Textes Classiques & Diététique

En occident lorsqu’il est question de diététique on se réfère généralement au dernier régime à la mode créé pour la circonstance par une vedette obèse qui vient de perdre quelques Kg. Et généralement une bonne partie de sa santé. Mais qui publie un best-seller.

Ou par un Ayatollah de l’interdit qui s’évertue à vous faire croire que tout ce que vous mangez habituellement est illégal, immoral et fait grossir. Plus les régimes prolifèrent plus le pourcentage d’obèses augmente. Sans parler des accidents causés par ces régimes.

En Chine les références concernant la diététique se trouvent dans les plus grands classiques. Malheureusement, en Occident, ces classiques chinois sont étudiés par les philosophes et non les cuisiniers !

 

LES CLASSIQUES CHINOIS ET LA DIETETIQUE CHINOISE YINSHI : L’ART MILLENAIRE DE LA NUTRITION

Les bases classiques 

 

Ce plat chinois, le porc à la sauce rouge, date de l’époque de Confucius. C’est l’un des rares plats chinois où il est autorisé de « salir » le riz blanc en le mélangeant avec la sauce. Ce qui les autres plats, excepté le « Poulet des Ancêtres » est contraire aux règles de la bienséance.

La diététique chinoise (Yinshi) suscite bien des questions et motive bien des hypothèses puisqu’elle est parfois, à tort, confondue avec la macrobiotique de Georges Osawa (Nyoiti Sakurasawa) ou ses adaptations plus modernes (Michio Kushi et divers  disciples).

Ce faisant, cette diététique est parfois décriée, comme le fait Etiemble, dans sa préface aux « Philosophes taoïstes » parus à La Pléiade (NRF Gallimard) :

« Dans l’hebdomadaire le plus lu, je le crains, de nos compatriotes du sexe féminin, dans l’un des plus lus, en tous cas, une zozote enseignait naguère comment pour se maintenir en forme, en formes je suppose agréablement féminines, elle yinisait et yanguisait son alimentation. A quoi un médecin répliquait bientôt qu’à ce régime là, régime censément, insencément de « longue vie », elle était bonne, et ses éventuelles sectatrices, pour retourner sans tarder à son cher Tao : pour mourir ».

Ce que l’on sait moins, et que Etiemble ignorait également et superbement, c’est que l’un des plus grands classiques de la Chine antique, le LIJI (Li Ki ou Livre des Rites) attribué à Confucius, traite justement de diététique à de nombreuses reprises, allant même jusqu’à donner des recettes particulières.

Maître Kong est-il donc un « Zozo »  ?

Lui arrivait-il aussi, de « yiniser ou de yanguiser » son alimentation ce qui lui aurait nécessairement valu les foudres de notre facultatif de service ? Précisons maintenant ce que Chang Tao Ling (Zhang Daoling), un célèbre taoïste et alchimiste de l’Ecole du Ling Pao disait, au premier siècle de notre ère, du Yin/Yang:

« Yin/Yang représente à la fois la dualité, la complémentarité et l’équilibre.
L’un ne peut exister sans l’autre.
Restreindre l’un correspond à affaiblir l’autre.
Accroître l’un au détriment de l’autre met les deux en péril »

Dominante rouge pour un repas classique d’été ! Préparé par un expert : Tommy Shan du Bonheur du Palais à Bordeaux Il n’existe pas de « plat équilibré » si le repas n’est pas équilibré ! Un plat équilibré entre deux plats médiocres rend le repas médiocre.

Quelques extraits choisis du Livre des Rites (Liji ou Li Ki) vous permettront certainement de comprendre que la nutrition était réellement quelque chose de considéré comme très important et non une plaisanterie de zozo.

Il est important de préciser, enfin, que la plupart des praticiens en  médecine chinoise traditionnelle (MTC) se réfèrent presque uniquement au « Neijing Suwen » le fameux « Canon de la Médecine Interne de l’Empereur Jaune ». Il s’agit en fait d’un ouvrage important, sinon majeur, en ce qui concerne la médecine. Mais il convient de ne pas perdre de vue que la plupart des principes qu’il expose provient des classiques comme le Liji (Livre des Rites), le Livre du Rituel (Yili), le Livre de l’Histoire…

Tous ces extraits qui suivent sont donc issus de « LI KI – Mémoires sur les Bienséances et les Cérémonies » -attribué en partie à Confucius, Kongzi donc « Le Maître Kong »- par Séraphin Couvreur S.J. Annales du Musée Guimet CATHASIA – Série culturelle des Hautes Etudes de Tien Tsin.

Ensuite, nous reviendrons à d’autres textes et, notamment, le Neijing Suwen. Mais à tout seigneur, tout honneur, puisque le « Livre des Rites », justement attribué en partie à Confucius, fut pendant près de deux millénaires la référence absolue en ce qui concerne la civilisation chinoise.

Le repas a été convivial : c’est important !

 

En préambule :

« Quelle que savoureuse que soit une viande, celui qui n’en n’a pas mangé n’en connaît pas la bonté. Quelle que parfaite que soit une doctrine celui qui ne la pratique pas n’en connaît pas l’excellence »

LIJI Tome II 1 Chapitre XVI « Mémoire sur les Ecoles ».

 

« Les émanations de la Terre montent et celles du Ciel descendent. Les deux principes Yin/yang entrent en contact et le Ciel et la Terre exercent leur action réciproque. La naissance des différents êtres est provoquée par le murmure et le fracas soudain de l’éclair et du tonnerre et accéléré par le vent et la pluie. Ils croissent sous l’influence des quatre saisons et reçoivent la chaleur du soleil et la lumière de la lune. Ainsi s’opèrent toutes les transformations » .

LIJI Tome II 1 Chapitre XVII « Mémoire sur les Ecoles ».

 

Les principes essentiels :

« Toutes les boissons développent le principe Yang et tous les aliments le principe Yin »

LIJI I 1 Chapitre IX article 1.

On constate donc rapidement que, suivant Etiemble, Confucius lui-même est probablement « une zozote » puisqu’il répartit les aliments et les boissons en Yang et Yin !

« Les cinq saveurs qui se combinent de six manières différentes pour former les douze espèces de mets se succèdent sans interruption et chacune d’elles est à son tour la base de l’alimentation » « Les cinq saveurs sont la saveur acide, la saveur amère, la saveur âcre, la saveur du sel, la saveur douce. La première convient au printemps, la deuxième en été, la quatrième en automne, la cinquième en hiver. La saveur douce convient également en toutes les saisons »

LIJI I 2 Chapitre VII article 3.

« Les règles prescrivent de se conformer aux saisons de l’année, d’offrir des produits du pays d’où l’on est, de s’accommoder aux désirs des esprits, aux inclinaisons des hommes, à la nature des choses. Ainsi chaque saison a ses productions particulières ; chaque terrain a ses plantes favorites. Ce que la saison n’a pas produit, ce que le sol n’a pas nourri, un homme sage ne l’offre pas. Si les habitants d’une montagne offraient du poisson ou des tortues de mer, si les habitants du bord d’un lac offraient des cerfs ou des sangliers, un sage dirait qu’ils ne connaissent pas les règles » .

LIJI I 2 Chapitre VIII article 1

Le Tofu (Da Fu) ou « Grand Bonheur » réjouit, en Chine comme au Japon, les végétariens depuis près de deux millénaires. On vient à peine de le redécouvrir !

«Pour ce qui concerne ces règles il faut considérer en premier lieu le temps, en second lieu l’ordre établi par la nature, en troisième lieu la qualité, en quatrième lieu ce qui convient à la qualité des personnes et des circonstances, en cinquième lieu la proportion »

LIJI I 2 Chapitre VIII article 1

« A la cour impériale les légumes conservés dans le sel et servis dans des vases en bois ordinaire étaient des plantes aquatiques qui avaient joui de l’influence harmonieuse des quatre saisons. Les viandes hachées conservées dans le vinaigre qui étaient contenues dans ces vases étaient des viandes d’animaux terrestres ayant été élevés avec précaution. Les vases de bois contenaient également des produits de la terre, des légumes provenant de terrains secs et sains. D’autres hachis au vinaigre se composaient de produits aquatiques et de poissons. Les vases de bambou contenaient soit des produits aquatiques soit des produits provenant de terrains secs. On ne se permettait pas d’offrir des choses de qualité ordinaire ou de mauvaise qualité, ni d’attacher plus d’importance au plus grand nombre au détriment de la qualité. On montrait ainsi qu’on voulait entrer en communication avec les esprits glorieux et non seulement préparer un festin » .

LIJI I 2  Chapitre 9 article 2

« Dans les sacrifices et les repas officiels les vins et les liqueurs les plus exquis venaient après l’eau pure ; ainsi on rendait honneur à l’eau qui est la base de tous les aliments. Ainsi dans le bouillon, principal on n’ajoutait aucun condiment parce qu’on aimait qu’il fut sans apprêt superflu ».

LIJI I 2 Chapitre 9 article 2

« Les condiments de bouillies correspondant au printemps étaient tièdes ; ceux des potages correspondant à l’été étaient chauds ; ceux des viandes hachées et en conserve correspondant à l’automne étaient frais ; ceux des boissons correspondant à l’hiver étaient froids. Dans tous ces mélanges, au printemps il entrait beaucoup d’acides ; en été beaucoup d’amers ; en automne beaucoup de substances âcres ; en hiver beaucoup de substances salées. On y ajoutait également en fin de chaque saison des substances onctueuses ou sucrées ».

LIJI 1 2 Chapitre 10 article 1

Les pousses de soja : un légume tout simple !

Les explications complémentaires sur le service des plats et la table :

« Le riz glutineux allait bien avec la viande de bœuf, le millet glutineux avec la viande de mouton, le millet blanc avec la viande de porc, le blé avec la chair de l’oie, le riz avec la volaille, le riz violet avec le poisson. Il convenait de manger au printemps l’agneau et le cochon de lait, en été le faisan et le poisson séché, en automne le veau et le mouton, en hiver le poisson frais et l’oie. On servait également des tranches de bœuf aromatisées au gingembre et des tranches de port aromatisées au poivre et à la cannelle. Il y avait, en outre, de petits oiseaux, des cailles, des champignons nés sur les arbres ou sur le sol, des châtaignes d’eau, des pédoncules et des racines douces, des légumes verts et colorés, des concombres, des pêches, plusieurs sortes des prunes, des poires et divers autres fruits frais et séchés.

Lorsqu’il y avait du hachis on ne servait pas de viande séchée. A partir de soixante ans on avait droit à chaque repas à un plat particulier bien préparé. Au hachis on mêlait des oignons au printemps r$et de la moutarde en automne. Au cochon de lait on ajoutait des poireaux au printemps et des renouées (navets) en automne. La brème et la perche étaient cuites à la vapeur, les poulets rôtis ou cuits à l’étouffée. A ces mets on ajoutait, en fonction des saisons, des herbes odoriférantes et des épices. On retirait de la viande les os et les tendons, on secouait les poissons pour vois si ils étaient frais.

La viande crue était mise en hachis ou en très fines tranches comme des feuilles. A partir de soixante dix ans on préparait des buffets spécifiques permettant de régénérer l’énergie sans fatiguer le corps. Les hommes de cinquante ans consommaient des grains de qualité supérieure. Ceux de soixante ans des viandes de qualité supérieures. Ceux de soixante dix ans recevaient des aliments délicats comme les ailerons de requin et les nids d’hirondelles. A quatre vingt dix ans toujours des friandises. Les vieillards de plus de quatre vingt dix ans avaient toujours dans leurs chambres des liqueurs et des friandises légères. Lorsque les vieillards quittaient leurs foyers il convenait de leur envoyer des aliment délicats et des liqueurs fines partout où ils allaient. Pour préparer la riche nourriture destinée aux vieillards on faisait frire la viande qui avait été conservée dans le sel, on la mettait sur un plat de bouillie de millet et on arrosait de bouillon. On leur faisait également cuire des aliments enveloppés dans une carapace d’argile afin d’en conserver tous les sucs et toute l’essence vitale ».

LIJI 2 1 Chapitre 10 article 2

« Dans les festins à la cour des princes feudataires les grains qui faisaient partie des aliments étaient le millet glutineux, le millet non glutineux, le gros millet blanc, le riz. Les uns et les autres avaient été récoltés à maturité parfaite. Les mets composés de viande étaient sur la première rangée le bouillon de bœuf, le bouillon de mouton, le bouillon de porc, la viande hachée assaisonnée au vinaigre, la viande de bœuf rôtie. Sur la deuxième rangée la viande conservée en saumure ou au vinaigre, la viande de bœuf coupée en morceau, la viande de bœuf hachée. Sur la troisième rangée la viande de mouton rôtie, la viande de mouton coupée en morceaux, la viande de porc rôtie. Sur la quatrième rangée la viande de porc coupée en morceau, la moutarde en branche, le poisson et le poisson haché.

Sur la cinquième rangée les faisans, les lièvres, les cailles, les perdrix. Les boissons étaient d’abord deux espèces de liqueurs douces, l’une claire l’autre trouble, toutes deux extraites du riz et du millet glutineux. Parfois la liqueur douce était remplacée par une bouillie très claire. Les autres boissons étaient de l’eau vinaigrée, de l’eau chaude parfumée, du jus de prunes, le jus de divers fruits mêlés ensemble et deux sortes de liqueur dont l’une était incolore et l’autre blanchâtre. Les friandises étaient des galettes faites de farine de blé ou de millet grillé et des gâteaux de farine de blé ou de riz. Comme mets délicats il y avait de la chair d’escargots hachée et conservée dans le vinaigre, la bouillie de riz que l’on mêlait avec du bouillon de viande séchée et le bouillon de poulet, la bouillie de riz glutineux grossièrement moulu que l’on mêlait avec le bouillon. A toutes ces sortes de mets on pouvait ajouter un ragoût composé de viande et de riz mais on n’y mêlait pas de renouée ou d’oseille. On faisait cuire des cochons de lait farcis de renouées avec des laiterons, des poulets farcis avec de la viande hachée, des poissons également farcis mais de légumes ou avec des œufs de poissons. On mangeait la viande aromatisée et séchée avec des œufs conservés dans le sel ou la cendre, le bouillon de viande séchée avec de la viande de lièvre ou de la viande de cerf, le hachis de poisson avec de la moutarde fraîche, de la chair crue marinée au vinaigre. »

LIJI I 2 Chapitre 10 article 1

Le croustillant bien frit dans une huile bien propre nourrit le foie ! N’en déplaise aux pisse-vinaigres de tous poils.

« Chaque fois que l’on sert un repas on doit, d’après l’usage, placer les viandes non désossées sur la partie gauche de la natte, l es viandes coupées en petits morceaux sur la partie droite, le riz à gauche des convives, les potages à leur droite, les viandes hachées et rôties au delà, le vinaigre et la saumure en deçà, les oignons crus et cuits à l’extrémité gauche, les boissons fermentées ou non à droite. En plaçant les tranches de viande séchées, on tourne vers la gauche des convives la partie la plus sèche, donc la plus grosse extrémité, et vers la droite l’autre extrémité. Après qu’on ait mangé trois sortes de mets, du riz, de la viande séchée et du rôti, le maître de maison donnant l’exemple, on mange alors de la viande coupée en morceaux puis toutes les viandes non désossées et enfin les autres plats.

En mangeant avec d’autres ne vous hâtez pas de vous rassasier. Lorsque vous mangez avec d’autres le même plat, n’ayez pas les mains humides de sueur. Ne roulez pas le riz en boulettes pour en saisir et en manger beaucoup à la fois. Ne mangez pas immodérément. N’avalez pas gloutonnement un grande quantité de bouillon. Ne mangez pas en faisant du bruit avec la langue ou les lèvres. Ne remettez pas dans un plat commun les aliments que vous avez touchés ou goûtés. Ne jetez pas les os aux chiens. Ne saisissez pas les morceaux comme une proie que vous ne vouliez pas lâcher. Ne lancez pas le riz en l’air pour le faire refroidir. En mangeant le millet ou d’autres petites céréales n’utilisez pas les baguettes mais la cuillère. Ne buvez pas le bouillon sans mâcher les herbes et aliments qu’il contient. Si il y a des herbes ou des aliments dans le bouillon on se sert de baguettes et de la cuillère. Si il n’y en a pas on ne se sert que de la cuillère. N’ajoutez aucun assaisonnement, ce serait montrer que le plat est mal préparé. Ne vous curez pas les dents. Ne buvez pas la saumure ou la sauce. Les viandes bouillies se déchirent avec les dents et non avec les doigts. N’avalez pas de morceaux de rôti sans les mâcher. Après les grandes pluies on n’offre ni poisson ni tortue parce qu’ils abondent et se vendent à bas prix. Les restes de nourriture peuvent être emportés mais ne peuvent être offerts aux défunts » .

LIJI I 1 Article 3.

« Lorsque l’on sert un poisson bouilli, grillé ou frit on tourne la queue vers celui à qui il est présenté. On met à sa droite le ventre en hiver et à sa gauche le dos en été. Le bec des amphores et des cruches est également tourné vers l’invité de marque ou le principal convive »

LIJI II 1 Chapitre 15 article 43.

quelques entrées froides mais classiques pour mélanger textures,
saveurs, couleurs..et énergies.

 

En conclusion :

« Confucius aimait que sa bouillie fut faite d’un riz très pur et son hachis composé de viande hachée très fin. Il ne mangeait pas de bouillie qui était moisie ou gâtée ni de poisson ou de viande qui commençaient à se corrompre. Il ne mangeait pas d’un met qui avait perdu sa couleur ou son odeur habituelle. Il ne mangeait pas un plat qui n’avait pas été cuit suivant les règles ou un fruit qui n’était pas assez mur. Il ne mangeait pas ce qui avait été mal découpé ou de manière irrégulière, ni ce qui n’avait pas été assaisonné de manière convenable. Il ne mangeait rien de ce qui pouvait nuire à sa santé. Lors même que les viandes abondaient il ne prenait pas plus de viande que de nourriture végétale. Il ne mangeait jamais avec excès. Les quantités de boissons fermentées dont il usait n’allaient jamais jusqu’à lui troubler la raison et encore moins la démarche. Il ne voulait ni de viande, ni de légumes, ni de poisson qui eussent été achetés chez un inconnu de peur qu’ils soient corrompus ou malsains. En prenant ses repas il ne discutait aucune question. Ce sage aux heures de repas s’occupait de manger ; aux heures de repos il se reposait. Même lorsqu’il n’avait sur sa table qu’une nourriture grossière et du bouillon aux herbes, il ne manquait jamais d’en remercier ses ancêtres et de faire une offrande respectueuse aux âmes des défunts. Quand le prince lui envoyait une nourriture préparée, il la goûtait. Quand le prince lui envoyait de la nourriture crue, il la faisait cuire. Lorsque le prince lui envoyait un animal vivant il l’élevait et le nourrissait. Lorsqu’il mangeait à coté du prince, Confucius goûtait les mets non pas comme si il était un convive mais un chef cuisinier. Ainsi il pouvait le conseiller utilement ».

LUNYU – Les Entretiens – Livre V Chapitre X.

Le Neijing Suwen : La Bible de la Médecine Chinoise : incontournable !

 

L’Empereur Jaune dans l’imaginaire des Chinois actuels On lui attribue la rédaction de la bible de la médecine chinoise.

Quelques extraits du Neijing Suwen (Nei King Siou Ouen) ou « Canon de la Médecine Interne de l’Empereur Jaune. Cet ouvrage est toujours considéré comme la « Bible » de la médecine chinoise donc de l’acupuncture. Mais également de la nutrition comme on va le constater maintenant.

« L’énergie de l’homme correspond au cinq éléments : le Feu, le Métal, l’Eau, le Bois, la Terre. Ce sont, sur terre, les Cinq Saveurs qui entretiennent ces Cinq Energies et particulièrement l’énergie de tendance Yin. L’aigre, l’acide convient au Foie, l’amer va au coeur, le doux et le rafraîchissant convient à la Rate, le piquant et l’âcre gagne les poumons, le salé va aux reins. Mais l’aliment trop aigre blesse la rate, le trop salé nuit à l’énergie du coeur, le trop sucré en excès nuit aux reins, le trop amer aux poumons, le trop piquant au foie »

Neijing III Energie céleste et terrestre

« La nourriture piquante qui convient aux poumons et celle douce qui convient à la rate s’exhalent, se dispersent et se transforment en Yang. La nourriture aigre qui convient au foie et celle amère qui convient au coeur descendent, se concentrent et se transforment en Yin. L’excès de Yin rend ceux qui sont de tendance Yang malades. L’excès de Yang épuise ceux qui sont de tendance Yin. Un bon équilibre entre Yin et Yang est nécessaire à entretenir la santé. »

Neijing V : Le Yin Yang dans la nature et dans l’être humain

« Les Cinq Règnes qui régissent la santé sont ceux du Métal, de l’Eau, du Bois, du Feu et de la Terre. Cette notion bien comprise permet de prévoir chez le malade la maladie, la santé, la guérison, la mort ».

Chapitre XXI : I Relation de l’énergie des organes en fonction des saisons

« Les aliments épicés qui conviennent aux poumons peuvent disperser l’énergie, aussi il faut pas prendre d’aliments trop piquants si on a des troubles de l’énergie. Les aliments salés qui conviennent aux reins peuvent disperser le sang. Il ne faut donc pas consommer d’aliments trop salés si on a des affections liés à la circulation du sang. Les aliments amers qui conviennent au coeur peuvent provoquer, si il sont en excès, des vomissements. Quand on a des nausées il convient d’éviter les aliments amers. Les aliments doux qui conviennent à la rate peuvent, en excès, disperser la chai et nuire à celle-ci. Il faut donc ne pas absorber d’aliments trop sucées si on a des troubles de la chair et particulièrement de l’obésité. Les aliments aigres qui conviennent au foie peuvent disperser l’énergie des muscles. Il faut donc ne pas consommer d’aliments trop aigres ou acides si on a des problèmes musculaires »

Neijing XXIII : Les Cinq Energies

« L’aigre va aux muscles par l’intermédiaire du foie. Si on absorbe trop d’aliments aigres ou acides il se produira des contractures et parfois de l’anurie. Le salé va au sang par l’intermédiaire des reins. Si on absorbe trop d’aliments salés ou des aliments trop salés, on a très soif, ce qui ralentit et perturbe la circulation du sang et fatigue le coeur. En conséquence l’estomac est contraint de secréter d’avantage de liquides, ce qui renforce la sensation de soif. Le piquant va à énergie du souffle par l’intermédiaire des poumons. Si l’on absorbe trop d’aliments pîquants cela peut nuire à l’énergie et particulièrement à l’énergie protectrice (Weiqi) et on a la sensation de vide au coeur. L’amer va à l’estomac. Si on absorbe trop d’aliments amers, les trois foyers (triple réchauffeur) ne fonctionnent plus normalement, leur énergie repousse cet excès d’amertume ce qui provoque des vomissements. Le doux va à la chair. Si on absorbe trop d’aliments doux ou des aliments trop sucrés, l’estomac devient hypotonique, s’affaiblit car cette saveur douce est une saveur faible qui monte difficilement au réchauffeur supérieur, l’énergie n’étant plus dispersée elle se transforme en forme, donc en excès de poids »

Neijing LXIII : Les Cinq Saveurs et l’énergie.

« La couleur verte, de l’orient, pénètre jusqu’au foie. La couleur du sud est rouge et va au coeur. La couleur du centre est le jaune qui nourrit la rate. La couleur de l’Occident, le blanc va aux poumons. La couleur du nord est le noir qui va aux reins. Comme les saveurs, les couleurs nourrissent l’énnergie des organes »

Neijing IV : Vérités inscrites dans une cassette d’or

Et quelques autres grands textes classiques comme le Yueling (Iue Ling) ou « Prescriptions mensuelles », le Choujing ou « Livre de l’Histoire » ainsi que le livre des odes traitent également, à un moment ou a un autre de nutrition, ainsi que le Yijing (Yi King ou I Ching) le « Livre des Transformations ». Il s’agit de simples « conseils » mais ne nous y trompons pas, ils constituent l’essentiel des principes de la nutrition, donc de la santé.

« Au premier mois de printemps, les poissons à écailles conviennent parfaitement. A ce mois correspond le chiffre céleste huit, la saveur aigre et l’odeur (Suan) de l’aliment cru (cette odeur définie classiquement comme celle du « petit agneau » ne correspond pas au « rance » que l’on retrouve dans de nombreux textes qui se recopient indéfiniment. C’est simplement l’odeur sui generi du poisson cru, de la viande crue, du légume cru donc qui n’ont subi aucune altération due à la chaleur, à l’oxydation (automne), à la macération, à la conservation. C’est naturellement « être ainsi » l’odeur du cru. Mais pourquoi faire simple et efficace lorsqu’on peut traduire par inutile et compliqué ?). En cette période, le Fils du Ciel mange du blé et de la viande de mouton… ».

 

Un plat harmonieux nourrit tant l’esprit que le corps La couleur elle-même participe à la nutrition.

Xiaxiao Sheng I

« Le premier article de la Grande Règle concerne les Cinq Eléments.

l’Eau mouille, descend et devient salée ce faisant elle agit sur les reins et les os.
Le Feu monte se disperse,brûle et prend une saveur amère. Ce faisant il agit sur le coeur et la circulation du sang et de la chaleur.
Le bois se courbe et se redresse en poussant, il prend la saveur aigre qui agit sur le foie, la vue et les muscles.
Le Métal obéit, change de forme et prend une saveur âcre, piquante. Il agit sur les poumons et sur le souffle.
La Terre reçoit les semences, donne les récolte et engendre une saveur douce qui est en relation avec la rate et l’équilibre »

Choujing (Chou King) Annales de la Chine V : La Grande Règle

Le poulet de jade : encore un plat plusieurs fois millénaire Il était emporté lors des cérémonies sur les tombes des ancêtres !

Le Yijing ou Yi King (I Tching…) n’est pas en reste et il traite spécifiquement de la nutrition (Yi) dans l’Hexagramme 27 : « Yi : La Nutrition, la Nourriture ». Il s’agit, alors, d’une toute autre chose qu’un moyen de divination ou d’un baratin incompréhensible comme certains tentent encore de nous le faire croire. Ou de nous le faire avaler.

« Yi, la Nutrition, Yi signifie nourrir ; introduire dans la bouche afin de boire et de manger pour nourrir le corps de l’être humain et des êtres vivants. Les règles convenables pour le mouvement et l’immobilité, la vie ou la mort, naissent du sent du mot nourrir (Yi). Les prescriptions sur les aliments, les boissons résultent donc de l’entretient de la forme (Xing), de l’énergie (Qi) et de la vitalité (Sheng).

Les règles qui régissent la nutrition résultent du développement de la vertu (de l’efficacité, du principe efficace, de l’efficience) qui dérivent de l’observation. Dériver ou provenir de l’observation pour soi même et pour les autres c’est ce qui est exprimé par le sens réel du terme « Nourrir les Etres », donc de la Nutrition (Yi). La nourriture y pénètre, le souffle s’en exhale, image de la bouche. Observer la bouche c’est observer comment on se nourrit. Chercher à remplir la bouche c’est chercher à observer la nourriture. Chercher à remplir la bouche c’est donc chercher soi même la voie à suivre pour soigner le corps.

L’être réalisé emploie la prudence dans ce qui s’exhale, les paroles. Il fixe les préceptes relatifs à la boisson et à la nourriture. En analysant la Voie rationnelle qui se déduit de l’idée d’entretenir en se nourrissant, qu’il s’agisse d’entretenir la vertu (l’efficace) ou d’entretenir la Voie (Tao), rien n’échappe à cette loi générale.

Transgression dans la nourriture : présage néfaste de la perception. Puisqu’il y a transgression dans l’acte même de se nourrir, le présage est néfaste. Le tigre guette. (ici le Tigre peut être pris dans le sens du désordre, de la maladie)

Si la nourriture est conforme, le tigre s’en va. Ainsi l’être réalisé est prudent dans les paroles qu’il prononce et mesuré dans ce qu’il mange et dans ce qu’il boit. Nourrir, pour l’être réalisé, c’est simplement et naturellement entretenir sa rectitude »

Yijing 27 (extraits) : YI « La bouche, l’entretien de la Vie » Annales du Musée Guimet Tome Huitième, le YI KING par P.L.F. Philastre

Poulet et méduse : un accord ancestral qui n’a pourtant rien à envier à la cuisine « people » des plus grands chefs actuels !

« A droite la tête et le cou; à gauche la face de profil où se distinguent le nez et les muscles des mâchoires. Yi c’est la mastication, la nutrition. Sentence : on doit choisir ses aliments avec sois.
Manger trop peu est contraire à la nature ; manger trop condamne à la pléthore.
Qu’il prenne garde celui qui ne respecte pas les règles de l’alimentation, fut-il riche ou pauvre.
Mal s’alimenter c’est se ruiner.
Les règles de l’alimentation constituent un art évolué »

Les secrets du Yi King par Jacques Lavier (Professeur d’Acupuncture à la Faculté de Médecine de Taipei) Editions Sand

Le Tofu (Dafu) fut inventé par un alchimiste, élève de Gehong (Ko Hung)
Il le commercialisa comme du « jade commestible » !

« On régit un grand Etat comme on fait frire un petit poisson »

Laozi (Lao Tseu) Daodejing (Tao Te King) LX

Laozi alias « Vieux Bébé » ou plus précisément « Vieil Embryon » a rédigé le « Traité de la Voie et de son Efficace ». De (Te), en effet, signifie bien « vertu » mais dans le sens particulier de la « vertu » d’une plante médicinale. La digitale possède la vertu d’accélerer le mouvement du coeur. Elle n’en n’est pas pour autant « vertueuse » puisqu’elle serait même, en abus, proprement assassine. Pour Machiavel la « vertu » est simplement une force qui permet d’aboutir à un résultat. Il n’est aucunement question de morale là dedans !

Mais Laozi connaît la chanson puisqu’il préconise de diriger un êtat comme on fait frire un petit poisson, c’est à dire avec des régles que connaissent tous les cuisiniers et particulièrement avec beaucoup d’attention mais sans trop en faire. Si on ne remue pas la poêle (ou le Wok ou Guo !) les petits poissons collent les uns aux autres dans un bloc informe. Si on remue trop, ils se désagrègent.

Laozi est un malin car qui n’a pas fait frire de petits poissons ne connaît pas le truc. Et à l’époque de Laozi on imagine que les dirigeants avaient d’autres préoccupations que de faire cuire des petits poissons ! Confucius, lui même, alors qu’un Prince lui demandait quelle serait sa recette de gouvernance, pour parler comme certains de nos politiciens, lui répondit juste deux
mots : Zheng Ming !

Pour les littérateurs on se trouve alors obligé de faire dans la périphrase « Rendre aux mots leur juste valeur (ou leur valeur originelle) ». Zheng ming signifie simplement « Rectitude – Noms » « Rectifier les mots » Mais, en langage courant, qui échappe donc à nos édiles et autres technocrates cela signifie simplement : « Bon Sens » ! Et le bon sens est justement ce qui leur manque le plus.

Lorsqu’à l’éducation nationale (qui ne mérite plus de majuscules !) les parents d’élèves deviennent des « géniteurs d’apprenants » , un jardin un « espace végétalisé », un ballon de foot « un référenciel sportif bondissant » et un ballon de rugby « un référenciel sportif bondissant aléatoire » on peut comprendre qu’il existe des difficultés de compréhension concernant ce simple « bon sens » !

Et que l’on va y compliquer Confucius.

Un poisson frit c’est déjà la fête pour les yeux et les papilles
Mais n’abusez pas du piment qui, ici, renforce la couleur.

Encore un Grand Classique bien qu’il ne fasse pas partie des « Quatre Classiques ». Le Wainanzi ou Houai Nan Tseu a été rédigé au second siècle avant notre ère par le Prince Liu An, petit fils de l’Empereur fondateur de la dynastie des Chin.

« Dans les notes il y a cinq sons, le Gong le régit. Dans les couleurs il y a cinq teintes, le jaune, couleur impériale, les régit. Dans les saveurs il y a cinq goûts, le doux les régit. Dans l’ordre des Cinq Eléments il y a cinq substances : la Terre les régit. C’est la raison pour laquelle la nutrition régit l’être humain. Lorsque la Terre est raffinée elle engendre le Bois ; quand le Bois est raffiné il engendre le Feu ; quand le Feu est raffiné il engendre les nuages (Yun) ; quand les nuages sont raffinés ils engendre la pluie (Yu). Quand la pluie est raffinée elle retourne à la Terre qui, à son tour, engendre le doux. Quand le doux est raffiné il engendre l’aigre; quand l’aigre est raffiné il engendre l’âcre ; quand l’âcre est raffiné il engendre l’amer ; quand l’amer est raffiné il engendre le salé quand le salé est raffiné il retourne au doux. C’est la raison pour laquelle on harmonise la Terre avec l’Eau et le Feu avec la Terre. On transforme le Métal avec le Feu. On maîtrise le Bois avec le Métal. Le Bois lui même fait retour à la Terre. Les Cinq éléments se maîtrisent ainsi l’un, l’autre. De la sorte chacun d’entre eux mène à la perfection »
Le Bois l’emporte sur la Terre; la Terre l’emporte sur l’Eau; l’Eau l’emporte sur le feu; le Feu l’emporte sur le Métal ; le Métal l’emporte sur le Bois Ainsi les céréales naissent au printemps et meurent au automne ; les fèves naissent en été et meurent en hiver ; le blé naît à l’automne mais meurt en été ; les plantes des chemins naissent en hiver mais meurent en milieu de l’été (période de canicule correspondant à la Terre) ».

Philosophes taoïstes II : Houai Nan Tseu Bibliothèque de la Pléiade NRF Gallimard
Chapitre IV : Des formes terrestres.

Tout cela peut sembler fort répétitif mais une table de multiplication n’est-elle pas répétitive ? Cela change quelque peu, évidemment, des affirmations contractoires de nos auteurs diététiciens.

Une simple soupe vietnamienne ?
Mais aussi un repas complet et équilibré respectant les règles
millénaires de la diététique du Tao
Car le Tao n’est pas limité à la Chine !

Il est à remarquer une chose. Ouvrez plusieurs livres de cuisine. Les recettes concernant les mêmes plats sont, somme toute, assez identiques. On y retrouve donc les mêmes ingrédients, les mêmes modes et temps de cuisson, les mêmes explications qui, souvent d’ailleurs, se recopient d’un auteur à l’autre. Les cuisiniers sont liés à un fait : servir un plat qui ressemble au plat qu’ils décrivent. Un pot au feu n’est pas un canard à l’orange sinon cela se saurait et serait indiqué. « Pot au feu…suivre la recette du canard à l’orange ! » Et le lecteur furieux refermerait l’ouvrage en pensant qu’on le prend pour un crétin. La ménagère le jetterai probablement à la poubelle en disant « Quelle c…ce livre ! »

Ouvrez maintenant plusieurs ouvrages de diététique. Rien de ce qui est écrit dans l’un ne correspond à ce qui est écrit dans l’autre si ce n’est le fait qu’il s’agit de diététique. Et souvent de la seule méthode sérieuse qui existe ici bas. Ici on préconise cela quand on interdit ceci. Dans l’autre c’est exactement le contraire qui se produit.

Mais, comme de toutes façons on sait intuitivement que cela ne servira pas à grand chose de suivre les recettes, on s’en fout. Mais on range religieusement ces ouvrages comme si ils étaient parole d’évangile. Au lieu de simplement les foutre à la poubelle comme on ferait d’un livre de cuisine incompréhensible et inutile. Parce que la diététique c’est du sérieux !

Un Yin, un Yang, c’est le Tao
Tout simplement !

 

« L’alimentation équilibrée permet à l’être humain de se maintenir en bonne santé. Un régime inadéquat nuit à sa santé. Une alimentation appropriée aide le malade à recouvrer la santé. Dans le cas contraire elle aggrave la maladie »

JING GUI YAO LUE

Ces textes classiques sont évidemment à la disposition de tous les chercheurs et praticiens.

Il n’en demeure pas moins qu’ils ont déjà été publiés, notamment par Georges Charles dans ses deux principaux ouvrages traitant de diététique et de gastronomie

« L’HONORABLE CUISINE – Diététique et gastronomie chinoises –  »
par Georges Charles

Editions Encre (1983)
Dans cet ouvrage, entre-autres, Georges Charles dénonçait l’utilisation des farines de viande dans l’alimentation du bétail et les dérives de l’élevage des poissons. Probablement beaucoup trop tô d’ailleurs !

LA TABLE DU DRAGON – Tradition gastronomique et diététique chinoise –
Par Georges Charles

Editions Chariot d’Or (2000)

Ainsi que dans de nombreux articles parus dans la presse spécialisée.

Des « petits coeurs » à la vapeur
Une autre diététique qui rejoint, ici, la gastronomie cantonnaise
Une occasion rêvée pour boire du thé vert !

 

 

Pour en savoir beaucoup plus !

Deux ouvrages de référence sur la cuisine chinoise, la diététique du Tao et les aliments qui nous soignent !

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