons en « Interne » le Shifu Zhang Qin Lin a affirmé immédiatement « Il s’agit là du Wuqingquan de Guo Yunshen ! »
Ce qui explique, en partie, le terme Huan de Lien Huan : faire retour à l’origine. Il est donc probable que cette transmission particulière ait été effectuée de Guo Yuan, le fils de Kuo Yunshen, à Wang Zemin mais que ce dernier, par égard à Wang Xiangzhai, ait préféré ne pas en parler. Ce ne sont que des explications puisque seule la pratique demeure essentielle.
J’ai donc été reçu à la HKCMAAL, par le Shifu Tang Sang qui en était le Président, à qui j’ai personnellement transmis les divers courriers et attestations de Wang Zemin me concernant et concernant San Yiquan (à l’époque San I Chuan puisque c’est cette transcription qui était alors utilisée).
Et on m’a assuré que la succession allait être prise en compte officiellement.
Cela a été l’occasion de la remise, dans l’autre sens, de fanions, de médailles, d’épinglettes et d’un magnifique portrait de Ku Yu Cheung, d’époque et encadré, que l’on m’a alors présenté comme la « Paume de Fer ».
J’en ai évidemment déduit, au vu de ma succession, qu’il s’agissait de Kuo Yun Chen, alias la « Paume dévastatrice du Bouddha » (Fo Jun Sha – littéralement Bouddha Paume Tuer – ) et qui passait pour avoir été le Maître de Wang Xiangzhai. Ce portrait m’ayant été remis très officiellement par des gens que j’estimai et respectai, et experts sinon maîtres en la matière de l’Art du Poing, je n’ai donc pas jugé utile de me précipiter dans le premier restaurant venu pour vérifier de qui il s’agissait.
C’est probablement une erreur de jeunesse que de faire confiance à des gens respectables et respectés et qui, de plus, me faisaient ce cadeau assez exceptionnel puisque je n’ai jamais revu un autre original de ce portrait accompagné d’un texte. Je précise originalpuisque les repros-copier-coller à partir de ce même documents sont désormais légion.
Il est vrai, aussi, que j’aurais du faire traduire plus précisément ce texte et me faire confirmer les dates qui y figurent. A condition, évidemment, de savoir qu’il y figure des dates ! J’ai du demander à mon beau-frère chinois, Sang Lok, de me dire ce qui était écrit et il m’a répondu, en effet « C’est très compliqué, c’est un Maître de kung-Fu qui a voyagé dans toute le Chine et qui est très connu et qui se nomme Ku Yu Cheung ».
Donc je n’avait aucune raison de me méfier en quoi que ce soit de l’authenticité de ce portrait que j’ai toujours attribué à Kuo Yun Chen dont la prononciation cantonnaise en usage à Hong Kong est on ne peut plus proche de Gu Yu Jeong. Juste la différenche d’un cheveu sur la langue.
D’où le quiproquo.
Il y a quelques temps certains anciens m’ont parlé de forums où l’on discutait de ci et de ça et d’autre choses encore et où des questions se posaient sur ce portrait et sur l’identité du personnage en question ainsi, d’ailleurs, que sur Wang Zemin. On m’a parlé également d’un ouvrage qui présentait une autre biographie que celle de Kuo.
La biographie de Kuo -ou Guo donc de Guo Yunshen – ainsi que ses dates de naissance et de décès étant déjà, normalement, quelque peu compliquées je n’ai pas tenu compte de ces informations. Je n’ai pas voulu ni souhaité en tenir compte parce que j’avais autre chose à faire. Les forums ne sont pas mon truc car j’y apparais, évidemment, sous mon vrai nom alors que mes interlocuteurs, tels Descartes, avancent masqués – Larvatus Prodeo – et s’expriment principalement à base de points de suspension suivis de points d’exclamation en nombre généralement suffisant pour emplir une brouette à chaque phrase.
Pour autant qu’il existe une phrase.
Et je n’ai, généralement, pas envie d’avoir à me justifier devant un tribunal du pauvre où la connivence et la malveillance semblent bien être le moteur principal des échanges. A l’armée on nomme cela des bruits de chiottes.
Mais, il y a un an, j’ai offert une reproduction de ce portrait à Emmanuel Pedon qui enseigne San Yiquan au sein de l’Association Jin Ding de Reims. Emmanuel pratique la calligraphie chinoise et eut envie, évidemment, de traduire le texte entourant le portrait en question. Chose assez difficile puisqu’il s’agit d’un type particulier de caractères dans une formulation très classique.
La chose étant faite il m’a évidemment appelé pour me confirmer qu’il y avait un couac et que le portrait en question était celui de Gu Ruzhang (alias Gu Ru Zhang, Ku Lu Zan, Ku Yun Cheung et de multiples autres transcriptions) et non celui de Guo Yunshen (alias Guo Yunshen, Guo Yun Shen, Fo Jun Sha, Kuo Yun Cheng) ceci principalement et simplement à cause des dates, précises, figurant sur le document.
Le fameux portrait de Gu Ruzhang (alias Ku Yu Cheung ou Ku Yu Jeong ou Ku Lu Zan)
offert à Georges Charles à Hong Kong en 1979 et comportant le texte traduit ci-dessous.
Le portrait est daté du 1er avril 1937.
Il s’agit ici d’un imprimé sur papier de soie.
Le mieux est, maintenant, de présenter cette traduction effectuée par Emmanuel Pedon aidé par Shi Bo : Entre les crochets des annotations personnelles de Emmanuel Pedon afin de rendre le document et sa traduction plus explicites.
TEXTE :
À partir de l’an 15 de la République de Chine
Après l’incident du 18 septembre [1931, « incident de Mukden », invasion de la Mandchourie par le Japon], je suis remonté vers le nord, j’ai servi l’Armée des Volontaires plus d’une année dans le Hunan, puis j’ai été engagé à l’Institut des Arts Martiaux du Hubei.
L’année dernière je suis revenu dans le Guangdong, à la demande des autorités de cette province.
Vous, mes élèves d’autrefois, êtes maintenant dispersés aux quatre coins du pays et j’éprouve toujours un sentiment profond lorsque je me rappelle notre amitié.
C’est pourquoi je vous envoie à chacun ce petit portrait photographique, que j’accompagne de mes pensées.
Signature
Offert par Gu Ruzhang, bien sincèrement, 1er avril de l’an 25[de la République, donc 1937].
Figure aussi une dédicace (en haut à gauche)
À mes chers collègues, passionnés des arts martiaux, ce souvenir.
* En ce qui me concerne je préfère, par principe, arts du poing ou arts chevaleresques à arts martiaux (note de Georges Charles)
Les dates de Kuo Yunshen : 1822 1902 ne correspondent donc évidemment pas avec ce personnage dont il faut quand même donner quelques précisions.
LA TRADUCTION MOT A MOT DU DOCUMENT DEDICACE PAR GU RUZHANG
Par Emmanuel Pedon – Enseignant San Yiquan et des Arts Classiques du Tao
Document/Photo de Gu Ruzhang (顧汝章)(Ku Yu Cheung en cantonais)
Dédicace
尚武 esprit chevaleresque, celui qui aime et promeut les arts martiaux
仁棣 ren di « prunier bienveillant », formule ancienne pour « aimables/chers collègues »
存念 préserver, conserver, exister / penser à, étudier, mémoire : ici « garder en souvenir » On peut donc traduire, puisque c’est une dédicace :
À mes chers collègues, passionnés des arts martiaux, ce souvenir
Texte
余 je
自 moi-même / depuis
民國 République de Chine (1er janvier 1912)
十五年 An 15
來 arriver, venir
粵 Yuè = Guangdong
以 pour / à cause
國技 technique nationale = arts martiaux
授 enseigner / instruire
諸 chaque / tous
生 élève
九 一八 18 septembre
事變 incident
北上 aller au nord
効力 servir
義勇軍 Armée des Volontaires
逾 au-delà / plus que
年 année
逰 visiter / voyager / nager
湘 Xiang = Hunan
湖 Hu = Hunan ou Hubei
取 prendre / obtenir / choisir
務 affaire / être engagé / se consacrer à
國術館 (guo shu guan) Institut des Arts Martiaux
去歲 année dernière
應 répondre / accepter / promettre
粵 Yuè = Guangdong
省 économiser / province
局 jeu / situation / partie / bureau
之
招 appeler / recruter / enrôler
乃 être / mais, alors, donc
再 à nouveau, encore / revenir
作 faire / apparaître / rédiger / ouvrage
粵 Yuè = Guangdong
逰 faire signe / recruter, enrôler / confesser, admettre
昔日 autrefois
生 élève
徒 disciple ou 徙 se déplacer
多 beaucoup, nombreux
散 (se) disperser
而 et / mais, cependant, tandis que
之
四方 de toutes parts
全 complet(ement) / tout
每 chacun, chaque
念 lire, étudier / penser
舊 ancien / vieux / passé / vieil ami
快 rapide / vite / bientôt / joyeux, content
不無 non sans (ne pas + ne pas)
感慨系之 soupirer avec un profond sentiment
困 (à) cause (de) / raison
各 chaque, chacun
寄 envoyer, expédier / confier
以 pour / à cause
小照 petit portrait photographique
聊 simplement, juste
作 en guise de
晤 se voir, se rencontrer
而 et / mais, cependant, tandis que
之 尔 formule classique pour faire baisser le ton, exclamation qui ne se traduit pas
NB. Formellement, le texte ne s’adresse pas à un interlocuteur, mais les tournures font apparaître l’intention du « (à) vous ».
À partir de l’an 15 de la République de Chine [donc en 1927], je vous ai enseigné les arts martiaux dans la province du Guangdong. Après l’incident du 18 septembre [1931, « incident de Mukden », invasion de la Mandchourie par le Japon], je suis remonté vers le nord, j’ai servi l’Armée des Volontaires plus d’une année dans le Hunan, puis j’ai été engagé à l’Institut des Arts Martiaux du Hubei*. L’année dernière je suis revenu dans le Guangdong, à la demande des autorités de cette province.
Vous, mes élèves d’autrefois, êtes maintenant dispersés aux quatre coins du pays et j’éprouve toujours un sentiment profond lorsque je me rappelle notre amitié. C’est pourquoi je vous envoie à chacun ce petit portrait photographique, que j’accompagne de mes pensées.
Signature
Offert par Gu Ruzhang, bien sincèrement, 1er avril de l’an 25 [de la République, donc 1937]
* le caractère 湖 a plusieurs sens, dont un désignant le Hunan ou le Hubei. J’ai trouvé sur le site
http://www.plumpub.com/info/Bios/bio_guruzhang.htm
le fait qu’en 1932 Gu était bien dans le Hubei comme chef instructeur.
Par contre ce site dit que Gu retourne dans le Guangdong en 1934 alors que dans son texte il parle de « l’année dernière » donc 1936.
Emmanuel Pedon
Gu Ruzhang ou Ku Lu Zan ou Ku Yu Cheung (1894 1952)
Le portrait du Maître Gu Ruzhang ou Ku Yu Cheung ou Ku Yu Jeong (1894 1952) Portrait réalisé en 1930 donc à l’âge de 36 ans. Gu Ruzhang (Gu Ru Zhang ; Ku Lu Zan ; Ku Yu Cheung) est né en 1894 près de Nanjing (Nankin) dans la province du Jiangsu (Kiangsi ou Kiangsu).
Son père Gu Lizhi (Ku Lei Chi ; Gu Lei Chi) dirigeait une compagnie d’assurance qui, comme souvent en Chine, fournissait à ses riches clients des gardes du corps et des convoyeurs de fonds recrutés parmi des pratiquants de l’art du poing chevronnés.
Ce fut donc l’environnement idéal pour étudier et pratiquer cet art du poing chinois (Zhongguoquan) et à 11 ans il maîtrisait déjà 10 formes de Shaolin du Nord (Pei Shaolinquan) nommées « Dix Préceptes de Shaolin » :
1/ Kai Men : Ouvrir les Portes
2/ Lie Lu : Suivre le passage
3/ Zuo Ma : S’asseoir sur le Cheval
4/ Quan Xin : pénétrer le Coeur
5/ Wu Yi : capacité chevaleresque
6/ Duan Du: Frappe courte
7/ Mei Hua : Fleur de Prunier
8/ Ba Bu San Quan : Huit PasTrois Poings
9/ Lian Huan Tui : Coup de pied continu en cercle ou Liaison des Coups de Oied en Cercle.
10/ Quan Zhang Shi Fa : Pratique de la Forme médiane
Après le décès de son père il entreprit un périple dans plusieurs provinces de Chine afin de parfaire sa pratique auprès d’experts réputés dans l’art du poing.
Et il en rencontra de nombreux, le Général Li Kin Lam, Yang Bian Hou, Sun Lu Tang, Wang Lai Shan, Yan Ji Wen, Chen Chan Sheng.
C’est pendant cette période qu’il découvrit et s’entraina à la fameuse « paume de la limaille de fer » qui fera sa réputation et qui lui vaudra son principal surnom « Guo à la Paume de Fer ».
Un entraînement intensif lui permit, lors des démonstrations publiques, de réaliser pas mal de tours de force comme de tordre une barre de fer autour de son poignet, de se faire rouler dessus par une voiture lourdement chargée, de se faire casser des pavés ou des galets sur la tête, exploits qui seront relayés par la presse d’époque.
Mais son tour de force le plus connu, et également photographié, était de fendre une pile de briques d’un seul coup de paume.
Le Maître Gu Ruzhang dans une de ses démonstrations spectaculaires.
Celui qui tient le marteau est Yan Xiang Wu (alias Yin Sheung Mo)
Pour la petite histoire la pratiquant qui va briser d’un coup de marteau la pierre qu’il tient sur la tête n’est autre que Yan Xiang Wu (Yin Sheung Mo) qui lui succèdera à la tête de son école des Arts du Poing du Guangzhou, autrement dit des Arts Martiaux Cantonnais !
Yan Xiang Wu décèdera à Hong Kong en 1971 et à cette époque sa réputation égalait celle de Yip Man.
Sur la même page du mémorial de la HKCMAAL figurent Yip Man et Yin Sheung Mo (Yan Xiang Xu). Dans le film sur Yip Man on a parfois un peu l’impression, quand même, que le « boxeur du Nord » ressemble quelque peu à Gu !
Mais Gu Ruzhang était principalement réputé dans les « arts de poing du Nord » (Beiquanfa) et fut, justement, un de ceux qui fit connaître ces styles dans le Sud de la Chine. Il acquit, à juste titre, la renommée des « Cinq Tigres du Nord voyageant dans le Sud » à savoir : Gu Ruzhang
Wan Lai Sheng
Fu Zhen Song
Wang Shao Shan
Li Xian Wu Mais il pratiqua et enseigna également l’interne dont la « Boxe Evolutive » Zi Ran (Tseu Jan) et le Poing des Six Harmonies (Liu He Quan) parfois attribué à YueFei (1103 1142) ainsi que diverses méthodes de Tao-Yin Chi Kung (Daoyin Qigong). Dans son institut des Arts Martiaux du Guanzhou il enseignait donc :
Les Dix Préceptes (Voies) de Shaolin
Les Dix Préceptes des Jambes Volantes (Tan Tui)
Le Double Sabre de la Fleur de Prunier
La Lance arrêtant le Soleil Levant
Les 24 formes du Sabre du Dragon
L’Epée de Damo
Le Bâton des Cinq Tigres capturant les moutons
Les Six Parties du Neigong de la Petite Ceinture d’Or
La Paume de la Limaille de Fer
Hormis ses démonstrations spectaculaires Gu releva plusieurs défis dont il se tira toujours plus qu’honorablement. Un jour un Russe qui possédait un énorme cheval de trait lui proposa une importante somme d’argent si il arrivait à supporter l’une de ses ruades.
Guo savait que cela avait déjà provoqué la mort de plusieurs pratiquants qui avaient relevé ce défi imbécile mais il accepta. Il reçu la ruade, recula mais resta debout sans sembler en avoir été affecté et toucha la somme promise qu’il reversa immédiatement à une oeuvre d’entraide. Mais sous le prétexte de flatter le cheval il s’en approcha de côté et lui délivra une de ses fameuses paumes. Le cheval tomba immédiatement et on dut constater sa mort.
Gu fit comprendre au Russe qu’il aurait préféré le frapper lui plutôt que son cheval qui n’était pour rien dans cette affaire de brutes et le Russe se le tint pour dit et disparut sans faire d’histoire. Le vétérinaire qui examina le cheval affirma que plusieurs de ses organes avaient éclaté sous le choc et que l’animal était donc mort sur le coup sans même s’en rendre compte. Pendant un moment Gu hérita du surnom du « Maître qui tue un cheval d’une tape ».
Ce faisant Gu était d’un naturel fort sympathique et même modeste et regrettait souvent devant ses anciens de devoir faire le bateleur pour convaincre de nouveaux adeptes. Le texte présenté sur le document montre cet aspect du personnage qui conserva toujours des relations amicales et bienveillantes avec ses disciples ce qui, alors, était chose rare.
Les circonstances de sa mort, en 1952, sont sujettes à caution puisque certains affirment qu’il mourut d’une mauvaise pneumonie alors que d’autres prétendent qu’il fut emprisonné par les autorités communistes puis fusillé. Une stèle souvenir a été érigée en son honneur il y a quelques années. Mais en tous cas Gu était un patriote qui n’hésita pas à aller, de son plein gré, combattre les Japonais qui avaient envahi la Mandchourie puis à mettre ses compétences au service de la patrie en entraînant des résistants à l’occupation niponne.
Ce dont il ne fut pas remercié.
Le mémorial dédié au Maître Gu Ruzhang ( Ku Yu Jeong) « La Paume d’acier »
Une statue de bronze représentant Gu Ruzhang (Ku Yu Jeong) sous la forme d’un des Arhats de Lohan : il est entré dans la légende !
En guise de conclusion et d’épitaphe à Gu Ruzhang
Pendant plus de trente années le portrait de Gu Ruzhang a été présent dans la pratique, l’enseignement, la transmission de San Yiquan. Il a donc été présent pendant tout ce temps avec nous, dans les moments difficiles comme dans les moments heureux et nous a toujours suivi, sinon précédés.
Nous l’avons donc, au propre et au figuré, encensé et souvent salué avec le plus grand respect, lui demandant, parfois, d’intercéder favorablement auprès des Autorités Célestes. Il a également été présent aux Rituels du Nouvel an et cela depuis des lustres et, parmi nos pratiquants, nos anciens, nos enseignants, chacun connaît son visage bienveillant et quelque peu lointain.
Son influence a donc été morale et spirituelle pour ne pas dire céleste, ce qui vaut bien, on en conviendra, une influence simplement formelle pour ne pas dire sportive.
Et nous devrions, comme ça, nous en détacher du jour au lendemain sous le simple prétexte d’un quiproquo ? Et pourquoi pas mettre le portrait à la poubelle puisque, visiblement, il n’intéresse pas grand monde si ce n’est dans la mauvaise polémique.
En tant que Chef d’Ecole de San Yiquan je ne peux pas m’y résoudre et, au contraire, pense qu’il n’en mérite que plus de respect et qu’il pourra aider les plus jeunes dans leur pratique et dans leurs recherches et qu’il peut être un exemple pour les enseignants car il s’agissait, avant tout, d’un type droit.
« Gishi ! » aurait dit Kennichi Sawai, le condisciple de Wang Zemin avec lequel il eut beaucoup d’échanges.
Il gardera donc sa place avec le Nom qui lui revient et qui sera, peu à peu, corrigé sur tous les documents de l’Ecole afin que « l’on rende à César ce qui est à César et à chacun ce qui lui est du ».
Honni soit qui mal y pense ! Mais nous rendrons également à Guo Yunshen la place qui lui revient de plein droit en faisant figurer désormais le portrait qui est gravé sur sa pierre tombale.
Le portrait de Guo Yunshen tel qu’il figure sur sa pierre tombale C’est le seul portrait fiable que l’on dispose de lui à ce jour.
En précisant, aussi, que nous avons effectué une souscription pour, justement, réhabiliter et restaurer cette même pierre tombale qui avait été oubliée dans un dépôt municipal où elle gisait parmi d’autres pierres qui allaient, probablement, être utilisées comme matériaux de construction sans autre forme de procès.
Sur le plan du respect des maîtres que nous honorons nous n’avons pas trop de leçons à recevoir mais nous ne souhaitons pas, non plus, en donner.
Et pourtant il y aurait de quoi dire et écrire. Il aurait été dommage que le quiproquo se transforme en statut quo et que la constatation de l’erreur soit simplement inutile et n’apporte rien, que des ragots, à la pratique, à son enseignement et à sa transmission.
Quelques explications sur le portrait de Gu Ruzhang et les sceaux de Georges Charles qui y sont apposés depuis des lustres
Bis repetita avec le document originel sur lequel on note la présence des sceaux personnels de Georges Charles. Le portrait originel dans son encadrement actuel avec ses sceaux !
Propriété G.C.
A gauche : le portrait tel qu’il apparaît dans « Hsing I Chuan – L’art interne du Kung fu Wushu » par Georges Charles Rditions Sedirep 1986 page 22.
A droite : Le même portrait tel qu’il apparait dans l’ouvrage d’un autre auteur sur le Tacheng Chuan (Trédaniel 1995)
On note étrangement la présence des mêmes sceaux en haut à gauche (Wu Guan – Ecole d’Arts Martiaux -) en bas à gauche Charles et en chinois Cha Lishi.
Le sceau « Mu Kwoon » Wu Guan du document original
Le sceau « Charles Cha Lishi » du document originel
Les deux sceaux de Georges Charles – Wu Guan et Charles Cha Lishi – tels qu’ils apparaissent sur un document de la HKCMAAL avec Tang Sang.
Le Président de la HKCMAAL, Tang Sang, élève Senior de Yip Man, qui m’a remis le portrait de Gu Ruzhang en 1979.
Le certificat d’enregistrement de la HKCMAAL daté du 8 août 1969
Il en résulte simplement que ce document appartenant à Georges Charles et publié, notamment, dans son ouvrage Hsing I Chuan paru en 1986 à la Sedirep, a servi de matrice à pas mal de monde sans, évidemment, que la moindre source soit donnée.
Ce fait a été l’objet, à l’époque de la publication d’un ouvrage comportant ce portrait aux éditions Trédaniel, d’une démarche juridique et d’un arrangement amiable de Georges Charles sans contrepartie dont je conserve les archives.
Je suis donc très flatté de l’honneur que l’on me fait en publiant mes recherches, même et surtout si elles sont assorties d’une erreur, mais quelque peu étonné de n’être pas cité comme êtant à l’origine du document en question. Surtout lorsque’une contremarque personnelle portant mon nom en caractères chinois et en lettres occidentales est visible sur le document.
Bien sur il est possible, avec un bon programme, de séparer l’image du texte et d’utiliser cette image seule, sans en citer la source, dans des publications et des pages Web puis de crier au charron.
C’est possible mais quand même pas très loyal ni même très légal.
Et même pas trop moral. Mais par les temps qui courent !
Par la même ocasion il est possible de jeter un oeil sur les archives du « Poing-Paume » (Ming) de l’Ecole San Yiquan puisque ce logo a, également, été amplement pillé sans qu’aucune référence ne soit faite quant à son origine.
Et avant 1969 ? C’était quoi le Kung Fu ?
Avant 1969, année érotique selon Gainsbourg, il y a prescription parce que le « Kung-Fu » ou « Gong-Fou » pour les Guailo, pardon les amis Occidentaux, si on excepte Li Xiaolong (Li Siu Lung), alias Bruce Lee, c’était quand même pas terrible.
Ou plutôt si, c’était terrible et même formidable.
Ces quelques archives de Georges Charles vous feront comprendre, à l’époque où vous étiez encore pour la plupart dans les limbes (et où Internet n’existait pas !), pourquoi j’ai recherché, et trouvé, autre chose alors qu’on ne se précipitait pas trop au portillon.
Alors les erreurs que j’ai pu commettre il y a plus de trente ans méritent désormais la prescription !
Ah ah ! Cet original de 1963 avec Bruce Lee en pyjama vous ne l’aviez jamais vu.
Rassurez vous, moi je l’ai lu à peu près à cette époque !
Bon, on apprenait surtout à y casser des briques !
Les spécialistes apprécieront et reconnaîtront le casseur.
Mais le fin du fin était vendu par correspondance !
Et il convenait alors de s’engager en signant (avec son sang !) une charte pas piquée des hannetons
Et un peu de littérature sur l’initiation !
Même le Dragon il est ringard au possible !
Et il fallait bien un écusson !
The Big Boss du Dragon Noir, le Comte Dante lui-même !
Par les temps qui courent on évitera les plaisanteries cantonnaises douteuses sur les « ciseaux d’argent » des coiffeurs pour dames « Fa quan Sao Toi » ! (mains fleuries et jambes qui tricotent).
Mais il peut aussi casser des briques, le bougre !
Le Kung-fu c’est « la danse de la mort » dixit Count Dante !
Et pif, et paf et couic !
Une planche technique pour apprécier de quoi il s’agit.
D’autre part on voit pas mieux, ou pire, sur Internet !
La version américaine du Kung-Fu Karaté ne vaut pas mieux !
Cassez des briques en 100 jours ! Évidemment c’est un autre époque où en France le Karaté commençait à peine à exister et où en Chine on avait tout balancé aux orties sous le prétexte que tout cela n’était qu’un ramassis de superstitions des temps révolus.
Heureusement que quelques abrutis rétrogrades, dont je faisais alors partie, on recherché une autre version des choses, ou un autre versant de la montagne. Et c’était pas le plus facile. On m’accuse parfois de toujours répéter la même chose, ce qui, à, mon avis est plus un compliment qu’une critique et je continuerai donc à le répéter comme Li Laoneng, Guo Yunshen, Wang Xiangzhai, Wang Zemin et très probablement Gu Ruzhang :
« Le secret de la pratique réside dans la pratique et dans elle seule ». L’important c’est la pratique. Le reste ce n’est que des alentours de la pratique. Et ces alentours, comme Philippe Noiret pour ceux du cinéma, m’ennuient profondément.